Conçue à l'origine pour accueillir tout au plus une population ne dépassant pas une quinzaine de milliers d'âmes, Maghnia est une ville qui étouffe sous le poids de l'explosion démographique qu'à connue cette région durant les deux dernières décennies et qui fait multiplier ce nombre par dix pour atteindre, aujourd'hui, une population de plus de 150 000 habitants à laquelle viennent s'agglutiner régulièrement des milliers de transitaires en provenance des daïras et des wilayas avoisinnantes qui ne desserrent l'étreinte sur la ville qu'à la tombée de la nuit. Ce phénomène de démographie galopante ne s'est, malheureusement, pas fait accompagner du développement structurel escompté, avons-nous pu constater au terme de notre virée à travers la daïra. En effet, la ville de Maghnia héberge des milliers de saisonniers qui se sont sédentarisés et qui peuplent aujourd'hui les cités-dortoirs et les bidonvilles érigés tout au long de ces vingt dernières années. Ceux-ci s'adonnent à toutes sortes de métiers, y compris la contrebande et autres activités prohibées pour subvenir aux besoins de leurs familles. Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui se sont reconvertis dans la fabrication du pain artisanal ou bien dans la vente à la sauvette de fruits et légumes pour pouvoir subsister. L'anarchie qui règne constamment sur la ville a plongé cette dernière au centre d'un véritable marasme économique, social et culturel. L'activité économique devant légitimer un type de comportement aussi stressant ne se trouve qu'à l'état embryonnaire à Maghnia où les unités de production, qui pourraient à la limite justifier cet encombrement ambiant, se comptent aujourd'hui sur les doigts d'une seule main. En matière de circulation routière, des membres de la société civile de la ville sont catégoriques. Journellement, disent-ils, des milliers de véhicules, tous types et tous poids confondus, sillonnent continuellement dans une anarchie et un cafouillage indescriptible de long en large la ville meurtrie par ces allées et venues. Même les camions de gros tonnage empruntent les rues de la ville truffées de nids-de- poule et ce, faute d'un plan de circulation adéquat qui n'existe malheureusement qu'en théorie. Les embouteillages, autrefois inconnus à Maghnia, sont devenus aujourd'hui une réalité flagrante et contraignante pour ne pas être remarquée. Une démultiplication des goulots d'étranglement à hauteur du boulevard Khemisti et du pont menant vers l'hôpital, à proximité duquel se situent deux lycées et un centre de formation professionnelle, ou encore au niveau de la route de Tlemcen, qui traverse en longueur le centre de la ville, ce qui n'est pas pour arranger les choses, déplorent des riverains. Les bouchons à répétition qui durent parfois plusieurs heures rendent l'atmosphère irrespirable. Concerts de klaxons interminables, vociférations, heurts, injures, le tout sous le regard mi-amusé, mi-revanchard des piétons qui, à leur tour, pestent contre cette situation intenable propice au stress. Des piétons ahuris découvrent que leur vétuste ville ne s'est pas encore adaptée aux évolutions aussi anachroniques soient-elles. Maghnia est devenue un grand village avec en sus les défauts d'une grande ville, pouvons-nous remarquer. En ville, les plaques de signalisation, les interdictions de stationnement sont foulées aux pieds dans une impunité qui laisse dubitatif, les automobilistes ne se gênent en aucune façon pour se garer ou bon leur semble ou faire la causette avec un autre automobiliste en plein milieu de la chaussée. L'absence de parkings a laissé le champ libre à une catégorie de marginalisés de la société qui se sont autoproclamés gardiens de ces espaces comme c'est le cas aujourd'hui à proximité de la grande mosquée, ou contre la volonté même des propriétaires de véhicules qui, pour ne pas envenimer les choses ou par peur carrément de représailles, consentent à se faire racketter sans broncher. Ce qui ne les empêche, cependant, pas de maudire cette absence d'autorité qui laisse le champ libre à toute cette horde de désœuvrés. Un autre phénomène tout aussi contraignant est cette désagréable tendance qu'ont les commerçants de la ville à squatter tous les trottoirs mis à la disposition des piétons pour étaler leurs marchandises, un comportement calqué sur celui des commerçants d'Oujda où, là-bas, nous fait-on savoir , les Oujdis possèdent en guise de magasins d'étroits petits locaux où sont stockés leurs produits pour la nuit, le jour ces produits sont étalés à même le trottoir faute d'espace. Un comportement qui a pour conséquence la perturbation de la circulation de part et d'autre et la provocation de nombreux accidents. ALI MOUSSA JAMAL