Resumé : J'avais décidé de faire la paix avec Hacène. Pour me faire pardonner j'essayais de détendre l'atmosphère en lui rappelant que j'étais enceinte. Il parut étonné de m'entendre dire que j'attendais une fille. 40eme partie Dès le lendemain, je repris mon travail au cabinet. Des patients m'attendaient, et j'eus une journée fort chargée. Mes analyses s'avérèrent satisfaisantes, et ma grossesse est confirmée. Hacène, loin des doutes, nageait dans le bonheur, et il fût encore plus heureux d'apprendre quelques mois plus tard que j'attendais effectivement une fille. Saléha devrait ouvrir un cabinet de consultation pour « femmes enceintes » en ville afin de déterminer et la grossesse et le sexe de l'enfant dès sa fécondation. Quelles astuces ont donc trouvé nos paysannes pour savoir avant tout le monde qu'elles attendent un enfant de tel ou tel sexe ? Le jeu peut valoir la chandelle, si elles tombent juste à chaque « attente ». Je mis au monde ma fille « Nawel ». L'accouchement n'a pas été de tout repos. Une césarienne s'est avérée même nécessaire vu que la position du bébé ne s'y prêtait pas à une délivrance normale. J'étais épuisée, mais heureuse. Ma fille avait une beauté angélique. Une jolie petite brunette au regard déjà malicieux. Ma grand-mère, Zahra vint s'occuper de moi. Elle était si fière de tenir son arrière-petite-fille dans ses bras, et de me préparer des plats « tonifiants » qui me permirent de reprendre rapidement des forces. Quelques jours à peine, et j'étais sur pied. Mais Hacène, fidèle à ses appréhensions, m'empêcha de quitter mon lit. - Tu es encore trop faible pour faire quoi que ce soit. Occupe-toi du bébé, cela ne te suffit donc pas… ? Ratibe qui venait de fêter ses cinq ans était chez ma belle mère, mais me rendait visite quotidiennement. Il aimait me voir donner le sein à sa sœur, et me racontait par menu détails sa journée. C'était un élève doué, qui aimait la lecture et le dessin. Il me montrait à chaque fois ses « gribouillages » aussi fier qu'un pacha. - Regarde maman. Je viens de faire un beau portrait de toi et de Nawel… Je jetais un coup d'œil distrait au dessin, et déposais un petit bisou sur le front de mon fils. - Va le montrer à papa, il va sûrement aimer. Ratibe courait alors le montrer à son père avant de revenir se rasseoir sur mon lit. J'étais heureuse. Le bonheur pour moi était ma famille et mon travail. Rien ne venait entraver mes journées, si ce n'est les petites remontrances de Hacène, qui me reprochait ma témérité quant à certaines tâches que je ne devais pas effectuer alors que je venais d'accoucher. Parfois, on se chamaillait pour des futilités. Et parfois, notre amour prenait de telles proportions, que j'oubliais toutes nos petites querelles. J'aimais mon mari, et il me le rendait bien. Il était très attentionné envers moi et ses enfants, et se pliait en quatre pour répondre à tous nos besoins. C'était lui « l'homme de la famille » comme il aimait à le répéter. Mais en aucun cas, il ne m'a fait de remarques désobligeantes, même si parfois j'osais prendre certaines décisions à son insu. En un mot, je ne pouvais rien demander de plus. J'étais comblée. Et je ne cessais de rendre grâce à dieu de m'avoir accorder cette paix intérieure si rassurante. Je suis Mina, la petite-fille du grand-père que tout le village vénérait. Je suis Mina, le médecin, que les patients adoraient et à qui ils confiaient leurs secrets sans aucune hésitation. J'avais réussi sur tous les fronts, au sein de ma famille et dans mon travail. Les années passèrent et mes enfants grandissaient dans un climat familial des plus sereins. J'avais emménagé dans un nouveau cabinet, plus spacieux et mieux équipé. Hacène qui voyageait maintenant beaucoup avait de son côté, dépassé mes espoirs. Il avait son propre cabinet, et s'était engagé dans la recherche agronomique. Ma grand-mère Zahra avait certes pris de l'âge, mais demeurait mon soutien le plus inflexible. Elle venait souvent nous rendre visite et égayait notre maison par sa présence. Mes enfants l'adoraient. Ma mère, que je voyais moins souvent que par le passé, s'était découverte une vocation de nourrice au foyer. C'était elle qui prenait en charge mes petits neveux. Elle s'était aussi proposée de prendre en charge les miens, mais j'avais refusé, arguant du fait, que Ratibe était aujourd'hui assez grand pour s'occuper de lui-même, et Nawel, mon adorable petite fille, allait déjà à l'école, et passait son temps libre au conservatoire où elle étudiait le piano. Y. H.