Parce qu'ils supposent qu'ils n'y trouveront rien, les chercheurs algériens semblent bouder les Archives nationales. En revanche, leurs confrères étrangers sont de loin plus nombreux à s'adresser à cette institution. C'est ce qu'a regretté, en substance, le directeur des Archives nationales, M. Abdelmadjid Chikhi, qui a été invité, hier, au Forum de Radio culture. Ce dernier a donc profité de l'occasion pour leur lancer un appel. “J'invite les chercheurs et historiens algériens à puiser, plus souvent, dans les fonds des Archives nationales”, a-t-il exhorté. Avant d'ajouter : “Les Archives algériennes entretiennent de très bonnes relations avec les mêmes institutions à l'étranger de sorte que nous pouvons aider les chercheurs algériens à accéder à ces mémoires.” De même, il précisera que cette institution est ouverte à tous les publics. Son souhait, a-t-il indiqué, est de “provoquer une prise de conscience collective qui permettrait à la population de disposer du fonds des Archives nationales mais surtout, de l'enrichir”. À cet effet, M. Chikhi a émis le souhait de lancer une vaste opération d'enregistrement de la mémoire nationale qu'il a baptisée “le club de la mémoire”. Il explique que “ce club est destiné autant à accueillir des personnalités que des intervenants moins connus, pour peu qu'ils soient porteurs de mémoire”. Séduit par cette idée, le président de la République a débloqué une enveloppe financière permettant de réaliser ce projet, a-t-il fait savoir. Des comités d'archivage de la mémoire nationale ont même été installés au niveau de chaque wilaya afin de mener à bien cette tâche. “Même si cette institution n'existe que depuis 1988, nous disposons d'archives qui remontent aux XVe et XVIe siècles, et ce, sous tous supports confondus, répartis entre Alger, Oran et Constantine”, a-t-il indiqué avant de préciser que “la plus grande partie des archives dont nous disposons concerne la période de la colonisation, même si la France en détient encore une importante quantité”. À ce sujet, de nombreuses questions lui ont été posées, dont celle de savoir ce qui est entrepris pour tenter de rapatrier ce patrimoine. M. Chikhi a expliqué que même en tant que responsable des Archives nationales, il ne peut en discuter directement avec son homologue français. “À l'époque de la colonisation, la France s'était autoproclamée propriétaire des archives algériennes, mais depuis l'Indépendance, de nombreuses requêtes ont été formulées afin de les récupérer, du temps de Mitterrand déjà, et ces demandes sont toujours d'actualité, ceci relève de la diplomatie et de la politique extérieure adoptée par le pays, ce n'est pas de mon ressort (…) L'Algérie participe activement à de nombreux congrès internationaux traitant de cette problématique, elle préside même un groupe de travail sur la question de la collaboration internationale pour la mise à disposition des chercheurs des documents d'archives”, a-t-il développé. Mais au-delà du patrimoine historique national non répertorié, ce que regrette plus encore le directeur des Archives nationales, c'est qu'une grande partie de la mémoire algérienne se trouve à l'étranger, notamment en Italie, Espagne, Allemagne ou encore en Islande. Il citera des exemples étonnants tels que l'existence, dans les archives du Vatican, de correspondances entre le pape et les émirs maghrébins au sujet de la gestion des églises. Ou encore qu'un grand nombre de documents et de correspondances datant d'avant le XVe siècle, issus des Etats Rostomide et Hammadite, se trouvent dans ces pays. Amina Hadjiat