Les liens de souveraineté entre le Gspc et Al-Qaîda sont définitivement établis. L'identification du terroriste abattu le 12 septembre près de la localité de Merouana, dans la wilaya de Batna, a abouti à une surprise de taille: il s'agit bel et bien de Imad Abdelwahid Ahmed Alwan, alias Abou Mohamed. En termes «de terrain», il s'agit du représentant d'Al-Qaîda dans la zone sahélo-maghrébine. La mission de cet émissaire yéménite de Ben Laden dans les pays du Maghreb, après avoir «prospecté» ceux du Sahel, consistait, entre autres, à assurer une meilleure liaison entre Al-Qaîda et les groupes armés qui lui sont affiliés comme le Gspc, à apprécier le degré d'allégeance que ceux-ci faisaient à l'organisation transnationale d'Al-Qaîda et, surtout, à contrôler de visu l'application des ordres qu'émettait Ben Laden via ses relais yéménites. En ce qui concerne sa présence au sein de la direction du Gspc, il y a fort à croire qu'il était là pour «normaliser» le Gspc, dont les accointances et les liens avec Al-Qaîda sont à ce point évidents pour éviter toute équivoque. De fait, dans la stratégie de l'organisation d'Al-Qaîda, le Gspc devait remplacer le crépusculaire GIA et s'inféoder aux ordres de la nébuleuse transnationale dirigée par Ben Laden. Selon les aveux des terroristes arrêtés ou repentis, Imad Abdelwahid Ahmed Alwan avait pour mission en Algérie, d'évaluer l'état réel du Gspc et de ses chefs, pour statuer si ce groupe possède les potentialités nécessaires pour jouer le rôle qui lui avait été dévolu par Al-Qaîda, rôle qui dépasserait largement les frontières algériennes. En fait de potentialités du Gspc, il est tombé, le 12 septembre dernier près de Merouana, dans la wilaya de Batna, sur les potentialités de l'armée, qui a mis un terme définitif aux pérégrinations de cet «émissaire plénipotentiaire» de la nébuleuse Al-Qaîda. Le temps écoulé entre sa mort et son identification a été nécessaire pour établir une fiche de profil de l'homme et bénéficier de l'aide des services spéciaux yéménites pour récolter un maximum d'informations sur lui. Originaire de Taïz, où il est né en 1965, ce Yéménite fait tôt de s'installer à Sanaâ où il fréquente une mosquée gérée par l'association El Ihcène dont la revue El Mountada renseigne clairement sur les dispositions pro-djihadistes. C'est là où «Abou Mohamed» se fait connaître et apprécier pour son engagement résolument activiste et djihadiste. Une zone de flou entoure ses activités djihadistes jusqu'en 2000. A partir de cette date, on peut trouver sa trace au Mali, au Tchad, au Niger, et en Mauri-tanie, pays dans lesquels il fait des séjours courts et pleins, investi d'on ne sait quelles prérogatives. Entre juin et septembre, il est signalé dans d'autres pays tels le Soudan et l'Ethiopie. Il recrute des hommes qui passent, à la faveur de la Oumra, en Arabie Saoudite, avant de rallier d'autres pays. Circulant sous diverses fausses identités, dont celle qu'il appréciait le plus, Sidi Ahmed Habib Allah, qui le donne natif du Niger, il est présent au moment de l'attaque du World Trade Center, le 11 septembre 2001, dans le maquis du Gspc dans le sud-est algérien. Evidemment, il était hors de propos qu'Al-Qaîda laisse un pays comme l'Algérie, dont la position géostratégique est unique (à quelques encablures de l'Europe), sans y établir des bases sûres. Des terroristes repentis avaient confirmé que «Abou Mohamed» avait bel et bien rencontré Amari Saïfi, dit Abderrezak El-Para, émir du Gspc pour la zone Est et Mokhtar Belmokhtar, émir de la zone Sud. Le premier, qui se considère comme une «autorité militaire» au même titre que Hassan Hattab, a tout fait pour que la rencontre Imad Abdelwahid-Hattab ne se produise pas, avançant - pour des motifs de leadership évidents - qu'il était aussi autorisé que Hattab pour traiter des questions d'alliance et de stratégie. C'est cette sourde lutte de leadership qui a fait échouer la rencontre, avant que l'émissaire yéménite, qui a caracolé pendant de longues années, ne tombe dans les maquis de Merouana. Le Gspc, qui a fait un forcing inquiétant ces derniers mois en prenant pour cible les forces de l'ordre, semble donc bénéficier d'une toile quasi transnationale, les armes provenant du Sud, via l'émir Belmokhtar et les commandes des dirigeants d'Al-Qaîda, via Hattab. Maintenir les choses en l'état en Algérie est un objectif hautement stratégique.