L'homme ne renonce pas à son projet de société. À peine sorti de prison après douze années de réclusion, Ali Benhadj, celui par qui le drame algérien est arrivé, repart déjà en guerre contre l'autorité de l'Etat. Sa libération, hier, aurait pu être “normale” pour un reclus qui aura purgé sa peine, si ce n'est l'instinct morbide de ce chef terroriste à faire sensation. Y compris sur le dos des cadavres de 200 000 Algériens qu'il aura, à jamais, sur sa conscience, si tant est que cet individu en ait une. En effet, le Savonarole du FIS dissous a refusé, hier, au sortir de sa prison, à Blida, de signer le procès-verbal de notification lui rappelant les interdictions auxquelles il reste soumis. Selon un communiqué du procureur militaire près le tribunal militaire de Blida, rendu public, hier, Benhadj a fait l'objet, avant son élargissement, de cette notification en vertu des articles 4, 6 et 8 du code pénal. Les autorités judiciaires qui l'avaient condamné le 15 juillet 1992, pour “complot contre l'autorité de l'Etat, sabotage économique et distribution de tracts de nature à nuire à l'intérêt national”, exigent de lui, après sa libération, un véritable code de bonne conduite. Une série de neuf interdictions le dépouille pratiquement de toute possibilité de mouvement, réunion ou autre manifestation publique de nature à nuire à la sûreté nationale. Il lui est notamment strictement défendu de se porter candidat à une quelconque élection, de tenir des réunions, de créer une association qu'elle soit à des fins caritative, religieuse, politique ou culturelle. Déchu de tous ses droits civiques conformément à la loi, Ali Benhadj devrait, théoriquement, s'astreindre à cette discipline. Mais cet arsenal juridique ne semble pas impressionner ni faire peur à un cet homme qui, toute honte bue, se rebelle contre les autorités en refusant d'apposer son paraphe sur le document de la justice. De fait, ce refus est un signe qui ne trompe pas sur les intentions de cet homme qui s'est déclaré un jour de juin 1991, être un “hors-la-loi” (lire ci-contre le portrait du numéro 2 du FIS). Il avait également affirmé, un autre jour, que la démocratie était “kofr” (une hérésie). Il faut dire que l'opinion publique nationale ne fait pas mystère de l'inclination de Ali Benhadj à l'affrontement et à la rébellion, quitte à ce qu'il marche sur les cadavres des Algériens. Ne l'a-t-il pas fait d'ailleurs avec la terrible décennie rouge qu'il a, avec ses acolytes islamistes et terroristes, infligée au peuple algérien ? Déjà, depuis sa cellule, il n'a cessé de glorifier les actes terroristes de ses bras armés. L'on se rappelle la fameuse lettre retrouvée sur le corps de l'ex-chef du GIA, Chérif Gousmi, en 1995, écrite de la main de ce même Ali Benhadj. C'est dire que son refus, hier, de signer le PV du procureur, s'inscrit presque dans la logique d'un personnage atypique. C'est, bien sûr, une preuve qu'il ne compte pas prendre en considération les privations auxquelles il est soumis ni observer le silence qu'on lui recommande. Ali Benhadj avait annoncé la couleur, il y a quelques jours, quand il a envoyé une délégation chez le chef du MRN, Abdellah Djaballah, avec lequel il a signé une espèce de pacte de non-agression, selon les informations dont nous disposons. Ils auraient même conclut la “sainte alliance”, à en croire les indiscrétions de sa famille, dans la mesure où Ali Benhadj a fait savoir à Djaballah qu'il n'avait aucun problème avec lui. On le voit bien, l'ex-numéro 2 du parti dissous n'a jamais renié son terrible passé ni ne s'est départi de son arrogance et de ses visées insurrectionnelles. C'est ce qu'il lance comme message à travers son refus de signer le fameux document. Il oublie tout de même une chose essentielle : l'Algérie n'est plus en 1991. H. M.