L'Algérie n'est pas un “gros” pays importateur de pesticides du fait qu'elle ne pratique pas une agriculture intensive à grande échelle, soit. Toutefois, même à faibles doses, la méconnaissance dans l'usage aidant, les pesticides polluent. Ils polluent, l'air, les sols, l'eau et, par voie de conséquence, notre nourriture. D'où l'inquiétude des spécialistes. Cette inquiétude est d'autant plus fondée que le dossier des pesticides est un dossier sensible à plus d'un titre. Et quand il est abordé, les incertitudes fusent du fait que les données y afférentes sont quasiment inexistantes. Le manque de statistiques, l'inexistence de chiffres et le peu d'études consacrées rebutent les chercheurs. Ces derniers déplorent de surcroît le fait que les douanes ne publient même plus la liste des produits importés. Dans ces conditions il faut avouer qu'il est bien difficile de faire une juste appréciation de la situation. Néanmoins, les informations glanées sur le terrain, quelque dix ans plus tôt, permettent aujourd'hui aux spécialistes d'établir un état des lieux exclusivement technique qui se veut malheureusement alarmiste. Si l'Algérie, comme cité plus haut, est loin d'être considéré comme un pays importateur et consommateur de pesticides surtout du fait que ces produits synthétiques et “pointus” coûtent cher – l'Algérie importe essentiellement les insecticides puis viennent les fongicides et les herbicides – l'usage abusif et aléatoire de ces derniers n'aura pas été sans conséquences. “Il y a mauvais usage. Dans leur imagination, les agriculteurs pour produire plus, consomment de plusen plus. C'est de cette façon que se fait la contamination des eaux,… certains ne prennent aucune précaution et procèdent souvent au mélange des substances alors que la nouvelle génération de pesticides qu'il s'agisse des herbicides, des fongicides ou des insecticides est très pointue et cible tantôt la plante nuisible, tantôt le champignon ou encore l'insecte destructeur”, souligne un chercheur. Et d'ajouter : “Les pesticides se dégradent dans le sol. Mais ce n'est pas le cas de tous. Certains, en se dégradant soit sous l'effet de la chaleur, par hydrolyse ou microbiologiquement produisent des substances encore plus toxiques !” C'est à partir de là que tout se complique. Les interactions sont dangereuses et surtout difficilement gérables. Du fait que la plupart des pesticides sont importés – il existe en Algérie des producteurs comme Moubydal... – le risque reste lié aux produits importés qui ne répondent pas toujours aux normes. “Car si l'Europe en général, et la France en particulier, a une réglementation drastique quant à l'utilisation sur son sol de certaines substances dangereuses, ça ne l'empêche pas de nous les envoyer avec des étiquetages sommaires qui n'évoquent rien lors d'un contrôle de visu. Néanmoins, depuis quelque temps déjà, certaines molécules importées sont soumises à études au sein du laboratoire d'analyses pour les homologations”, précise notre source. Pour mieux cerner le danger, il est important de rappeler l'épisode de la DTT aujourd'hui interdite d'utilisation chez nous et partout dans le monde par le Protocole de Stockholm – c'est aussi le cas du Lindane (un organochloré à l'origine de problèmes dermiques, respiratoires et génétiques). La DTT fait, en effet, partie des organochlorés qui constituent les substances les plus dangereuses dont les effets ne se font pas ressentir dans l'immédiat mais bien des années plus tard. Les pesticides à base de mercure eux affectent, par ailleurs, le cerveau. Dans ce sillage, l'on se remémore l'affaire de la DTT périmée que l'Etat avait importée pour lutter contre les criquets devant être à l'origine exportée et dont l'entreposage aléatoire a été à l'origine de l'intoxication de certains agriculteurs. Aujourd'hui, cela s'impose expliquent les spécialistes, l'Algérie doit mettre en œuvre des mesures pour prévenir les dangers liés aux pesticides et veiller à l'application des textes règlementaires surtout ceux liés au contrôle. Pourtant – les chercheurs sont formels – il existe bel et bien des résidus dans les sols et dans l'eau. L'option de la lutte intégrée impliquant plusieurs paramètres dont la lutte biologique (l'utilisation des biopesticides, la lutte autocide par radiation et par les parasitoïdes également appelée prédation), en vue de réduire la consommation des pesticides est en outre, la solution “durable” retenue. Nahla Rif