Le souvenir des 102 victimes du crash du Boeing d'Air Algérie survenu le 6 mars 2003 demeure enfoui dans chaque grain de sable de l'aéroport de Tamanrasset. La capitale de l'Ahaggar restera à jamais témoin de ce terrible drame qui a endeuillé des centaines de familles en les privant des êtres chers n'épargnant en ce jour fatidique qu'une seule personne dont nulle information n'est fournie. Six ans après, la compagnie nationale Air Algérie a tenu à honorer la mémoire des victimes, mais surtout exprimer son soutien aux familles en les invitant sur les lieux a partager ensemble un moment d'émotion. Ils étaient tous là bravant l'insurmontable crainte d'emprunter ce chemin qui a été fatal aux leurs. Le voyage ne sera pas paisible et les conditions météorologiques n'ont fait que rajouter de la crainte au souvenir douloureux et rappeler, encore une fois, cette sensation bizarre d'être suspendus ainsi dans les airs. Aussi bien pour les passagers que pour l'équipage, chaque vol est un risque en soi et le 6826 a été fatal aux 102 victimes du crash de Tamanrasset. Une stèle est érigée en leur mémoire et les retrouvailles en ces lieux sont une sorte d'exorcisme. Point de lamentations, mais juste des larmes qu'on ne retient pas. Une douleur incommensurable qui ne s'atténue point. Mais de la retenue, beaucoup de dignité exprimée dans chaque regard, chaque trait tiré de ces visages tendus. De ces enfants privés de l'amour et l'attention d'une mère ou d'un père. De cette maman foudroyée par la perte de sa fille fauchée par la mort à la fleur de l'âge. De cette femme vivant du souvenir de ce mari aimant qu'elle pleurera à tout jamais ou encore ce mari dont le souvenir de l'épouse n'a jamais été aussi présent et le demeurera comme le témoigne ce bout de papier découpé dans un journal qu'il tirera de son portefeuille. C'est l'image de l'appareil crashé, coupé en deux qu'il montre à qui veut bien le voir. “Je ne réalise toujours pas ce qui s'est passé”, lancera-t-il dans un murmure comme s'il chuchotait cela à lui-même. Ce sont les familles du pilote Bouicha, la copilote Youcefi, Raissi, Kaced de l'équipage PNC et tous les autres passagers dont l'anonymat n'enlève en rien de la douleur ressentie. Elle est la même, celle de la perte de l'être cher. Les fleurs ramenées d'Alger sont déposées au pied de la stèle après la récitation de la Fatiha lors d'un moment de recueillement durant lequel l'émotion atteint son paroxysme. Loin des rencontres protocolaires de grande envergure, l'événement est simple mais ô combien grand en symbolique. Les larmes coulent sur les joues des uns et des autres dans un silence religieux. Le respect des morts y va de cette pensée sacrée que chacun développe à sa manière envers cet être perdu à jamais. “C'est la volonté de Dieu et personne n'y peut rien” tente de se convaincre chacun de nous car la vie continue malgré tout, peut-être pas de la même manière mais elle se poursuit quand même… Les Benmessaoud de Tamanrasset qui ont perdu 14 membres de leur famille, des jeunes sportifs de l'équipe de football nous donnent, en ce sens, une grande leçon de courage et de dignité. N. S.