Le Président, qui n'a pas eu le bain de foule habituel à Oran où les considérations sécuritaires, le froid et la pluie n'expliquent pas, à eux seuls, la défection des Oranais, devrait se rattraper à Ghardaïa, à moins que les sinistrés, mécontents des lenteurs constatées dans leur prise en charge, ne montent au créneau pour gâcher une fête promise par les autorités locales. Après Oran, le président Bouteflika est attendu ce mardi à Ghardaïa, pour une visite de deux jours. La venue de Bouteflika dans la vallée du M'zab était attendue depuis les inondations qui ont endeuillé la région le jour de l'Aïd el-Fitr (octobre dernier), faisant une trentaine de morts et d'importants dégâts matériels. S'il est vrai que le gouvernement, Ahmed Ouyahia en premier, s'est mobilisé particulièrement pour venir en aide aux populations sinistrées, il n'en demeure pas moins que la prise en charge des effets de la catastrophe naturelle a pris du retard et surtout que les leçons des précédentes catastrophes naturelles n'ont pas été tirées. La visite du président Bouteflika devrait parachever, de façon officielle, l'opération de prise en charge des familles sinistrées, à travers la réception des chalets construits pour les abriter de façon provisoire. La promesse faite par Ahmed Ouyahia de reloger tous les sinistrés avant la fin de l'année sera finalement tenue. Mais à quel prix ? Et pour quelle fin ? Là c'est une autre histoire. Car, selon les premiers éléments, les autorités locales ont mis le paquet, allant jusqu'à l'exagération, pour rendre ces chalets “habitables” et “présentables”, au point où le coût d'un chalet avoisine celui d'un logement en dur, faisant dire à bon nombre de sinistrés que l'argent gaspillé dans des chalets provisoires aurait pu être octroyé aux sinistrés pour reconstruire leurs maisons. Mais, au-delà des exagérations budgétaires, devenues monnaie courante dès lors que c'est l'Etat qui paye, il y a lieu de savoir si les enseignements des inondations d'octobre dernier ont été tirés. Les habitations et autres locaux édifiés sur le lit de l'oued seront-ils démolis ? Ou, tout bonnement, restaurés et réutilisés en attendant les prochaines crues ? Tout porte à croire que bon nombre d'édifices se trouvant en zones inondables vont être sauvegardés et qu'une fois la “tempête” passée, les responsables locaux reprendront les “bonnes vieilles habitudes”. C'est que, dans la wilaya de Ghardaïa, la pression sur le foncier est telle que l'on n'arrive pas à prévoir les futures extensions urbaines, laissant le soin à l'anarchie pour dicter ses lois aux responsables locaux. Mais, au-delà des questions strictement locales, la visite de Bouteflika à Ghardaïa devrait constituer un autre jalon dans sa précampagne électorale. Même si l'étape oranaise a été quelque peu perturbée par la pluie et le froid glacial, et surtout par la tenue de l'importante conférence ministérielle de l'Opep, l'on s'attend à ce que celle de Ghardaïa soit plus concentrée sur les problèmes de développement et de prise en charge des préoccupations de la population de cette région. Bouteflika, qui n'a pas eu le bain de foule habituel à Oran où les considérations sécuritaires, le froid et la pluie n'expliquent pas, à eux seuls, la défection des Oranais, devrait se rattraper à Ghardaïa, à moins que les sinistrés, mécontents des lenteurs constatées dans leur prise en charge, ne montent au créneau pour gâcher une fête promise par les autorités locales. Tout comme à Oran, le Président sortant aura à vérifier sa popularité auprès d'une population qui ne comprend toujours pas pourquoi elle s'est davantage paupérisée au moment où les responsables du pays se congratulaient de la bonne santé financière du pays. La tâche de vendre l'image d'un Président prêt à mettre la main dans les caisses de l'Etat à tout moment pour répondre aux besoins des populations s'avère ardue présentement, en raison de la chute brutale des cours de pétrole. Les rallonges accordées aux walis, à chaque visite présidentielle, ne semblent plus faire recette et Bouteflika le sait mieux que quiconque : rien ne sert de signer des chèques en blanc, notamment pour des autorités locales championnes dans l'art de lancer des programmes qu'elles ne mènent presque jamais au bout. La visite prévue dans la wilaya de Ghardaïa, même si elle comporte un parfum de campagne électorale, entre dans le cadre de la préparation de la vraie campagne. Bouteflika tâte le terrain, jauge sa popularité et les défis qui l'attendent et se réserve d'annoncer sa candidature, jusqu'à ce que son plan d'attaque soit mis au point. En attendant, il laisse le soin aux lièvres de faire l'animation d'une précampagne qui ne démarre toujours pas. Azzeddine Bensouiah