Par définition le but d´un commerçant c´est de faire des profits. Ce qui est tout à fait normal. Il y a le gros commerçant et le petit. Le grossiste et le détaillant. Les deux ont droit à une marge de bénéfice sur les prix. Jusque-là aussi, c´est tout à fait normal. La seule différence réside dans la fixation des prix. C´est le grossiste, en fonction de la quantité fournie par le producteur, qui fixe le prix d´un produit donné. Le détaillant ne fait que répercuter le prix ainsi fixé sur le consommateur. On a envie de dire que jusque-là encore il n´y a rien qui ne soit ordinaire. Aussi ordinaire que peut l´être le principe de l´offre et de la demande qui fixe le prix du produit mis à la consommation. Des deux paramètres de ce principe la demande, c´est-à-dire les consommateurs, est plutôt stable. Elle ne varie jamais brutalement. En revanche, l´offre est tributaire de la production. Celle-ci peut être abondante ou au contraire se raréfier. Tout dépend des aléas liés au climat, aux équipements ou à des maladies quand il s´agit de produits agricoles. Parmi ces produits se trouvent les oeufs. Ces jours-ci le prix de l´oeuf s´est subitement envolé. Pourquoi? Comme énoncé plus haut, il nous faut commencer par la production. De ce côté-là, RAS. Les producteurs ne signalent aucune baisse. Le détaillant comme on l´a vu également est hors de cause. Il achète au prix du marché et y rajoute sa marge. Entre les deux se trouve le grossiste. Et c´est là qu´il faut creuser. C´est lui qui fixe le prix, selon la disponibilité du produit. S´il ne reçoit pas la quantité habituelle d´oeufs alors que la production est stable c´est que forcément un goulot d´étranglement existe entre le «poulailler» et ses entrepôts. Forcément aussi le goulot est créé artificiellement. Pourquoi? Certainement pas par profit, car le grossiste peut gagner autant par la quantité. Alors? Alors nous sommes en pleine délinquance. Non, le mot est faible. Nous sommes en pleine criminalité, car toucher aux besoins alimentaires de toute une population ne peut être comparé à un petit délit de chapardage. Il y a très peu de temps, le ministre de la Pêche a reconnu publiquement et avec une désarmante nonchalance que des pêcheurs ont jeté au large des côtes Ouest des quantités de poissons avant d´accoster uniquement pour maintenir les prix à leur niveau élevé. Donc, la pratique s´est banalisée devant la «béatitude» de certains responsables. Il y a eu aussi le lait qui, même subventionné, a été utilisé ici et là pour la production de yaourts créant ainsi une tension sur le sachet. Il y a eu la tentative sur les viandes rouges à l´approche du Ramadhan, heureusement avortée par l´interdiction momentanée d´importation. La même tentative avec le mouton sur pied se profile à l´approche de l´Aïd El Adha. Nous sommes face, ni plus ni moins, au terrorisme économique. Car il est clair que quand on stocke un produit aussi périssable que les oeufs, on y sacrifie des fonds. Quand on disait dans ces mêmes colonnes, il y a peu, que le terrorisme chez nous est passé de l´arme conventionnelle à l´arme économique et alimentaire! La participation citoyenne est plus que jamais requise. A l´Etat de faire en sorte de la susciter et de l´encadrer. Il s´agit de notre subsistance. Les oeufs sont les protéines des petites bourses.