La déclaration du ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, affirmant tolérer les partisans du boycott du scrutin présidentiel pour activer sur le terrain, n'a pas laissé sans réaction le parti de Hocine Aït Ahmed. “Le FFS est libre de s'exprimer s'il trouve auditoire”, a, en effet, déclaré Noureddine Yazid Zerhouni, qui s'exprimait à l'occasion d'une conférence de presse animée, mardi, à Alger. M. Zerhouni a laissé entendre, en outre, que même en Kabylie, où les deux partis qui ont appelé au boycottage de la présidentielle du 9 avril prochain sont bien implantés, “il y a une activité favorable à la participation lors du prochain scrutin”, précisant au passage qu'il n'y a pas eu, pourtant, de campagne spécifique dans cette région en faveur du vote. Contacté par nos soins, le premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS) affirme que son parti n'attend pas le signal de Zerhouni pour activer et occuper le terrain. “Nous sommes un parti légal, nous faisons notre activité dans la légalité, ce n'est pas à Zerhouni de nous autoriser”, estime Karim Tabbou. Avant d'ajouter : “Notre travail se fait avec la population, il se fait à la base”. “Ce que nous faisons ne tient pas compte de l'humeur de Zerhouni”, peste le responsable du FFS. Interrogé sur la manière avec laquelle son parti compte mener sa campagne anti-vote, M. Tabbou dira que le FFS exploitera tous les espaces possibles. “Comme on a l'habitude de le faire en pareille circonstance, nous allons demander des salles pour abriter nos meetings. Si nous n'avons pas accès aux salles et autres espaces, nous allons le faire dans la rue avec les citoyens”, explique notre interlocuteur. Selon les dires de celui-ci, le FFS battra campagne au double plan national et international. “Notre campagne en faveur du boycott, nous la mènerons à l'échelle nationale, mais aussi au niveau international”, nous informe-t-il. Ajoutant : “Il y a des actions qui sont prévues en termes de contacts avec les partis frères, des amis”. “Nous allons saisir nombre d'instances internationales pour les informer de la situation politique qui prévaut en Algérie. Une situation d'infra-politique loin de toutes normes démocratiques”, regrette-t-il par ailleurs. C'est la première fois que le gouvernement tolère, c'est le cas de le dire, les boycotteurs de l'échéance électorale d'occuper le terrain et battre campagne. Pourtant, dans une récente déclaration, le même ministre de l'Intérieur menaçait d'empêcher les partisans du boycott de mener leur campagne anti-vote. La souplesse du ministre de l'Intérieur à l'égard des adversaires du scrutin présidentiel constitue une manière, observent des analystes, de soigner l'image visiblement écorchée du pouvoir, accusé par une bonne partie de la classe politique, qui a tourné le dos au scrutin présidentiel depuis notamment le coup de force du 12 novembre, d'avoir verrouillé aussi bien le champ politique que médiatique. Si les partis qui appellent au boycott de la présidentielle peuvent maintenant mener aisément leur campagne pour disqualifier “la mascarade du 9 avril”, dixit Tabbou, pourquoi les médias lourds, la télévision notamment, ne sont pas autorisés à répercuter le message des boycotteurs. “Rien que pour soigner l'image du pouvoir”, ironise-t-on au FFS. Yahia Arkat