L'éventualité d'un «retour» légitimé ou «maquillé» de cette organisation constitue un enjeu politique et hautement stratégique. Selon une source généralement bien informée, une réunion regroupant les principaux chefs de l'Armée islamique du salut (AIS) a eu lieu dans la région de Baraki. Parmi les présents, il y avait Madani Mezrag, le chef de cette organisation, Ahmed Benaïcha, représentant de la zone Ouest de l'AIS, Belhadjar de la Ligue islamique pour le djihad armée (Lida) organisation autodissoute, et Mustapha Kertali. La source, qui ajoute que d'autres éléments appartenant à cette organisation ont également pris part à cette rencontre qui a duré trois jours, précise que les discussions ont surtout porté sur la nécessité du retour de l'AIS sur la scène politique nationale, et ce, poursuit notre source, par le biais du mouvement Ennahda. La question relative au «règlement» de la situation de ces éléments ayant bénéficié de la loi sur la concorde civile a également été «sérieusement» abordée. Est-il utile de noter, à cet égard, que, selon des informations recoupées, plusieurs rencontres ont déjà eu lieu, notamment à Jijel, Chlef et Médéa où la situation «socioprofessionnelle» de ces éléments occupait souvent le débat. En outre, la source semble dire que la plupart des rencontres que l'AIS avait tenues se soldaient presque toutes par «un ton revendicatif» qui renseignerait sur une tendance de cette organisation au «mécontentement». Rappelons que Madani Mezrag, émir national de l'AIS, branche armée de l'ex-FIS de 94 à 97, avait décrété, le 1er octobre, une trêve unilatérale et inconditionnelle. Après avoir bénéficié, le 13 janvier 2000, d'une couverture politique et juridique de la part du Président de la République, l'AIS s'autodissout et ses 6000 hommes environ ont réintégré la société. Cette organisation s'est montrée favorable à l'option présidentielle de concorde civile et s'est inscrite également dans une démarche de réconciliation nationale. Jusqu'à présent, Madani Mezrag a toujours affiché, malgré ses rares déclarations aux médias, notamment celles contenues dans sa récente lettre, sa «volonté de vouloir contribuer à une sortie de crise». Ce supposé retour de l'AIS sur la scène politique était-il contenu dans «l'accord ANP-AIS» dont la hiérarchie militaire vient de nier l'existence? Mais l'AIS, doit-on le souligner, a prôné la démarche officielle et, selon ses responsables, l'«accord ANP-AIS» existe bel et bien. Donc, ce dernier stipulerait forcément le préalable retour de l'ex-FIS. L'on se rappelle, par ailleurs, que Adami avait expliqué la recrudescence de la violence terroriste durant l'été dernier par le fait qu'une «grande injustice est en train de régner dans le pays». Quels sont donc les tenants et les aboutissants de ce «retour»? Si ce dernier était programmé avant les élections et que celui-ci se voulait «par le biais du parti Ennahda», alors les propos de Adami s'avéreraient justes quant à «un écontentement» de la part de ces éléments. Yaurait-il eu des pressions? De toutes les manières, les événements du 11 septembre et la mauvaise tournure prise par la mouvance islamiste à l'échelle mondiale à la suite de ces attentats, ont réduit certainement cette organisation à une situation de désespoir, ce qui l'aurait poussée alors à lorgner du côté d'Ennahda qui lui servirait de prête-nom. Mais dans ces conditions, le ministre de l'Intérieur, M.Yazid Zerhouni, validera-t-il les dossiers de ces éléments car, doit-on le rappeler, ceux-ci, pour avoir justement appartenu à l'ex-FIS, ont été rayés des listes électorales, lors des législatives de juin 2002. Enfin, l'éventualité d'un «retour» légitimé ou «maquillé» de cette organisation autodissoute sur la scène politique nationale constitue, surtout à l'approche de la présidentielle de 2004, un enjeu politique et hautement stratégique pour le pays.