Le premier exercice du quinquennat communal vient d'être consommé ! Mostaganem n'est guère plus propre qu'auparavant. Ceux qui occupent une minuscule buanderie sur les toits des immeubles s'entassent dans des baraques de fortune insalubres ou se privent de sommeil chaque nuit pluvieuse et s'apprêtent à passer un énième hiver à l'étroit ou dans l'angoisse. Rues et ruelles sont davantage crevassées. L'oued Aïn Sefra est presque incapable d'évacuer les eaux pluviales et usées car obstrué par des tonnes d'ordures balancées par des riverains qui crient à l'incivisme. Un ras-le-bol quasi général latent d'une population juvénile usée par l'oisiveté et le chômage endémique qui demeure intact. Pas le moindre changement ne se profile ! Et Mostaganem reste une commune mal encadrée, qui “bouffe” la moitié presque de son budget annuel en charges salariales d'une pléthore d'employés. La plus rude bataille, celle des urnes, ayant été remportée, le reste de l'épreuve n'était qu'une simple “gestion” d'une routine héritée. Des comptes ? Peut-on en demander du moment qu'on n'a jamais exhibé le moindre plan d'action à mettre en œuvre pour meubler le quinquennat communal, mais surtout opérer le changement d'un quotidien profondément dégoûtant. Face à cet “imprévu” d'importance cardinale qui dispense l'instance élue d'un quelconque compte à rendre aux administrés, les attentes de la population étaient et sont par contre bien réelles. Dépouillés de compétence politique propre et réduits à de simples commis d'une administration sclérosée, les élus locaux se prêtent fidèlement à assumer les “ratés” et… récolter la colère d'une bonne partie de leurs concitoyens. “Rien ! Rien ! Et rien ! De quel changement osez-vous parler ?” À moins que vous ne mettiez la main sur un élu membre de l'exécutif de l'APC, ou un président d'association “béni” par l'auguste Assemblée, à l'instar de Tarik, à la quasi-unanimité, le commun des citoyens mostaganémois ne décèle le moindre changement dans la routine de sa commune. “Il faut toujours se bousculer pour prendre un taxi si l'on ne veut pas s'entasser dans le bus du transport urbain !”, affirme Tarik pour étayer son “niet” en matière de changement. Et de poursuivre dans ses critiques empreintes de réalisme : “Plus que jamais, le trottoir du centre-ville demeure toujours interdit au piéton qui doit disputer la chaussée aux voitures ! Le commerce informel est florissant et Mostaganem n'est guère plus propre qu'avant l'avènement de l'actuelle APC !” En sa qualité d'universitaire, Mansour, qui ne s'attendait nullement à un quelconque changement, va au-delà du constat simpliste. Il théorise : “La question ne relève pas de la compétence et de la capacité du P/APC à promouvoir le changement. L'inertie tient en des causes plus profondes inhérentes au système.” Réfutant toute vision pessimiste ou un quelconque parti pris, Mansour a de quoi argumenter sa désillusion de prétendre, encore moins d'attendre, qu'une APC opère le changement. Bien que les élections aient eu lieu le 29 novembre, ce n'est que cinq mois plus tard que Mostaganem voit son exécutif communal enfin installé. Un exécutif et un équilibre en réalité précaires pour tous les observateurs à l'écoute de ce qui se fait et défait dans les coulisses de l'Assemblée. La commune ne semblait pas prête à déroger à une règle désormais entrée dans les mœurs de l'autorité communale : l'instabilité de l'APC. Une brève rétrospective le démontre amplement. Depuis le recouvrement de l'indépendance du pays, Mostaganem est à son … 27e édile ; le 18e P/APC consacré par un scrutin ! Un record qu'aucune autre ville du pays n'a prétendu battre à ce jour et qui se met particulièrement en évidence quand on sait que durant l'époque coloniale, de 1848 à 1962, Mostaganem a, à peine “consommé” 21 maires. Au-delà d'une stabilité de façade, et malgré une certaine volonté chez nombre d'élus d'entrer enfin dans le vif du sujet, la nouvelle Assemblée reste sujette à certaine léthargie handicapante qui l'empêche d'opérer un quelconque redressement tant attendu. Fort heureusement, en la dessaisissant des plus importantes préoccupations du citoyen mostaganémois que sont l'emploi et le logement, l'administration l'a prémunie du courroux, voire du soulèvement, des administrés. Malgré cela, le commun des citoyens demeure éminemment sceptique quant à la capacité de son APC de se démarquer par rapport aux assemblées communales qui se sont succédé. En effet, il demeure qu'à l'intérieur des “maigres” prérogatives qui leur sont accordées, les élus n'ont pas encore brillé par une gestion innovante et imaginative des affaires de leurs localités. L'esprit d'initiative en est le grand absent. Ce ne sont sûrement pas les routinières réunions de l'APC qui prouveraient le contraire. Les commissions spécialisées de cette assemblée ne sont généralement pas instruites des grands dossiers. Les données techniques et statistiques leur échappant complètement, elles compensent ce déficit par des péroraisons et des procès d'intention qui ne font avancer en rien les choses. Cette première année du mandat quinquennal demeure, selon les observateurs au fait de la gestion de la collectivité, une précieuse perte de temps, mais également d'énergie et de fonds dans l'histoire de la ville, tant elle fut marquée par moult tentatives de destitutions, de croche-pieds et autres coalitions qui se font et défont au gré des humeurs et des compatibilités de circonstances. Pour de nombreux citoyens, “les élus ont, encore une fois, failli à leur mission”. Même les élus, toutes tendances partisanes confondues, qui siègent à l'hôtel de ville estiment qu'ils n'entrevoient pas encore de changement sur le terrain. Nourries par l'opportunisme à souhait de se voir un jour occuper le fauteuil de P/APC ou de vice-président, les critiques réciproques, acerbes et parfois gratuites, ainsi que les chamailleries perdurent. “C'est plutôt nous qui sommes très déçus par la population qui n'ose guère faire le moindre effort en matière de civisme !” réplique le P/APC à propos de ses appréhensions quant à cette première année consommée du mandat de son assemblée. Allusion faite aux ordures qui ont envahi la ville, il regrette que les campagnes de sensibilisation n'aient pas relevé le civisme citoyen. Aux yeux du premier magistrat de la ville, qui raisonne en fidèle commis de l'Etat, même s'il n'y a pas changement radical, il faut avouer qu'il y a eu une évolution positive, ne serait-ce que par l'identification des grands problèmes de la cité. Reste l'action qui requiert l'implication du citoyen. Au sujet du logement, le président de l'APC semble amplement soulagé du fait qu'une préoccupation aussi “explosive” ne soit plus “l'affaire de l'APC”. “De toutes façons, nous n'avons jamais rien promis à personne, pour qu'on nous demande des comptes aujourd'hui”, estime-t-il. En ayant l'aval de la tutelle, le P/APC ne semble aucunement ennuyé par les tiraillements intestins qui secouent en sourdine son assemblée. Du moment que la caravane marche, que les grands problèmes de Mostaganem soient identifiés et appréhendés, et que les affaires aillent bon train, l'essentiel est là. Que l'on ne parle pas encore de changement, cela importe peu. M. O. T.