Trois mois après les inondations qui ont durement frappé la vallée du M'zab, faisant 43 morts et d'importants dégâts matériels, le président Bouteflika est arrivé pour constater que les promesses faites au lendemain de la catastrophe naturelle ont été tenues. La visite constitue, surtout, un moment fort dans la précampagne électorale pour la présidentielle de 2009. Un dispositif sécuritaire impressionnant a été déployé dans toute la région, pour prévenir tout risque. La région de Berriane, théâtre de tensions interethniques récurrentes, a été soigneusement évitée dans l'agenda présidentiel. Ce dernier s'est concentré sur la prise en charge des sinistrés. Les conditions climatiques étaient idoines pour le bain de foule. Mais ce dernier n'a pas drainé grand monde, par rapport aux années précédentes. Raisons sécuritaires ou signe d'un mécontentement de la population ? Difficile d'y répondre. En revanche, l'étape mozabite de la tournée du président Bouteflika aura été surtout marquée par l'entrée en lice officielle de l'administration dans la campagne pour le troisième mandat. En effet, des statuettes symbolisant le troisième mandat, des pancartes et des affiches ont été placées un peu partout sur le parcours présidentiel, y compris dans l'enceinte de la wilaya, pour soutenir cette “cause”. Mais, contrairement aux sorties précédentes du chef de l'Etat, où il distribuait des rallonges budgétaires, la wilaya de Ghardaïa aura été une exception, non seulement parce que cette dernière ne bénéficiera pas d'un programme supplémentaire, comme ce fut le cas récemment avec Oran, par exemple, mais en plus, le président Bouteflika est venu refroidir les ardeurs de ses proches collaborateurs, Ahmed Ouyahia en premier, au sujet des répercussions de la crise financière internationale. “Nous sommes en face d'une crise mondiale. Nous avons traversé une période d'opulence. Nous allons traverser une période de vaches maigres que nous devons gérer avec prudence.” Et d'appeler les Algériens à “retrousser leurs manches” en arguant que, pour construire le pays, “ce n'est pas une affaire de Président ou de gouvernement”. Une affirmation que le ministre de l'Intérieur tentera, lors de sa conférence de presse, d'expliciter en avançant que “nous pouvons assurer le financement du programme quinquennal présenté par le Chef du gouvernement. Ce qu'a voulu dire le président de la République, c'est que la disponibilité des ressources financières ne doit pas nous faire oublier que nous avons eu une vie facile. Il faudrait apprendre à être plus productif et moins gaspilleur”. La sortie, non programmée, du président Bouteflika devant les notables de Ghardaïa, qui venaient de l'appeler à briguer un troisième mandat présidentiel, annonce une plus grande rigueur dans la gestion des dépenses publiques. Sur le terrain, le Président a procédé à la distribution symbolique des clefs des chalets pour une dizaine de sinistrés, en attendant que tous les sites devant abriter plus de 6 000 chalets soient entièrement réalisés. Ce relogement provisoire devrait mettre fin aux souffrances des familles se trouvant encore dans des centres de transit. Pour les logements en dur, 691 logements sont en cours de réalisation et 2 000 autres devraient être livrés d'ici à la fin de 2009. En posant la première pierre pour le chantier de construction de 1 300 logements sociaux dans la région de Oued Nchou (20 kilomètres du centre-ville), le président Bouteflika a donné des instructions aux responsables du projet pour le respect de l'architecture ancestrale de la région et a menacé de démolir toute construction ne s'y conformant pas. Il a également insisté sur la prise en charge dans tous les projets futurs des risques des inondations. C'est d'ailleurs dans cette optique que le plan d'urgence, décidé pour venir au secours de la wilaya, a consacré, pour l'année 2009, une enveloppe de 5 milliards de dinars pour la démolition et le déplacement des habitations situées en zones inondables, ainsi qu'à la construction de protections de berges des oueds. En tout, l'Etat a dégagé 40 milliards de dinars pour prendre en charge les conséquences des inondations de Ghardaïa. Le Conseil des ministres avait, au lendemain du drame, décidé d'une enveloppe de 20 milliards de dinars, avant que cette dernière ne soit portée à 40 milliards. C'est presque l'équivalent de la moitié du budget d'équipement de la wilaya durant la période allant de 1999 à 2008 (99 milliards de dinars). Le ministre de l'Intérieur a tenu à rassurer les familles sinistrées : “Nous avons plus de capacités en chalets que de sinistrés, sans compter les logements sociaux en cours de réalisation.” Il a affirmé qu'il était indispensable de mettre en application l'interdiction de construction en zones inondables et l'engagement d'un travail de fond pour l'étude de gestion des zones inondables. A. B.