Le projet de formation de 60 jeunes harragas d'Algérie, initié par l'association française “Passion du djanoub” et financé par la Commission européenne, a reçu l'aval des responsables du ministère de la Solidarité nationale. L'information a été communiquée, hier, par le Dr Zohra Sahli, présidente de l'association, lors d'une conférence de presse qu'elle a animée à l'Institut national des cadres supérieurs de la jeunesse (à Alger), en présence d'un représentant du département de Ould-Abbès. Cette dernière a indiqué que l'entrevue qu'elle a eue, ce mercredi, avec le chef de cabinet du ministère de la Solidarité s'est terminée avec l'engagement de la signature prochaine d'un protocole d'accord entre les deux parties. Mme Sahli, qui est anthropologue et spécialiste en conduite de changement, a en outre expliqué que le programme de formation, destiné à des jeunes des deux sexes de 15 à 25 ans, qui ont vécu une ou plusieurs tentatives d'émigration clandestine, débutera en octobre 2009 et durera une année entière, avec 4 mois de suivi supplémentaires. Dans son intervention, la présidente de “Passion du djanoub”, une binationale originaire d'Oum-El-Bouaghi, a explicité les raisons ayant motivé son choix pour l'Algérie. “Je viens régulièrement en Algérie. J'ai travaillé jusque-là avec d'autres pays comme le Mali. J'avais envie de mener des projets en Algérie, auprès des jeunes ayant choisi l'émigration clandestine, car c'est une population passionnante qui porte en elle de la souffrance et de la rupture, mais qui a une soif de vivre formidable”, a-t-elle confié. Mme Sahli s'est ensuite attardée sur les mouvements migratoires, rappelant que pour l'année 2007, quelque 200 millions de migrants ont été recensés dans le monde, soit plus de 2% de migrants supplémentaires. L'intervenante a aussi observé que “65% des migrants dans le monde sont des jeunes de moins de 25 ans”. Un pourcentage qui, selon elle, aura tendance à grimper dans les 15 ou 25 ans à venir, en raison des changements climatiques et des difficultés, voire même de la famine qu'ils engendreront. “La migration s'est toujours passée dans des conditions difficiles. La mort comme compagne est le lot du mouvement migratoire”, a encore souligné le Dr Sahli, non sans insister sur le fait que “les gens bougent parce qu'ils ont besoin de se nourrir”. Dans la partie réservée à l'Algérie face aux mouvements migratoires, l'anthropologue a soutenu que les pays riches ont subi d'importantes vagues migratoires et de grands bouleversements, qui se sont produits sur une période assez longue. Dans cette “géographie mondiale” où le processus de construction et de maturation des sociétés du Nord a exigé des millénaires, l'Algérie, en tant que pays indépendant depuis seulement une cinquantaine d'années, “est en déficit important au niveau des valeurs”, dira-t-elle. Pourtant, l'Algérie aurait les possibilités de quitter cette situation de déficit, pour peu qu'elle porte la réflexion, entre autres, sur “les nouveaux modes de partage des richesses” et “l'éducation”. Pour la présidente de “Passion du djanoub”, l'importance devrait se situer non pas dans les tentatives de “rattraper les pays occidentaux”, mais dans les décisions à prendre. “Il est important de devenir acteur de son destin. Pour cela, il faut mettre l'homme au cœur des choix politiques”, appuiera Mme Sahli. Plus loin, celle-ci avertira que le programme réservé aux jeunes harragas visera non seulement à “les mettre en situation de traverser les vagues de changement”, à leur “apprendre à s'aimer soi-même” et à “développer leurs talents, quel que soit l'environnement”, mais aussi à les aider à “prendre leur place dans la société”, à travers l'élaboration de projets personnels. Notons, enfin, que si cette expérience pilote réussit, le projet se poursuivra pour la prise en charge d'autres jeunes harragas.