Le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden, a été la vedette incontestable de la conférence sur la sécurité organisée samedi à Munich, en Allemagne. Il n'a pas déçu les partenaires européens et de l'OTAN et a signé le grand retour de son pays dans la diplomatie internationale. “Je suis venu en Europe au nom de la nouvelle administration de mon pays, déterminée à changer de ton non seulement à Washington mais aussi dans ses relations avec le monde”, a-t-il dit d'emblée avant de préciser que l'Amérique a besoin du monde et inversement. L'administration de Barack Obama privilégiera la concertation soutenue avec ses partenaires, a-t-il affirmé. En contrepartie, il ne cache pas à ces mêmes partenaires qu'ils seront davantage sollicités et que des efforts supplémentaires leur seront demandés, notamment pour assurer une présence plus conséquente en Afghanistan. L'Afghanistan est, en effet, une priorité pour Washington et sa nouvelle administration, qui a identifié ce pays comme le centre névralgique de la nébuleuse terroriste Al Qaïda. Ayant déjà programmé l'envoi de trente mille soldats supplémentaires pour neutraliser la rébellion des talibans, les Etats-Unis demandent à la France et à l'Allemagne en particulier de fournir un effort conséquent dans le même sens. Une rencontre était d'ailleurs prévue avec le président afghan au cours de la matinée d'hier. L'Iran constitue le deuxième dossier sur lequel s'est exprimé le vice-président américain. Il a une nouvelle fois prôné le dialogue avec les autorités de Téhéran, mais non sans faire preuve de fermeté. S'adressant aux dirigeants iraniens, il leur dira : si vous renoncez à l'acquisition de l'arme nucléaire et si vous cessez de soutenir le terrorisme, vous trouverez aide et assistance auprès de nous ; dans le cas contraire, nous saurons réagir. Lui emboîtant le pas, la chancelière allemande a fait preuve de plus de fermeté encore, de même que le président français, qui a qualifié la récente mise en orbite d'un satellite par les Iraniens d'“extrêmement mauvaise nouvelle”. Les relations avec la Russie, qui se sont dégradées au cours des dernières années, sont le troisième volet important développé par Jo Biden. Là aussi, prônant le dialogue et la coopération, il n'en fait pas moins preuve de fermeté et a évoqué à demi-mot les évènements de Géorgie, pays avec lequel une discussion est prévue à Munich à travers un de ses hauts responsables. Au-delà du discours conciliant, en rupture complète avec l'attitude américaine de l'ère Bush, une image hautement symbolique a été saisie par les caméras de télévision. Il s'agit de Jo Biden se congratulant avec Henry Kissinger. Quand on sait que ce dernier a été l'initiateur de la politique de détente au moment de la guerre froide, on mesure la portée du message que véhicule cette scène furtive. Par contre, concernant le bouclier antimissile dont l'installation est prévue en Pologne, le vice-président américain affirme qu'il n'est pas remis en cause, sauf coût trop élevé. En réalité, cet important sujet de controverse avec la Russie pourrait être une monnaie d'échange dans le cadre de négociations futures. En effet, les responsables américains savent que la coopération des Russes pour empêcher l'Iran de se doter de l'armement nucléaire est fondamentale. De même que l'utilisation de territoires sous contrôle russe est nécessaire pour l'acheminement rapide de matériels en Afghanistan. Le président Sarkozy l'a d'ailleurs dit explicitement et a proposé, pour sa part, la création d'un espace de coopération européen incluant la Russie. Il faut dire que l'Union européenne, au-delà du dossier sécuritaire, est également intéressée par sa sécurité énergétique. Or la Russie est au centre de la problématique comme l'a rappelé très fortement la dernière crise gazière, qui a opposé ce pays à son voisin, l'Ukraine, et qui a lourdement sanctionné les clients européens. Sous l'impulsion de son premier président noir, l'Amérique a donc résolument changé de cap et promet même d'être à l'avant-garde dans l'engagement écologique et la préservation de la planète. Jusqu'à quel point cette politique trouvera application sur le terrain et quelle en sera l'efficacité ? Nul ne le sait encore. Il n'en demeure pas moins que les espoirs sont permis et que, de toute manière, cela ne peut être pire que ces dernières années. M. A. Boumendil