“Il y a des sommes faramineuses d'argent allouées par l'Etat à la femme rurale, mais qui ne lui parviennent pas.” C'est Saïda Benhabyles, la présidente de l'Association de la femme rurale, qui a fait cette déclaration hier à l'Institut national d'orientation agricole de Saïd-Hamdine d'Alger, à l'occasion de la Journée mondiale de la femme rurale organisée à l'initiative du ministère de l'Agriculture et du Développement rural. Mme Benhabyles a fait cette déclaration au cours des débats autour des obstacles que rencontrent les femmes rurales. Devant le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa, et de la ministre de la Famille et de la Condition féminine, Mme Benhabyles a indiqué que “la volonté politique existe pour la promotion de la femme rurale, mais le problème est que cet argent ne lui parvient pas”, dit-elle. “La femme rurale est devenue malheureusement une carte électorale qu'on utilise lors des rendez-vous électoraux”, dit-elle, avant d'évoquer un autre problème auquel sont confrontées ces femmes. “Il y a un autre problème auquel font face ces femmes, c'est celui de l'abandon par leurs maris émigrés. C'est un phénomène nouveau et ample. Il y a, en effet, des centaines de femmes rurales abandonnées par des émigrés”, explique-t-elle avant de dire que des statistiques sur la question n'ont pas été faites “parce que ces femmes-là ont honte de parler”. Elle précisera qu'elle organisera le 20 octobre prochain une conférence sur cette question à Bruxelles aux côtés de la sénatrice Mme Anne-Marie lizin pour dénoncer l'attitude des autorités européennes par rapport aux femmes des émigrés abandonnées par leurs maris et lésées dans leurs droits. Quoiqu'il en soit, les problèmes de la femme rurale ont été évoqués par les deux membres du gouvernement qui ont exprimé leur disponibilité à accompagner et à prendre en charge leurs doléances. Mme Nouara Djaâfar dira à ce sujet que le gouvernement rendra publique avant fin novembre une stratégie gouvernementale de prise en charge des femmes qui reprend leurs doléances ainsi que l'ensemble des obstacles et difficultés qui se dressent sur leur chemin pour une intégration économique. “Nous sommes entièrement disposés et disponibles dans l'ensemble des départements à aider et à accompagner via des programmes les femmes”, dira la ministre, tout en précisant que “tout programme qui s'élabore sans prendre en considération les femmes est sans nul doute voué à l'échec”. Le ministre proposera, quant à lui, en réponse aux problèmes de commercialisation des produits élaborés par les femmes rurales évoqués par Zohra Abrous, présidente de l'Association nationale de la promotion de l'emploi et de la formation, “la création de coopératives pour commercialiser leurs produits agricoles et artisanaux”. La commercialisation des produits de la femme rurale sur le marché national “est un problème réel” et que le ministère est prêt à accompagner toutes les actions pour surmonter cet obstacle. M. Benaïssa a indiqué aussi que le nouveau dispositif financier RFIG (accompagnateur) est susceptible de prendre en charge le problème de financement des projets des femmes rurales. Ce type de crédit est destiné à appuyer le programme de renouveau de l'économie agricole et rurale et sera octroyé par les banques conventionnées avec le ministère de l'Agriculture. À ce jour, il n'y a que deux banques publiques : la Banque de l'agriculture et du développement rural (Badr) et la Banque nationale d'Algérie (BNA) qui ont adhéré à ce système, selon le ministère. “Nous avons demandé aux parties concernées de rapprocher les financements des projets ruraux”, a-t-il dit. M. Benaïssa, qui a écouté longuement les préoccupations des femmes rurales venues de 38 wilayas du pays, a souligné l'existence de cellules d'animation rurales au niveau des communes chargées d'expliquer aux citoyens, notamment les femmes, le contenu de la stratégie du renouveau rural. Nadia Mellal Bouali