“L'Etat nous a abandonnés à notre sort. Après la douloureuse séparation de nos familles de Sidi Mérouane, nous sommes devenus comme des orphelins. Plus de commerce ni de contacts fréquents avec les nôtres. Mais nous continuerons à compter sur la volonté et la compréhension du président de la République pour nous sortir de cette situation.” La commune de Chigara, située au nord-ouest de Mila, ne sera pas reliée par un pont à son chef-lieu de daïra, Sidi Merouane en l'occurrence. C'est ce qu'a indiqué, tout récemment, le directeur des Travaux publics de Mila, mettant ainsi fin aux espoirs des populations locales et aux spéculations persistantes qui défraient la chronique depuis belle lurette. Relevant de Sidi Merouane depuis pratiquement la fin du XIXe siècle (1886), l'agglomération de Chigara a été séparée de son chef-lieu, en septembre 2003, après que le viaduc qui les reliait eut disparu sous les eaux du barrage de Béni Haroun. Et depuis, les populations locales n'ont cessé de revendiquer le rétablissement de la liaison terrestre entre elles par un viaduc sur Oued Endja, affluent de Béni Haroun. La question déchaîne les passions depuis, faisant l'objet d'exploitations politiciennes aux derniers rendez-vous électoraux et de déclarations officielles, ô combien nombreuses et prometteuses ! Mais, finalement, contre toute attente, la DTP brandit l'argument du coût, celui des techniques sophistiquées que réclamerait l'édification d'un tel ouvrage d'art et celui de la rentabilité, faisant fi de toute autre considération économique, sociale et culturelle. “Le viaduc réclamé reviendrait très cher”, dira le DTP. Il coûterait, selon une étude réalisée par SAITA, un bureau d'études national, près de 6,5 milliards de DA. Ensuite, on serait obligé de recourir aux compétences étrangères spécialisées dans la réalisation des ponts suspendus d'envergure, car il aurait une travée centrale d'environ 400 m.Enfin, sur le plan de la rentabilité, on ne pense pas qu'il soit d'un quelconque intérêt, laisse entendre certains responsables locaux. Or, les populations concernées, 43 000 âmes dans les deux communes au dernier recensement, n'entendent pas la chose de cette oreille, elles qui sont désormais contraintes à faire près de 40 kilomètres pour se rendre dans l'une ou l'autre localité au lieu de 7 kilomètres avant l'avènement du barrage, en traversant les localités de Hammam Béni Haroun, d'Annouche Ali et de Grarem avant d'atterrir à destination. Surtout que les populations des deux communes, issues d'une même tribu, à savoir celle de Zouagha arrivée dans la région vers l'an 1 500, selon l'historien Yahia Bouaziz, entretenaient des relations familiales et commerciales particulièrement importantes. Aussi ne jurent-elles que par le retour à la normale, considérant la situation actuelle comme inacceptable, voire contre nature. “L'Etat nous a abandonnés à notre sort. Après la douloureuse séparation de nos familles de Sidi Mérouane, nous sommes devenus comme des orphelins. Plus de commerce, ni de contacts fréquents avec les nôtres. Mais nous continuerons à compter sur la volonté et la compréhension du président de la République pour nous sortir de cette situation”, nous dira un élu de la commune de Chigara.. K. Bouabdellah