Ils refusent de servir de “monnaie d'échange” entre les syndicalistes, le ministère de la santé et celui de l'enseignement supérieur. Le spectre de l'année blanche ronge les étudiants de sciences médicales, qui commencent à s'organiser et qui ont observé, hier, un sit-in devant le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Face à la détermination des hospitalo-universitaires qui observent une grève pédagogique depuis le mois de janvier dernier, un mouvement qu'ils viennent de relancer, la crainte des étudiants grandit de jour en jour. Et pour cause, le boycott des examens qui dure depuis les premiers EMD. Que cela soit à Alger ou dans d'autres villes, les professeurs, docents et maîtres assistants en sciences médicales refusent d'évaluer les étudiants tant qu'il n'y aura aucune réaction de la part des deux ministères de tutelle. Cette situation, qui prévaut dans plusieurs facultés des sciences médicales, demeure jusqu'à aujourd'hui perturbée ; plus de travaux dirigés, de travaux pratiques de graduation et de postgraduation, d'examens de graduation, les jurys du DEMS, de maîtrise, d'assistanat, de docentat. Malgré cela, les étudiants des sciences médicales adhèrent au mouvement de leurs aînés et estiment que leurs revendications sont légitimes. D'ailleurs, c'est au nom de cette adhésion qu'une centaine d'étudiants ont envahi, hier, le siège du ministère de l'Enseignement supérieur. “Nous comprenons leurs revendications socioprofessionnelles, c'est dur de travailler dans des laboratoires sans réactifs et dans des hôpitaux dépourvus de matériel de soins. Les syndicalistes se battent pour notre avenir, mais nous refusons d'être utilisés comme monnaie d'échange entre les deux antagonistes”, s'indigne Amel B., étudiante en pharmacie à la faculté d'Alger. Banderoles à la main, assis par terre, les futures blouses blanches ont crié leur désarroi toute la matinée d'hier. “Une solution pour une formation de qualité… Nous ne voulons pas payer le prix d'un conflit”, peut-on lire sur leurs banderoles. Postés devant le département de Harraoubia, ces jeunes ont tenté durant deux bonnes heures d'organiser leur mouvement de protestation et de se faire entendre par un responsable. Finalement, une délégation composée de cinq étudiants en sciences médicales a été reçue par le secrétaire général du ministère de l'Enseignement supérieur. Leurs revendications : l'ouverture d'un dialogue avec les syndicats des professeurs, docents et maîtres assistants ; l'installation d'une cellule de crise composée de syndicalistes, d'étudiants, de responsables des deux tutelles, à savoir la santé et l'enseignement supérieur, et l'organisation du planning des examens. Au bout de deux heures d'attente sous un soleil de plomb, les étudiants accueillent leurs délégués sortis des négociations. “Nous sommes déçus de la réaction du ministère de l'Enseignement supérieur qui se dit non concerné par le problème des syndicalistes, car ce conflit dépend entièrement du ministère de la Santé. Les deux tutelles se renvoient la balle”, a déclaré Mlle Bia Racha, déléguée des étudiants de 2e, 3e et 4e années pharmacie de la faculté d'Alger. À en croire les étudiants négociateurs, la proposition de l'installation de la cellule de crise a été refusée par le représentant du département de l'Enseignement supérieur. S'agissant de la troisième proposition, le SG du ministère a promis d'établir un planning d'examens, menaçant les hospitalo-universitaires de sévères sanctions s'ils refusent de s'exécuter. “Nous sommes dans un dialogue de sourds. Alors que nous cherchons le dialogue, la tutelle use de menaces”, a déploré Amel. Par ailleurs, les étudiants menacent de radicaliser leur action, quitte à se rassembler devant le ministère de la Santé si rien ne se fait d'ici le début de l'été. “Nous sommes inquiets ! C'est difficile de rester dans le doute. Nous avons déjà raté plusieurs examens et nous nous demandons comment nous allons rattraper ces épreuves avant le 10 juin, car d'ici là, toute les universités doivent être vidées pour le Festival panafricain”, se désolent-ils. Nabila Afroun