Chaque nouvel Exécutif rejette la balle sur le suivant. C'est le monde de l'absurde. Il y a de cela une vingtaine d'années, les deux projets, celui du nouvel aéroport et du métro d'Alger, étaient lancés en très grande pompe par les décideurs de l'époque. C'était le temps des incommensurables prestiges. Du Sanctuaire des Martyrs, raillés par tous, des Plans antipénuries, du pétrole à 40 dollars et des discours grandiloquents hélas sans lendemains. Octobre 88 a stoppé net cette politique suicidaire. Mais pas les deux projets qui sont ceux du métro d'Alger et de la nouvelle aérogare, censés placer la capitale algérienne au niveau requis pour drainer les investissements, prouver le sérieux de nos décideurs et mettre en exergue la maîtrise par notre pays de certaines techniques déjà usitées de par le monde. Or, depuis le début des années 80, tous les gouvernements successifs se sont juste contentés d'ouvrir ces deux dossiers, tout aussi encombrés qu'encombrants, avant de les refermer, les laissant en héritage à l'équipe suivante...jusqu'au jour d'aujourd'hui. Entre-temps, des sommes colossales, évaluées à plusieurs centaines de milliards de dinars, ont été dépensées sans que les deux projets progressent de manière significative. La superstructure de l'aérogare a, certes, été presque achevée par Cosider il y a de cela plus d'une dizaine d'années. Le hic c'est qu'elle est en train de dépérir, estiment des experts dans l'attente de la relance de ce chantier, par manque de financement voire l'absence d'entreprises capables de prendre en charge de manière efficiente une pareille superstructure. La nature marécageuse du terrain choisi n'est pas pour arranger les choses. Pas moins de 7 milliards de dollars, pourtant, ont été débloqués par le chef de l'Etat en l'an 2000 dans le cadre de la mise en branle du plan de soutien à la relance économique. Cet argent est intégralement destiné à financer les infrastructures de base destinées à servir de substrat et d'incitateurs aux investissements tant étrangers que nationaux. L'aérogare d'Alger semble avoir été oubliée alors que notre pays continue à fonctionner avec un aéroport (international) n'égalant même pas en infrastructures et en moyens les aéroports de province de certains pays développés de l'hémisphère Nord de la planète et même de certains pays arabes tels que les Emirats arabes unis, l'Arabie Saoudite ou le Koweït. Ces pays sont cités parce qu'ils jouissent de revenus pétroliers conséquents comme notre pays. Car même les voisins qui n'ont pas droit à cette chance ont réussi à se doter d'aéroports dignes de ce nom, conditions sine qua non pour faire venir durablement des investisseurs qui croiront enfin aux chances de réussite de notre Etat. La priorité, pourtant, ne devrait échapper à personne. Et certainement pas à l'Exécutif actuel dont l'un des principaux objectifs est d'amener un maximum d'investisseurs étrangers et nationaux à reprendre les entreprises publiques algériennes et à en créer d'autres, histoire de relancer durablement notre économie nationale. Le «bide» essuyé lors de l'ouverture des plis portant mise en concession de l'aéroport Houari-Boumediene donne la pleine mesure du peu d'estime dans laquelle nous tiennent les potentiels investisseurs étrangers en matière d'infrastructures de base. La situation est encore plus déplorable pour ce qui est du métro. La dernière déclaration officielle relative à ce sujet, faite il y a de cela plus de deux années, annonçait le chiffre d'un milliard de dollars pour parachever l'oeuvre. Le projet, lancé en grande pompe, n'a pas cessé d'être revisité et révisé à la baisse, jusqu'à rétrécir comme peau de chagrin. Les reliefs accidentés, les nappes phréatiques et la sismicité de la capitale, estiment les experts, n'ont pas été correctement pris en ligne de compte dans l'euphorie du lancement du projet. Nous en payons les conséquences jusqu'à maintenant puisque le métro d'Alger, avec toute la bonne volonté du monde, n'est pas près de voir le jour avant quatre ou cinq années selon les prévisions les plus optimistes. Le projet, actuellement, cherche juste à relier entre eux quelques grands quartiers de la capitale, tels que Bachedjarah, la place des Martyrs et la place du 1er-Mai alors que dans l'euphorie du début il était carrément question d'établir des liaisons avec la plupart des banlieues, histoire de réduire la pression routière qui étouffe Alger et transforme en calvaire toute velléité de déplacement en semaine, même en dehors des heures de pointe. Le tableau s'annonce encore plus sombre sur le plan de la fameuse autoroute Est-Ouest. Longue de quelque 1200 km, cette route nécessite la bagatelle de 7 milliards de dollars pour être achevée. Elle progresse annuellement de quelques dizaines de kilomètres à peine. Un rythme qui prête à penser qu'elle ne pourrait pas être livrée avant un demi-siècle au moins. Véritables gouffres financiers, ternissant grandement l'image de marque de notre pays qui veut refléter celle d'un Etat entreprenant, ouvert sur la libre entreprise et la réussite, ces projets continuent à traîner dans le temps et à renvoyer aux calendes grecques le grand de redémarrage d'un pays en panne depuis de bien nombreuses années. Une vingtaine peut-être...Autant dire que ce sont des projets à l'Arlésienne.