Le Président français vient de décider de protéger les grands groupes de l'Hexagone d'OPA hostiles, c'est-à-dire un ensemble de mesures pour éviter qu'elles ne tombent entre les mains de firmes étrangères. Le vent est ainsi au patriotisme économique. Jeudi 24 octobre 2007, le chef de l'Etat français a annoncé la création de ce que la presse de l'Hexagone s'est empressée d'appeler “fonds souverain”, tout en s'interrogeant à propos des ressources qui devraient alimenter ce fonds. Ce fonds d'intervention public est créé afin de venir en aide aux entreprises stratégiques, ayant besoin de fonds propres, et ce, quelle que soit la taille de l'entreprise, lit-on dans l'édition vendredi/samedi du quotidien économique La Tribune. Autre point d'importance, l'annonce faite le même jour de l'exonération, de 100%, de la taxe professionnelle pour tout investissement réalisé en France, jusqu'au 1er janvier 2010. Par ailleurs, il a été créé un poste de médiateur, destiné à aider les entreprises françaises bénéficiaires d'un crédit à y accéder. Cet argent accordé aux entreprises sera suivi, afin que l'opinion publique sache ce qu'il en est fait. Le problème de l'approvisionnement de ce fonds en ressources est en partie résolu par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui devrait soutenir les banques à concurrence de 5 milliards d'euros. Il s'agit, en fait, d'un prêt-relais accordé à la Société française de refinancement de l'économie (SFRE) qui bénéficie de la garantie de l'Etat français à hauteur de 320 milliards d'euros. Ce prêt doit être, en cas de besoin, suivi au bout d'une semaine d'un second prêt de 5 milliards d'euros. Sept banques (BNP Paribas, Banques Populaires, Caisses d'Epargne, Crédit Agricole, Crédit Mutuel, HSBC) pourront en bénéficier en échange de créances de bonne qualité. Signalons que la CDC détient 4% de la capitalisation boursière de la place de Paris, soit près de 60 milliards d'euros, avant la crise, perdant 57% au premier semestre 2008. Il faut signaler que la CDC a déjà déboursé 33,5 milliards d'euros pour financer l'économie française récemment. Il reste le problème le plus important à résoudre : où trouver l'argent pour le financer. La CDC n'éprouve nulle envie de se retrouver seule à le financer, comme c'est apparemment le cas pour l'instant. En l'absence d'un signal fort du législateur, elle n'a aucunement l'intention d'obéir au doigt et à l'œil à l'exécutif. Ce fonds stratégique d'investissement, comparé à un véritable fonds souverain, sans les ressources des pays du Golfe, de la Norvège, de la Russie ou de la Chine, devrait bénéficier aussi bien aux PME qu'aux groupes industriels. Le chef de l'Etat français incite même les autres chefs d'Etat européens à l'imiter en se dotant de tels fonds d'investissements. À noter que pas moins de 175 milliards d'euros d'investissements publics sont prévus pour les trois prochaines années en France. Dans une conjoncture qui frise la pleine déprime, avec des fleurons de l'industrie automobile française, qui mettent la clef sous le paillasson dans certains de leurs sites de production, à l'exemple de Renault, ce fonds semble le bienvenu, même s'il constitue un sérieux accroc à l'orthodoxie financière prêchée jusqu'ici. Or, la chute vertigineuse des valeurs françaises a dû sans doute pousser à la création de ce fonds afin d'éviter le pire. La crainte de faire face à des OPA hostiles, capables de mettre la main sur des valeurs en forte baisse, a mis la pression sur l'exécutif qui s'est fendu de cette initiative. Les fonds spéculatifs, les hedge funds, sont affaiblis par leurs pertes et ne constituent pas un danger réel, selon certains observateurs. Mais dans la mouscaille actuelle on ne pourrait être sûr de rien. Autre innovation en cours : l'AMF (Autorité des marchés financiers) compte durcir les conditions de participation au capital des entreprises françaises. Ainsi dès que le seuil de 25% à 30% de droits de vote est franchi, il sera fait obligation de lancer une OPA sur la totalité du capital. Toujours afin d'éviter les OPA hostiles, selon les concepteurs du projet. Des actions concertées qui semblent destinées à calmer les investisseurs français et le front social, tous deux inquiets, et à juste titre, à propos d'une crise financière qui est loin d'avoir révélé tous ses dessous. Djamel Zidane