La waâda de Sidi Tadjine en hommage au saint patron qui veille sur la ville est donc venue à point nommé pour briser ce tabou qui condamne la femme à rester coincée entre les quatre murs pour ne s'occuper qu'aux seules tâches ménagères. Aïn-El-Arba, une localité à vocation typiquement agricole située à une trentaine de kilomètres du chef-lieu de la wilaya de Aïn Temouchent vient de sortir de son isolement, le temps d'un événement traditionnel qui a disparu depuis le début des années 1990 dans une période marquée par la terreur. Cependant et ce, exceptionnellement pour cette année, cette journée a été doublement fêtée puisqu'elle coïncidait avec la célébration du 54e anniversaire de la révolution d'où le cachet particulier de cet événement culturel annuel. En effet, c'est dans une ambiance de kermesse et de réjouissances que s'est déroulée la waâda de Sidi Tadjine qui a drainé la grande foule venue de tous les coins de la région ouest. Jamais Aïn-El-Arba n'a connu une ambiance aussi colorée et aussi tumultueuse par le passé dans la mesure où cette année, les organisateurs ont voulu lui donner une empreinte particulière afin de faire renaître certaines valeurs humaines qui ont disparu avec la décennie noire. Ainsi, ce sont des dizaines de chevaux venues de toute la région de l'Oranie qui ont animé une fantasia alors que les cavaliers, regroupés en gafla, c'est-à-dire entre huit et dix cavaliers éperonaient leurs chevaux pour une démonstration au triple galop avant de lâcher leurs salves de baroud dans un parfait accord sanctionné pour la circonstance par une note attribuée par la commission installée à cet effet. D'après certains témoignages, la réussite de cet événement n'a été possible que grâce aux autorités concernées qui ont doté les organisateurs d'une bonne quantité de baroud, un produit essentiel mais aussi l'une des conditions exigées par les cavaliers pour leur participation. Ce rendez-vous était aussi une occasion pour les commerçants de sucreries et autres caprices pour les enfants d'étaler leurs produits. Non loin de l'esplanade où se déroulaient les cavalcades, le bruit incessant de baroud mélangé au brouhaha des discussions qui se sont poursuivies jusqu'à l'intérieur de la ville des visiteurs ont eu droit au halkate et autres contes populaires alors que d'autres ne se sont pas privés face aux différentes troupes folkloriques qui ont donné du ton à cette manifestation. Mais le plus intéressant dans tout cela, c'est cette hospitalité qui n'a pas changé d'un iota chez cette population malgré un pouvoir d'achat à l'usure. On en veut pour preuve, cette obligation faite au visiteur pour goûter au délicieux couscous préparé par les mains magiques des humbles femmes de fellahs. C'était aussi une occasion pour briser la torpeur et la morosité des nombreux jeunes dont l'équipe fanion de football qu'ils supportaient n'arrive toujours pas à gagner et ce, même à domicile où elle se faisait balayer par le premier venu. La localité a repris son calme juste à la tombée de la nuit. M. LARADJ