La toute dernière décision du groupe Canal+, plus de huit ans après son repli, de reconquérir le ciel maghrébin, l'Algérie en tête, est diversement commentée par les spécialistes de l'audiovisuel. Alors qu'on l'attendait en Espagne, c'est finalement au Maghreb — 45 millions de francophones — que le groupe français tentera une première percée, via le satellite Arabsat. L'Algérie étant le premier pays à être desservi. Canal+ était jusqu'ici reçu au Maghreb mais sous une forme pirate, via le signal TPS. Ce faisceau a été interrompu le 31 décembre dernier de manière à préparer le terrain à une offre payante. Le prix de l'abonnement a été fixé à 20 euros par mois pour un bouquet de 27 chaînes, dont certaines très demandées par le téléspectateur national, à l'image de France 2, France 3, I Télé, LCI ou encore Planète et Télétoon pour les plus jeunes, et avant même son lancement algérien, Canal+ revendique plus de 20 000 cartes déjà écoulées. Cette offre, lancée à travers un distributeur exclusif, Stream System, sera effective à partir de février, apprend-on auprès du show-room d'Oran. La question que beaucoup se posent concerne l'avenir du piratage des chaînes françaises. De l'avis de certains “spécialistes”, le piratage a toujours de beaux restes devant lui si on se réfère au prix de l'abonnement mensuel. “20 euros, c'est presque 200 000, rasse ferrasse, et c'est beaucoup”, fera remarquer Taher, propriétaire d'une petite boutique dédiée au flashage des démodulateurs. Malgré les nombreuses mesures prises par les bouquets satellitaires français, les Algériens ont toujours trouvé la parade pour, soit faire sauter les verrous des systèmes de protection, soit les contourner, et leur dernière trouvaille est le sharing. Ainsi, et après la belle mort des décodeurs numériques pirates Starsat qui permettaient un libre accès au bouquet TPS, de Cyfra et des chaînes Art Arabesques entre autres, avec l'arrivée des cartes Abracadabra, le temps est au Sharing ou le partage via Internet. Cette formule, qui permet un libre accès aux chaînes payantes, fait fureur parmi certains initiés et certains branchés. Le système, qui n'est encore qu'à ses premiers balbutiements, repose sur une connexion Internet, l'installation de trois logiciels informatiques, facilement téléchargeables, et se faire accepter dans un salon de Sharer. Une fois ces conditions réunies, il suffit de se faire admettre dans un salon, ce qui est aisé, et de connecter son démo via un des ports USB de son micro pour s'offrir une véritable évasion sans limites. Les bouquets de Canal Satellite (français, allemand, hollandais, italien, polonais entre autres), TPS, le bouquet espagnol Tequilla, le bouquet hollandais Netmed et même Sky Italie sont accessibles à l'œil. Cette nouvelle technique pourrait clairement concurrencer l'offre de Canal+ qui, outre son tarif “élevé”, est jugé trop limité de par les chaînes qu'il offre. Saïd Oussad