Manifestement, la confusion persiste quant au rôle de l´Etat des années après le choix stratégique de l´économie de marché en tant que vecteur de développement. Dans un tel contexte, le rôle de l´Etat, pour nous en tenir au domaine économique et social, est celui de réguler et d´orienter, de produire des lois propres à impulser et à favoriser l´autosuffisance alimentaire. Dès lors, il ne s´implique pas (plus) dans tout ce qui est production de quelque nature qu´elle soit. L´Etat continue à soutenir les prix du lait et du pain, mais il serait plus dans son rôle en subventionnant l´agriculteur et le producteur de lait et en produisant des lois qui encouragent l´initiative et l´investissement privés. Ce qui est loin d´être le cas. Or, l´importation de ces matières premières ne vient pas en appoint à notre production de lait et de céréales, mais constitue la quasi-totalité de notre consommation laitière et céréalière. Avec ce constat désolant: nous dépendons totalement pour ces deux matières, base de vie de l´Algérien, de l´importation. Et cela n´est qu´un exemple pour situer le débat. L´Etat, contrairement à ce que d´aucuns pensent ou écrivent, n´est plus dans son rôle dès lors qu´il se substitue au producteur, comme cela a été le cas à l´époque des monopoles et de l´économie planifiée. Aujourd´hui, des choix stratégiques ont été faits, ayant induit des ouvertures sur l´étranger - association avec l´Union européenne et future adhésion à l´OMC (Organisation mondiale du commerce) - choix auxquels il faut maintenant s´en tenir. Cela veut dire préparer notre appareil de production, non seulement à faire face à la concurrence étrangère mais aussi à satisfaire les besoins nationaux. Cela implique de nouvelles normes de conduite tant de la part de l´Etat - qui doit retrouver son rôle de contrôle - que des producteurs nationaux qui doivent prendre les risques de l´investissement. Or, ni l´Etat, qui continue à empiéter sur des secteurs - la production - qui ne sont plus de son ressort, ni les investisseurs - cantonnés dans l´import-import - qui ont délaissé la production en amont, celle dont le pays a le plus besoin, ne se sont conformés aux nouvelles règles qu´imposent la libre entreprise et l´ouverture du marché algérien sur l´étranger. Aussi, pour rester dans le vecteur qui fait actuellement problème, relevons que l´Algérie a besoin de vaches laitières pour reconstituer son cheptel et non de poudre de lait - laquelle poudre a fait, notons-le, la fortune d´une petite minorité d´importateurs qui ont accaparé le monopole de ce produit - comme elle a besoin de semences pour relancer la production céréalière au moment où la facture de ces deux produits (le lait et le blé) est devenue astronomique et très lourde pour le pays. Comment dès lors parler de souveraineté lorsque nous dépendons de l´importation pour plus de 80% de notre nourriture? Est-on alarmistes lorsqu´on attire l´attention sur un dysfonctionnement qui met en danger l´indépendance même du pays? L´Etat, c´est évident, doit aider tous les producteurs qui tendent à assurer l´indépendance alimentaire du pays. Il n´a pas cependant vocation à subventionner les profits de quelques spéculateurs qui se sont enrichis à l´ombre d´une économie de marché mal comprise, mal encadrée et surtout mal assumée. Ce ne sont certes pas les résultats décevants de la production nationale des matières de première nécessité qui vont assurer notre indépendance alimentaire et, corollairement, la souveraineté du pays montée au pinacle par d´aucuns. Surtout lorsque nos exportations, hors hydrocarbures, sont nulles, voire inexistantes.