La conférence stratégique internationale s'est ouverte hier avec la participation de représentants de grands noms de l'industrie pétrolière et gazière en particulier Total et Statoil. Les données du marché pétrolier entre 2000 et 2007 étaient représentatives d'un marché normal où les fondamentaux jouaient un rôle important contrairement aux facteurs tels que la géopolitique et l'activité des spéculateurs. Les cours avoisinaient pendant cette période les 50 et 60 dollars le baril en moyenne. Ces deux derniers paramètres et la crise financière latente qui a commencé en août et septembre 2007, ont été, en revanche, à l'origine d'une hausse considérable des prix durant l'année 2008 atteignant les 147 dollars le baril. “À présent, nous sommes peut-être en train de revenir à cette moyenne, calculée entre 2000 et 2007”, a déclaré M. Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines. C'est à travers ces arguments que le ministre a développé la situation qui prévaut actuellement sur le marché international. “Mais notre objectif est d'arriver à une fourchette qui se situe entre 70 et 90 dollars le baril qui semble être le prix du coût marginal du nouveau développement, à savoir les projets tels que le sable bitumineux du Canada ou l'offshore profond du Brésil et les bruts lourds du Venezuela qui, à un prix de moins de 70 dollars le baril, ne seront jamais développés.” En termes plus clairs, les gros gisements ne seront pas exploités si les cours restent à 70 dollars. Même si l'objectif des 70 et 90 dollars ne serra pas atteint durant les quelques prochaines années, cette moyenne sera, selon Chakib Khelil, largement dépassée car, la production de ces gros et profonds projets ne sera pas réalisée. Plus clair encore, le ministre affirme que si les prix se maintiennent au-dessous des 70 dollars pendant les deux années à venir, le développement et l'exploitation de ces profonds investissements ne seront pas rentables et par conséquent, ils seraient peut-être retardés ou réajustés. Conséquences : on va vivre ce qui s'est produit en 1998 c'est-à-dire un affaissement des prix et perte de confiance dans l'investissement. Puis arrivera la période 2000-2007 où la demande qui a augmenté, a nécessité beaucoup d'efforts pour la couvrir. “On peut avoir ces jours-ci, des prix bas, mais cela ne veut pas dire que cette baisse va se poursuivre éternellement. Personne ne peut nous dire jusqu'à quand. Cependant, à partir des années 2011, 2012, nous prévoyons une hausse”, a indiqué le ministre en marge des travaux de la 4e semaine de l'énergie. Ce qui se déroule actuellement sur le marché, Chakib Khelil le compare à cette course entre les décisions de l'Opep et la baisse de la demande du brut. “La cible court plus vite que les décisions”, avoue-t-il. “On n'arrive pas à rattraper la cible derrière laquelle nous courons. Si on la rattrape, le rebond des prix sera important”, ironisera-t-il. La décision de baisser 1,5 million de barils/jour prise en octobre dernier, lors de la réunion de l'Opep à Vienne, ne peut être évaluée pour le moment. “On ne peut pas dire si elle est suffisante ou non”, dira le ministre. Réunion de l'Opep : pas de décisions de baisse de la production Car, la plupart des pays membres n'ont, soulignera le président en exercice de l'Opep, pas encore mis en application complètement la baisse de leurs quotas respectifs. “Nous le saurons dans un ou deux mois à travers notre seule source d'information qui sont les compagnies d'assurances. Mais, je pense que tout le monde a appliqué”, relèvera-t-il en précisant que les pays membres de l'Opep n'ont pas le choix. Soit aller vers une détérioration rapide des prix, c'est-à-dire ce qu'ils gagnent en volumes, ils le perdent rapidement en prix. La deuxième option a trait à l'application des quotas et les revenus seront ainsi maintenus à des niveaux acceptables. À ce propos, les autres membres de l'organisation ont été invités à la réunion de l'Opep (pays arabes exportateurs de pétrole) du 29 octobre. Il s'agit, selon le ministre, d'une rencontre de consultation. Il est de ce fait prévu un brainstorming qui donnera lieu à des recommandations pas nécessairement pour le jour même, mais peut-être pour la réunion d'Oran prévue pour le 17 décembre prochain. Le président en exercice de l'Opep évoque, par ailleurs, une incertitude sur la demande. Celle des Etats-Unis, par exemple, a baissé, selon certaines sources, de 2,4 millions de barils alors que d'autres parlent de plus de un million de barils. Pour le ministre, même l'offre a également augmenté aux USA. Les prix qui ont franchi le seuil des 140 dollars ont permis, en effet, à des gisements marginaux d'être développés. Sur un autre registre, le ministre de l'Energie a récusé les critiques apportés par des experts sur le prix du gaz pratiqués localement jugés trop bas par rapport à celui appliqué à l'international. “Il n'y a pas de débats de l'OMC sur le double prix du gaz. Ça, c'est une invention algérienne”, lancera le ministre qui reconnaît l'existence de ce double tarif, mais qui n'est pas posé par l'OMC. Cette organisation demande seulement de ne pas subventionner les prix. Les discussions avec l'UE pour la concrétisation de l'accord stratégique, indiquera Chakib Khelil, se poursuivent. Une délégation de deux expertes de l'UE viendra en Algérie pour approfondir ces discussions. Dans les prochaines semaines, le ministère va soumettre le projet de loi nucléaire aux instances concernées, notamment le Conseil des ministres… D'ci au début de l'année prochaine, l'Algérie sera dotée d'une loi sur l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. Ce texte a pour fondement la séparation du rôle concernant la sûreté et la sécurité nucléaire et celui purement commercial et de recherche. Par ailleurs, l'Algérie sera représentée par le ministre de l'Energie à la réunion du 23 décembre prochain à Moscou des pays producteurs et exportateurs de gaz. Le marché fera l'objet d'une analyse au cours de cette rencontre qui se veut en fait un forum d'échange d'expériences, des projets de partenariat… Il n'est pas question, dira Chakib Khelil, d'une Opep du gaz. Abordant, l'importance des énergies renouvelables, le ministre avouera qu'elles représentent une alternative pour l'après-pétrole en Algérie. Badreddine KHRIS