Les représentants de Rabat ont tenté de bloquer la redynamisation de l'espace maghrébin. Une nouvelle performance est enregistrée dans la tortueuse évolution de l'UMA. Malgré les différences d'approche qui caractérisent le coeur central de cette organisation, les relations algéro-marocaines, les pays mem-bres ont réussi la prouesse de tenir la 20e session du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'ensemble maghrébin à Alger. Celle-ci, officiellement ouverte hier à l'hôtel Sheraton au Club des Pins en présence des chefs de la diplomatie des 5 pays membres de l'Union, a été précédée des réunions des experts et du comité de suivi composé des ministres délégués chargés du dossier au niveau de chaque pays. D'emblée, et sans attendre les décisions finales qui seront prises par les chefs de la diplomatie à l'issue de leur rencontre, et au vu de leurs interventions respectives toutes empreintes d'optimisme lors de la séance plénière et plus encore à travers leurs déclarations à la presse proclamant leur volonté et leur détermination à impulser un nouveau départ à la construction maghrébine, il semble qu'un sommet des chefs d'Etat de l'UMA et d'ores et déjà inscrit dans l'agenda de ces derniers au plus tard avant la fin du premier semestre de l'année en cours. La date exacte d'une telle rencontre au sommet n'étant pas encore connue, elle fera sûrement l'objet de tractations durant la séance à huis clos qui va clôturer ses travaux tard dans la soirée. Mais dès la fin de la plénière, et devant l'insistance des journalistes pour connaître la date précise du sommet, le chef de la diplomatie algérienne, M.Abdelaziz Belkhadem, a implicitement laissé entendre que le sommet maghrébin est pour bientôt et que toutes les parties restent confiantes pour voir se matérialiser cette option. Cela d'autant, que, lors de leurs interventions hier, les 5 ministres des Affaires étrangères maghrébins ont tous mis l'accent sur l'urgence et la nécessité d'organiser un tel sommet ( le 7e) qui est constamment différé depuis 1994. Les mutations dont sont l'objet depuis quelque temps les pays de la région, les défis qui se posent à eux à travers la mondialisation des échanges et la constitution de vastes ensembles économiques et politiques (Union européenne, Union africaine) et surtout le contexte international de ces derniers mois notamment au Proche-Orient (Palestine) et dans le Golfe (Irak) ont poussé les pays maghrébins jusque dans leurs derniers retranchements. Il s'agit, selon tous les intervenants, de s'entendre pour édifier ce tant attendu Grand Maghreb arabe, ou sinon faire les frais individuellement de cette rapide évolution du monde. Néanmoins, dans leurs réponses aux questions des journalistes, les principaux animateurs de ce regroupement nord-africain, notamment, le chef de la diplomatie marocaine, émettent des préalables et donc créent la fausse note dans ce bel unanimisme pour faire face aux incertitudes internationales. Ainsi, le ministre des Affaires étrangères marocain n'a pas cessé, dans ses réponses aux médias, de mettre en avant ce qu'il a appelé «les menaces et les dangers» qui pèsent, selon lui, sur les intérêts et l'unité de son pays. Certes, pour une fois la question sahraouie n'a pas été brandie avec virulence comme par le passé où elle fut souvent une tradition dans la diplomatie marocaine à chaque rendez-vous maghrébin, Rabat proclamant attendre la mission Baker qui visitera prochainement la région. Mais, cette fois aussi, les représentants de Rabat ont trouvé l'élément qui pourrait bloquer la redynamisation ou la refondation de l'UMA. Il s'agit de la fameuse question de la fermeture, depuis août 1994, des frontières terrestres entre l'Algérie et le Maroc et dont ce dernier réclame l'ouverture avant toute étape supplémentaire dans l'intégration maghrébine, feignant d'oublier que c'est l'initiative marocaine d'instauration du régime des visas entre les deux pays qui a conduit à cette situation. Alger, qui considère ses relations «ordinaires» avec le royaume chérifien et aspire à ce qu'elles soient «excellentes», estime que cette question peut se régler dans un cadre bilatéral. Quant à l'avenir immédiat de l'UMA, il s'agit surtout de ne pas tomber dans le scénario de l'année dernière.