La référence au mois de juillet, pour la mise en œuvre du CAS (Country assistance strategy), renvoit à l'année fiscale en vigueur au niveau de la banque mondiale, qui débute le 1er juillet. “Il n'a jamais été question de suspendre la coopération avec l'Algérie, jusqu'à l'élection présidentielle de 2004”, soutient le directeur du département Maghreb de la banque mondiale, Théodore Ahlers, lors de la conférence organisée, hier, à l'hôtel Sofitel, sur le programme de cette institution financière internationale en Algérie. Pour lui, la référence au mois de juillet, pour la mise en œuvre du CAS (country assistance strategie), renvoit à l'année fiscale qui débute le 1er juillet. L'objectif principal de coopération que la Banque mondiale propose d'apporter à l'Algérie est d'appuyer ces réformes structurelles à travers un programme comportant des travaux analytiques, des services de conseils, des actions de renforcement des capacités institutionnelles en Algérie, des opérations de prêt et de financement par la SFI ou d'atténuation de risque à l'aide de prêts structurés. Selon Théodore Ahlers, les consultations tenues avec la société civile et les discussions avec le gouvernement ont fait ressortir trois défis de développement, auxquels l'Algérie doit répondre. Il s'agit de gérer les réserves de pétrole et de gaz pour le bénéfice à long terme de la population, de créer la croissance et l'emploi dans les secteurs hors hydrocarbures et enfin d'assurer un meilleur service de base, de sorte que tous les Algériens en bénéficient. Le directeur du département Maghreb de la banque mondiale estime que l'Algérie a réussi un remarquable rétablissement depuis 1996. le produit intérieur brut, en moyenne, a augmenté de 3% par an entre 1999 à 2002, avec 4,1% en 2002. L'inflation est maîtrisée ; à fin 2002, le taux était de 1,4%. Les réserves de change ont dépassé les 23 milliards de dollars. “L'Algérie a beaucoup avancé, mais il lui reste encore beaucoup à faire. Pour engranger les bénéfices, il faudrait libérer les initiatives productives”, dira M. Théodore Ahlers. Pour ce dernier, l'appui de la Banque mondiale ne peut à lui seul attirer les investissements, nationaux ou étrangers. Des actions sont à entreprendre au niveau institutionnel, essentiellement le système judiciaire, le financement bancaire, le foncier et l'accès à l'information dont l'inéficacité freine l'investissement. Les contraintes au développement des activités productives Le marché informel, le foncier et l'accès aux crédits sont les trois contraintes “sévères” citées par la Banque mondiale dans son enquête sur le climat de l'investissement en Algérie. L'enquête a concerné 600 PME et grandes entreprises, privées et publiques, sur 9 wilayas (Alger, Boumerdès, Blida, Constantine, Annaba, Oran, Tlemcen, Ouargla et Ghardaïa). Plus de 40% d'entreprises sont à la recherche de terrains industriels. C'est dire que la question du foncier constitue un véritable frein à l'investissement. L'attente, affirme-t-on, dépasse parfois quatre années. Ce qui fait dire aux experts de la Banque mondiale que la contrainte d'accès au foncier détermine le choix d'emplacement de l'entreprise. Alors que, logiquement, c'est la proximité du marché, les bonnes infrastructures, la disponibilité des matières premières et d'une main-d'œuvre qualifiée que les opérateurs économiques prennent en compte avant de lancer leur projet. Le texte parle d'intervention indue d'organismes publics (Calpi, agences foncières, ANDI, MIR et Domaines) dans le choix d'investissement, de spéculation, de mauvaise gestion des zones industrielles. Par ailleurs, plus de 30% des terrains, pourtant viabilisés, ne sont pas utilisés. Le Calpi d'Annaba, par exemple, a enregistré, jusqu'à avril 2002, 444 demandes de terrain. Le nombre de terrains créés est évalué à 575 (253 en zone industrielle et 322 en zone d'activités). En matière de disponibilité des terrains au niveau de cette wilaya, la Banque mondiale avance le chiffre de 21 en zone d'activités seulement. Parallèlement, 294 lots (104 en zone industrielle et 190 en zone d'activités) ont été distribués, mais non utilisés. Concernant les délais moyens pour les opérations bancaires courantes, l'encaissement d'un chèque d'une même banque dans la même ville peut durer plus de deux semaines. Pour l'encaissement d'un chèque d'une banque différente dans une autre ville, le délai passe à cinq semaines. L'ouverture d'un crédit documentaire met deux semaines. L'accès au financement, aussi, n'est pas du reste. Pour le financement du fonds de roulement, 72,7% des entreprises déclarent avoir recours à l'autofinancement. 11,4% des opérateurs économiques, seulement, sollicitent des banques. La situation est quasiment la même concernant l'investissement. 70,6% des entreprises utilisent des fonds propres. 18,1% ont recours aux crédits bancaires. De leur côté, les banques soulignent l'incapacité des entrepreneurs à présenter des projets bancables. Elles évoquent la mauvaise gestion et le manque de transparence. Les banquiers citent aussi comme contraintes la faiblesse du système judiciaire, l'environnement concurrentiel et l'accès à l'information. Sur le plan des services publics, la situation est plus dramatique. Pour obtenir une ligne téléphonique, le délai moyen est de 216,7 jours. Ce délai est de 20,6 jours pour la réparation d'une ligne en dérangement. La satisfaction d'une demande de connexion au réseau électrique peut durer 133,9 jours. Ce qui est encore plus grave, l'enregistrement d'une entreprise met 121,5 jours et l'obtention d'un permis de construction 106,6 jours. Par ailleurs, en 2001, le délai moyen pour dédouaner sa marchandise importée est de 16 jours, alors qu'il n'est que de 3 jours au Maroc. Critères de soutien Théodore Ahlers affirme que le CAS ne prévoit pas de conditionnalité particulière. Mais dans un document distribué à la presse, il en ressort que la stratégie de coopération du groupe de la Banque mondiale s'appuie sur trois principes : la sélectivité, l'approche pragmatique portant sur le transfert du savoir et le renforcement des capacités institutionnelles, ainsi que l'amélioration des perceptions du marché envers l'Algérie. Un rapport d'évaluation à mi-parcours du CAS sera élaboré. L'évaluation se fera à la fin 2004 et début 2005. Elle sera discutée avec le gouvernement algérien et constituera l'occasion de revoir dans quelle mesure les priorités affichées initialement demeurent pertinentes ou le cas échéant les réviser. Dans le cadre de ce CAS, M. Ahlers a indiqué que des prêts à hauteur de 100 millions de dollars pourraient être engagés par la Banque mondiale. Mais, pour lui, l'Algérie, étant donné les ressources dont elle dispose, a besoin surtout d'expertise. Projets de la banque mondiale Le directeur du département Maghreb de la Banque mondiale parle de 14 projets avec des engagements évalués à 53 milliards de dinars. Il reste à décaisser 37 milliards de dinars. L'AMGI a facilité un montant total des investissements directs étrangers en Algérie, estimé à 248 millions de dollars. M. R.