Moins trivial, sinon plus élégant que son prédécesseur, George W.Bush - qui n´hésita pas à qualifier certains pays «d´Etats voyous» - l´actuel locataire de la Maison-Blanche, Barack Obama, n´en a pas moins, lui aussi, fait dans l´effet d´annonce en parlant «d´Etats hors normes», en présentant sa nouvelle politique de défense stratégique et l´éventuel recours à l´arme nucléaire. Cette clarification de la politique américaine de défense - qui rompt avec l´ambiguïté observée jusqu´ici par Washington - est certes la bienvenue, donnant au président américain d´expliquer dans quelle condition les Etats-Unis feront usage de l´arme atomique. M.Obama précise cependant que «les Etats hors-normes comme l´Iran et la Corée du Nord» (les mêmes en fait, moins l´Irak, mis au pilori par Bush) seront des exceptions à cette nouvelle règle, selon laquelle les USA n´auront pas recours à l´arme nucléaire contre les pays n´en disposant pas. On aurait pu se féliciter de cette précision du fait que le chef d´Etat de la plus grande puissance mondiale joue, enfin, franc jeu et cartes sur table pour ce qui est de la sécurité nucléaire de la planète. Il y a toutefois comme un défaut dans cette approche que fait le président américain de la sûreté nucléaire, en faisant l´impasse sur le danger réel induit par le seul pays au monde disposant de l´arsenal nucléaire mais n´obéissant à aucun des critères en la matière, refuse les inspections de l´Aiea, ni n´adhère aux traités qui encadrent et contrôlent la prolifération nucléaire (le TNP et le Ctbt). Cet Etat, c´est Israël, véritable Etat «hors normes» puisque le droit international, commun à tous les pays, ne s´applique pas à l´Etat hébreu. Une simple omission de M.Obama? Nous n´y croyons pas vraiment. Aussi, comment peut-on sérieusement discuter de sécurité nucléaire lorsque l´on permet à un pays d´échapper aux contrôles, drastiques, opérés sur tous les autres Etats dans le monde? Israël est le seul Etat du Moyen-Orient à avoir l´arme nucléaire - les experts occidentaux estiment entre 250 et 370, le nombre de bombes atomiques israéliennes - alors que l´Iran, sous contrôle de l´Agence de sûreté nucléaire de l´ONU (Aiea), est seulement soupçonné de vouloir acquérir l´arme nucléaire. Entre posséder l´arme nucléaire - ce qui est le cas d´Israël - et vouloir lacquérir - suspicion qui pèse sur l´Iran - il y a quand même un monde. Or, c´est l´Iran qui fait peur! Dans le temps où les Occidentaux somment Téhéran de se soumettre, soit d´abandonner toute recherche liée au nucléaire, les mêmes ne cherchent pas à en savoir plus sur le nucléaire israélien. De fait, fort du soutien des Etats-Unis, Israël affirmait hier qu´il va maintenir la politique du «flou» sur la question de ses armes nucléaires. C´est ce qu´a indiqué hier le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Dany Ayalon. Or, ce «flou» ne peut plus être de mise depuis que la langue de l´ancien Premier ministre israélien, Ehud Olmert, eut «fourché» qui avoua, pressé par les questions d´une chaîne de télévision allemande, qu´Israël est une puissance nucléaire en déclarant: «Nous n´avons jamais menacé un pays d´annihilation. L´Iran menace ouvertement, explicitement et publiquement de rayer Israël de la carte. Pouvez-dire qu´il s´agit du même niveau de menace lorsqu´ils (les Iraniens) aspirent à avoir des armes nucléaires, comme la France, les Américains, les Russes et Israël?» Cet aveu du premier responsable politique d´Israël a seulement semé un «trouble» en pays d´Occident. Sans commentaire! Depuis les années 50, la France -qui aida Israël à installer la centrale nucléaire de Dimona- et au moins depuis 1989, les Etats-Unis - qui ont passé un accord «d´entente» avec l´Etat hébreu sur le nucléaire - savent pertinemment à quoi s´en tenir quant à l´arsenal nucléaire israélien. Quelle sécurité nucléaire peut-on évoquer sans y inclure le cas d´Israël, Etat réellement «hors normes»?