La mise en œuvre de la “feuille de route”, devant aboutir à la création d'un Etat palestinien indépendant d'ici à 2005, a été lancée, hier, à l'occasion du sommet qui a réuni Abou Mazen et Sharon en présence de Bush et de Abdallah II de Jordanie. Les colons israéliens et Hamas n'ont pas tardé à annoncer leur opposition à l'opération. Mahmoud Abbas fut le premier à annoncer, lors de la cérémonie de clôture du sommet, la démilitarisation de l'Intifadha. Il prône désormais une lutte pacifique contre l'occupation. Selon lui, l'Autorité palestinienne “va déployer tous ses efforts et mettre en œuvre tous ses moyens pour mettre fin à la militarisation de l'Intifadha”. Abou Mazen, qui estime que le conflit israélo-palestinien ne peut être réglé par la force militaire, appelle le peuple palestinien à cesser l'Intifadha armée et à recourir “à des moyens pacifiques dans leur quête pour mettre fin à l'occupation”. En échange de cet appel à l'arrêt de la violence contre Israël, Sharon “appuie fermement” l'existence de deux Etats israélien et palestinien, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité. “Israël, comme d'autres, a exprimé son ferme appui à la vision du président Bush, exprimée le 24 juin 2002, de deux Etats, Israël et l'Etat palestinien”, a notamment déclaré Ariel Sharon. Il reconnaît “l'importance de la contiguïté territoriale en Cisjordanie pour un Etat palestinien viable”. Le chef du Likoud a ajouté : “Nous pouvons aussi assurer nos partenaires palestiniens que nous comprenons l'importance de la contiguïté territoriale en Cisjordanie pour un Etat palestinien viable.” Selon les experts, l'expression “contiguïté territoriale” utilisée par le Chef du gouvernement israélien suppose implicitement le démantèlement de certaines colonies, particulièrement celles qui sont les plus isolées. À la suite de ces déclarations, ce fut au tour de George Bush d'affirmer que “des progrès importants” ont été réalisés à Aqaba. Il a rappelé qu'il soutenait la création d'un Etat palestinien, tout en s'engageant à assurer la sécurité d'Israël. Le président américain a annoncé la création d'une mission de surveillance de l'application des étapes de la “feuille de route”, qui sera dirigée par l'ancien diplomate John Wolf. “Tous aujourd'hui partagent un but : la Terre Sainte doit être partagée entre un Etat de Palestine et un Etat d'Israël, en paix l'un avec l'autre et avec tous les pays du Proche-Orient”, a dit Bush avant de conclure : “Je sais que la paix peut finalement arriver.” Malheureusement, pour le locataire de la Maison-Blanche, ce qui a été conclu à Aqaba est rejeté par les extrémistes des deux côtés. La réaction du Hamas n'a pas tardé à tomber tel un couperet : “Le Hamas va se tenir aux cotés du peuple palestinien, avec les armes, et ne permettra à personne de renoncer à une partie de notre terre.” L'annonce a été faite par un des leaders du mouvement islamiste, Abdelaziz Al-Rantissi, qui a ajouté qu'il n'était pas question de déposer les armes. Le Jihad islamique lui a immédiatement emboîté le pas en affirmant qu'il “poursuivra sa lutte armée contre l'occupation israélienne aussi longtemps que celle-ci durera”. Ces réactions hostiles au processus de paix viennent remettre en cause l'assurance affichée par Mahmoud Abbas quant à la conclusion d'une trêve avec ces deux mouvements d'ici à trois semaines. Les colons israéliens ont eux aussi refusé d'accepter l'accord de Aqaba qu'ils considèrent d'après leur porte-parole comme “la reddition d'Israël face au terrorisme palestinien”. “Le sommet de Aqaba est une cérémonie humiliante où l'on fête la reddition d'Israël face au terrorisme palestinien”, indique le communiqué du Conseil des colons. Ces réactions négatives peuvent énormément nuire au plan de paix. Ariel Sharon et Mahmoud Abbas seront mis à rude épreuve dans leur mission de mise en œuvre de la “feuille de route” du quartette. K. A.