Le conseil d'administration de la Banque mondiale a exprimé, vendredi dernier, son soutien à un plan d'actions de trois ans au profit de l'Algérie. Elaborée en consultation avec le gouvernement et les organisations de la société civile, la stratégie de coopération avec le pays, appelée Country Assistance Strategy (CAS), s'efforce d'appuyer le programme de réforme de l'Algérie à l'aide d'un assortiment de services analytiques et consultatifs de renforcement institutionnel et d'opérations de prêt pour les exercices 2004 à 2006. Le processus du CAS, un cadre d'assistance de la Banque mondiale à l'Algérie, a démarré en 2002. Une équipe très importante d'experts de la Banque mondiale a travaillé pendant 14 mois pour faire l'audit de toute la société algérienne, dans ses différents domaines. Une enquête a été menée auprès de 600 entreprises. Une autre a concerné 54 groupes d'investissement étrangers, ainsi qu'une étude sur le climat d'investissement en Algérie. Le CAS est une analyse des forces et des faiblesses de l'Algérie, des progrès réalisés, des priorités sur lesquelles l'Algérie devrait se concentrer. Dans la stratégie du secteur privé, il y a 12 chapitres où chacun traite des priorités et de la description des secteurs. On parle des retards des privatisations, de pénurie de terrains industriels, de la difficulté d'accès au financement, de la faiblesse des ressources humaines et des infrastructures. Dans son communiqué laconique, la Banque mondiale affirme que l'Algérie a opéré un redressement remarquable depuis le milieu des années 1990. Le produit intérieur brut a augmenté de 4,1% en 2002. L'inflation a chuté de 20% en 1994 à 1,4% en 2002. Et avec un montant de 23 milliards de dollars en 2002, les réserves ont atteint leur niveau le plus élevé depuis l'indépendance en 1962. La Banque mondiale a identifié trois “principaux enjeux de développement auxquels l'Algérie continue à se heurter : utiliser les réserves pétrolières et gazières au profit à long terme du peuple algérien, créer la croissance et l'emploi dans l'économie hors pétrole pour tirer parti de l'accroissement de la population active, éviter les tensions sociales provoquées par le chômage et assurer des services publics de meilleure qualité”. Pour répondre à ces enjeux du développement de l'Algérie, le rôle de la Banque sur la période 2004-2006 se focalisera sur trois fronts. Elle aidera le gouvernement à articuler et à mettre en œuvre une meilleure stratégie de prestation de service dans les domaines de l'alimentation en eau, du logement, des services environnementaux et du développement humain pour satisfaire les besoins de la population. Elle favorisera la croissance au moyen de la stabilisation budgétaire et de l'administration efficace des recettes pétrolières. Elle aidera le gouvernement à éliminer les obstacles à la croissance menée par le secteur privé, en particulier ceux qui affectent l'environnement des affaires, les petites et moyennes entreprises (PME), le développement du secteur financier et de l'infrastructure. Justement, en terme d'obstacle, le marché informel, le foncier et l'accès aux crédits sont les trois contraintes sévères citées par la Banque mondiale, dans une enquête sur le climat de l'investissement en Algérie. L'enquête a concerné 526 PME et grandes entreprises, privées et publiques, sur neuf wilaya (Alger, Boumerdès, Blida, Constantine, Annaba, Oran, Tlemcen, Ouargla et Ghardaïa). En matière du foncier, 42,1% des entreprises sont à la recherche de terrains industriels. L'attente peut parfois durer 4 années. L'Etat a pourtant mobilisé une importante offre foncière par la création de 70 zones industrielles sur 11 000 hectares qui peuvent accueillir 6 371 lots, de 477 zones d'activités sur 7 282 hectares qui peuvent accueillir 2 700 lots et l'attribution de lots épars sur 10 000 hectares. Mais 17% des lots ne sont pas encore attribués. 22% de lots attribués ne sont pas occupés. Au total, 39% des lots créés ne sont pas occupés. Même ceux qui sont occupés sont loin de l'être de façon correcte. Sur le plan des services publics, la situation est plus dramatique. Pour obtenir une ligne téléphonique, le délai moyen est de 216,7 jours. Le délai pour la réparation d'une ligne en dérangement est de 20,6 jours. La satisfaction d'une demande de connexion au réseau électrique peut durer 133,9 jours. Ce qui est encore plus grave, l'enregistrement de son entreprise met 121,5 jours et l'obtention d'un permis de construction 106,6 jours. “La Société financière internationale (SFI), le bras de la Banque mondiale pour l'investissement privé, interviendra en complément de l'appui de la Banque en aidant le développement du secteur financier, en apportant son concours aux PME, en encourageant les investissements privés dans l'infrastructure et en s'associant à l'effort de privatisation du gouvernement” note le communiqué de la Banque mondiale. Et comme tout prêt, celui-ci est assorti de conditionnalité que la Banque mondiale ne précise pas. Par ailleurs, un certain nombre de projets suivis et financés par le passé par la Banque mondiale a échoué. Se pose alors la question de l'efficacité de ce nouveau partenariat entre l'Algérie et la Banque mondiale. Dans son communiqué, l'institution financière internationale ne fournit aucune précision sur les conditions de succès d'un tel programme à moyen terme. M. R.