Le Chef du gouvernement est venu, à son tour, nous rassurer : “Le système économique et financier algérien est à l'abri, aujourd'hui, dans cinq ans et dans dix ans, de la crise financière actuelle et de ses composantes actuelles, tant que notre système n'a pas évolué et tant que notre Bourse n'est pas bien intégrée au marché financier international.” Qu'est-ce qu'ils ont nos dirigeants à répéter, l'un après l'autre, que le pays qu'ils gèrent est épargné des effets de la récession, parce qu'il est largué par le mouvement planétaire de développement et d'intégration ? Notre providentiel sous-développement ne nous protège pourtant, de l'aveu du Premier ministre, que pour “un ou deux ans”, voire “deux ou trois ans”, en fonction du niveau de baisse éventuelle du prix du pétrole ! En supposant que, comme on l'espère, le gouvernement n'a pas fait exprès de nous maintenir en dehors de l'évolution mondiale, il n'y a pas lieu de pavoiser pour d'heureuses retombées tout de même dues au retard de notre système économico-financier. Ce serait se satisfaire du confort misérable d'une économie de subsistance, même si celle-ci permet un train de vie confortable à l'Etat et aux catégories sociales rentières. Dans l'histoire, une question n'est pas posée, et qui pourtant semble s'imposer : celle de savoir ce que nous a coûté cette auto-exclusion. Depuis au moins le temps que la perspective de l'inéluctabilité d'une économie mondialisée nous est accessible, le conservatisme rentier, en nous maintenant dans une économie de beylicat, a certainement induit un manque à gagner. Les opportunités perdues de placements, de prises de participations, d'IDE, de concurrence et de partenariat émulateurs, de transfert de technologie, etc. du fait de cette économie d'accumulation primitive, sont peut-être dans une grande mesure responsables de l'état actuel de l'économie nationale. Il serait certainement utile de mesurer les effets de ces ratages et de les comparer aux gains supposés du boycott du système financier international. C'est alors qu'on pourra vérifier si une économie sans risque de retraité est préférable à une économie active d'intégration. Mais il n'est pas dans notre culture politique, basée sur le verbe unique des “réalisations accomplies”, de calculer les bénéfices manqués. Contrairement à la règle générale, la comptabilité politique n'est pas en partie double. Dans le discours officiel, les inconvénients structurels et durables d'une économie bloquée sont couverts par les avantages relatifs et conjoncturels de son retard ! De la même manière, le gouvernement parle de ce qu'il fait et envisage de faire pour les sinistrés de Ghardaïa là où il est question des précautions qui n'ont pas été prises pour réduire l'ampleur de la catastrophe. Et si la question était posée, elle serait le fait de soucis pré-électoraux. Désormais, dès qu'une objection ne sera pas exprimée sur la gestion des affaires du pays, ses auteurs seront suspectés d'intérêt pour les “prochaines échéances”. Comme si ce genre d'ingérence avait quelque effet sur un régime qui s'auto-évalue et s'auto-élit ! Comme si l'opinion des Algériens avait quelque conséquence sur l'issue d'un vote ! Ce serait trop demander, en effet. M. H. [email protected]