Sharon a finalement accepté la feuille de route américaine devant normaliser le conflit israélo-palestinien. Il l'a fait adopter par son gouvernement qui reflète fidèlement la Knessett, le Parlement israélien. Il a dû peser de tout son poids pour rallier, et son parti le Likoud, et ses franges extrémistes qui n'ont toujours pas fait le deuil du Grand Israël. Pour faire bonne figure, il a annoncé qu'il y met quelques réserves, notamment à propos du retour en Palestine de réfugiés palestiniens. Bush est pressé, il veut continuer son plan de normalisation en Irak et le réussir avant 2004 pour solliciter en toute quiétude un second mandat. La pax americana dans la région n'a, en effet, aucune chance de se réaliser si la question palestinienne reste pendante. Comme il s'est rendu également à l'évidence que l'ONU reste tout de même un passage obligé s'il ne veut pas se retrouver seul contre le reste du monde. Le président américain s'est d'autant plus résolu à forcer Sharon que la mise en œuvre de sa nouvelle carte du Moyen et Proche-Orient ne semble pas couler de source comme il l'avait appréhendé. En Irak, le centre de gravité du processus, les choses n'ont pas évolué comme l'avaient prédit ses conseillers ; les Chiites s'agitent bruyamment, les Kurdes exigent plus d'autonomie et les Sunnites menacent de verser dans le wahhabisme. Sans compter la recrudescence des attaques terroristes de l'islamisme radical qui s'est invité dans son sanctuaire d'origine : l'Arabie Saoudite. Sharon est persuadé que ses 14 réserves passeront comme une lettre à la poste. Il a fait dire que Bush l'aidera à convaincre Abou Mazen, le Chef du gouvernement palestinien quasiment désigné par la communauté internationale pour mettre hors course Hamas et le Djihad islamique, et réaliser le plan concocté par les Américains et soutenu par les Européens et la Russie. La fameuse feuille de route prévoit la création par étapes d'un Etat palestinien d'ici à 2005, à la condition qu'Abou Mazen stoppe les opérations kamikazes. Le Chef du gouvernement palestinien a rejeté pour sa part toute modification dans la feuille de route qu'il a acceptée dans son intégralité mais qu'il doit aussi mettre en œuvre. Seulement, contrairement à Sharon, Abou Mazen n'a personne sur qui s'appuyer. La guerre de l'Irak a mis hors course les pays arabes et, à leur tête, l'Arabie Saoudite qui n'est plus le partenaire stratégique des Etats-Unis. Pour essayer d'obtenir des concessions de la part des Palestiniens, Bush compte réunir autour de lui Sharon et Abou Mazen, juste après le sommet du G8 qui se tiendra à Evian en France, mais Abou Mazen n'a plus rien à céder puisque d'ores et déjà l'Etat de Palestine se présente comme une constellation de petites taches dans une surface réduite comme une peau de chagrin par des colonies juives qui ont déclaré ne pas plier bagages quel qu'en soit le prix. En réalité, tout dépend de Bush et de son rapport avec le lobby juif aux Etats-Unis. D. B.