Washington a bloqué une condamnation de l'Etat hébreu. Sharon peut continuer à perpétuer ses crimes dans les territoires occupés, et ce n'est certes pas demain que des comptes lui seront demandés à lui et à Israël pour les actes criminels que commet quotidiennement l'armée israélienne dans les territoires palestiniens occupés. Et pour cause! Washington assure l'impunité à l'un comme à l'autre en bloquant, à nouveau, par son veto, un texte de résolution présenté par la Syrie et condamnant Israël pour «le meurtre de plusieurs employés des Nations unies dans les territoires occupés». En s'opposant à l'adoption de ce projet de résolution, les Etats-Unis, loin de défendre la paix et la sécurité dans la région, comme le déclare John Négroponte, ambassadeur des Etats-Unis à l'ONU, ont surtout permis à Israël d'échapper encore au blâme de la communauté internationale. Il est dès lors aisé de comprendre la satisfaction du gouvernement israélien qui, par la voix d'un conseiller de Sharon, déclare: «Nous nous félicitons de la position des Etats-Unis qui, par leur veto, ont empêché l'adoption d'une décision unilatérale.» Donc, une condamnation d'Israël pour ses crimes est «une décision unilatérale»? Cela n'est pas le sentiment de l'ambassadeur de France auprès de l'ONU, Jean-Marc de la Sablière, qui indique: «Il était à la fois légitime et justifié (...) que le Conseil de sécurité engage une nouvelle fois Israël à respecter les obligations qui sont les siennes en vertu du droit humanitaire international et particulièrement en vertu de la Quatrième Convention de Genève» (de 1949, relative aux populations civiles), regrettant au nom de la France que «le Conseil n'ait pas été en mesure de voter ce projet de résolution à l'objet limité mais essentiel». Pour Nasser Al-Kidwa, représentant palestinien à l'ONU, il ne faisait aucun doute que les actes mis en cause «constituent clairement, selon le droit humanitaire international, des crimes de guerre». Nasser Al-Kidwa a dit, par ailleurs, «la communauté internationale doit prendre des mesures contre ceux qui les ont commises et qui doivent être présentés devant la justice». Al-Kidwa mettra en exergue le fait qu'«il est évident que ces attaques (cf.: l'assassinat ces derniers jours par l'armée d'occupation israélienne d'employés de l'agence de l'ONU, Unrwa, et la destruction de plus de 500 tonnes d'aide alimentaire du PAM, autre agence onusienne) font partie du mépris systématique d'Israël pour le droit international» relevant que «Israël bénéficiait de la protection automatique que lui accorde un membre permanent du Conseil de sécurité». Ce même membre, les Etats-Unis pour ne point le citer, a, par ailleurs, infligé un affront à l'Union européenne en s'opposant à la publication de la «feuille de route» du quartette (ONU, USA, UE et Russie) sur la création d'un Etat palestinien par étape d'ici à 2005, obéissant ainsi au voeu d'Israël de geler toute initiative pour le Proche-Orient jusqu'après les élections israéliennes prévues le 28 janvier prochain. Ainsi, non seulement l'Etat hébreu échappe à toute condamnation de ses crimes commis contre les Palestiniens et, accessoirement, contre des représentants de la communauté internationale, en bénéficiant de l'impunité que lui accorde le veto américain, mais c'est encore Tel-Aviv qui décide du tempo de la mise en marche d'un processus de recherche d'une solution pacifique mis en branle par le quartette. Ainsi, que ce soit à propos du vote du projet de résolution de l'ONU, bloqué par le veto américain, ou l'ajournement de la feuille de route, suite à la décision prise par le président Bush, c'est toujours Israël qui tire les ficelles. Aussi, à propos de décision unilatérale, que dire de celle émise par le quartette, qui s'est réuni vendredi à Washington, qui déclare dans un communiqué: «Tous les Palestiniens, qu'il s'agisse de groupes ou d'individus, doivent mettre fin aux actes de terreurs contre les Israéliens, en tout endroit». Pas un seul mot pour réclamer la même chose de la part de l'armée d'occupation israélienne qui a instauré la terreur contre la population palestinienne, sous état de siège, depuis plus de deux ans. Est-ce équitable de tout mettre sur le dos des Palestiniens, quand ceux-ci ne font que résister à une occupation et à une agression qui font fi des normes internationales en temps de guerre. Et il faudrait bien qu'un jour Israël admette que la paix se fait avec ceux qui se battent, et c'est tout le peuple palestinien qui se bat pour sa liberté. Que Washington encourage les Israéliens dans leur irrédentisme, en leur assurant l'impunité, voilà qui ne concourt guère à abréger les souffrances des communautés palestinienne et israélienne.