Lors d'un point de presse tenu hier par la CADC, les membres de la présidence tournante ont précisé que tout délégué qui interviendrait à propos de l'invitation du Chef du gouvernement Ahmed Ouyahia au dialogue n'engagerait que son avis personnel, car la position officielle de la Coordination ne sera connue qu'à l'issue d'un conclave extraordinaire de la CADC prévu au cours de la semaine à Azazga, laquelle décision sera validée ou non, le week-end prochain, lors d'un conclave extraordinaire de l'Interwilayas qui reste l'instance suprême du mouvement citoyen. Le conclave extraordinaire de ce jeudi a été décidé spécialement à l'effet de répondre à Ouyahia. C'est dire que la CADC ne veut faire aucun commentaire à propos des dernières déclarations du Chef du gouvernement. Le même son de cloche se fait entendre du côté de Béjaïa où des délégués contactés par nos soins posent toutefois, et d'ores et déjà, des préalables à tout dialogue, à commencer par celui de la libération des détenus du mouvement citoyen. Les délégués de la CICB précisent que la décision revient à l'instance suprême du mouvement qui est l'Interwilayas et qui tiendra son conclave, à Amizour, les 12 et 13 de ce mois. “La décision ne peut être prise que par l'Interwilayas”, nous déclare M. Oudjedi Farès, un ex-détenu. “Que les choses commencent à être dites clairement par le pouvoir, que la jeunesse qui compose notre mouvement est vivace, qu'il reconnaît que c'est un mouvement responsable et que ses délégués sont des patriotes et nationalistes, c'est déjà un pas”, concède-t-il. C'est dans ce sens qu'abonde d'abord M. Khodir Benouaret, délégué d'Amizour et également ex-détenu du mouvement. “L'appel au dialogue est venu dans un contexte tragique”, précise M. Benouaret avant de soutenir : “De notre côté, on doit analyser la situation et ne pas se précipiter.” “Notre mouvement, ajoute-t-il, a toujours agi par consensus. Donc, c'est à l'Interwilayas de prendre la décision.” L'ex-détenu et délégué d'Amizour estime aussi que “le pouvoir doit joindre l'acte à la parole, notamment en libérant les détenus”. Le chanteur engagé et délégué de la CICB, Boudjemaâ Agraw, est du même avis que ses camarades de lutte. “Il ne peut y avoir de dialogue sans la libération des détenus, l'arrêt des poursuites judiciaires et la liberté de se réunir”, déclare Boudjemaâ Agraw, qui s'est incliné, lui aussi, devant la mémoire des victimes du séisme, en souhaitant un rétablissement moral rapide à leurs familles. Considéré comme un élément “radicaliste” du mouvement, Zahir Benkhellat juge que “le pouvoir, tout accaparé par la lutte féroce entre ses différents clans, se livre à un autre spectacle médiocre et dangereux pour la stabilité de la société, pour ne pas dire davantage” “Au moment, poursuit-il, où le président de la République a été reçu par des jets de pierres, M. Ouyahia sort de sa réserve en invitant les délégués du mouvement au dialogue.” Le délégué d'Akbou tient à rappeler que la population a déjà répondu à cette offre par “son exigence de la satisfaction pleine et entière de la plate-forme d'El-Kseur et la libération immédiate et inconditionnelle des détenus du mouvement citoyen de Kabylie, ainsi que la dissolution de toutes les assemblés issues des élections du 30 mai et du 10 octobre 2002”. M. Benkhellat soutient : “La kabylie ne pardonnera jamais le sang versé par ses meilleurs enfants et c'est grâce à notre mouvement que le peuple algérien à compris que le salut du pays ne peut venir que de la fin du système qui a enfanté Ouyahia.” Autant sur les conditions du dialogue que sur le rôle de l'Interwilayas de se prononcer sur une telle question, les délégués de Bouira pensent la même chose que leurs camarades de Béjaïa et de Tizi Ouzou. Là aussi, “la libération de l'ensemble des détenus de la hogra, de l'injustice et de l'impunité” reste une condition fondamentale pour permettre au dialogue d'avoir lieu. La Coordination de Bouira, qui se dit avoir pris acte des déclarations officielles du Chef du gouvernement “reconnaissant le mouvement citoyen comme force politique incontournable sur la scène nationale et la plate-forme d'El-Kseur, dans son esprit et sa portée, comme premier jalon pour la construction d'une société démocratique”, exige de la présidence de la République de rendre publique “un communiqué s'engageant à reconnaître solennellement la plate-forme d'El-Kseur”. Les animateurs de la contestation à Bouira n'omettent pas d'ajouter que “les structures du mouvement citoyen sont seules habilitées à prendre position sur les questions stratégiques”. Et celle relative au dialogue en est une. K. S. / L. O. / R. S.