Pour clarifier quelque peu la situation, il est intéressant de donner une définition synthétique de ce que l'on appelle aujourd'hui les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) ou tout simplement TIC. Les TIC emploient un ensemble de technologies fondées sur l'informatique, la microélectronique, les télécommunications, le multimédia et l'audiovisuel. L'interconnexion, la combinaison et l'utilisation de ces technologies vont permettre à l'utilisateur de rechercher, traiter, stocker et de transmettre des informations sous diverses formes (texte, son, image, vidéo) avec bien entendu l'interactivité des systèmes numériques. C'est le monde des technologies de l'information et de la communication où l'on parle de l'internet (réseau des réseaux), de l'intranet, du téléphone mobile (GSM, GPRS, UMTS…), du bluetooth, du wifi, de la WLL, du wimax… L'évolution est présente chaque jour. Hier, on parlait de transmission au niveau du mégabit et du PDH (plesiochronous digital hierarchy), aujourd'hui on parle de transmission avec des débits qui dépassent la dizaine de gigabits et du SDH (synchronous digital hierarchy) et on est en train même de parler de débit de l'ordre du térabit et du DWDM (dense wavelength division multiplexing). Le déploiement massif des technologies de l'information est en train de bouleverser la société à tous les points de vue, politique, économique, développement durable, éducation, formation et même le comportement de l'individu. Cette transformation rapide peut susciter optimisme et inquiétude pour les pays émergents comme l'Algérie. On peut être inquiet de voir s'accroître la fracture numérique. On peut, cependant, regarder l'avenir avec optimisme et sauter le gap de la fracture numérique et être dans le lot des sociétés qui maîtrisent la connaissance. Si l'on regarde l'évolution du monde actuel sous l'impact des TIC et l'incidence de la globalisation, nous n'avons qu'une seule alternative, c'est sauter le gap. C'est tellement facile à dire et complexe à faire. L'évidence c'est que cela n'est pas impossible. Il faudrait donc mettre en œuvre la stratégie nécessaire et cela le plus rapidement possible, pour la réalisation de la société du savoir, de la connaissance et de l'information. Beaucoup de responsables politiques dans le monde et pas uniquement en Algérie ne comprennent pas les enjeux du total numérique et leur impact sur l'évolution de la société. La stratégie adoptée à l'horizon 2013 Dans une optique de combler le retard existant et de permettre un saut réussi du gap, l'Algérie a élaboré une stratégie e-algérie 2013 pour asseoir une introduction à tous les niveaux des technologies de l'information et de la communication. Cette stratégie est matérialisée par plusieurs points ou plusieurs axes stratégiques. On peut noter entre autres l'action de l'accélération de l'usage des technologies de l'information et de la communication dans les administrations publiques, dans les entreprises, la mise en place de mécanismes et de mesures incitatives pour permettre l'accès des ménages et des très petites entreprises aux équipements et aux réseaux liés aux technologies de l'information et de la communication. L'exemple du plan Ousratic est présent dans tous les esprits. Exemple sur lequel on reviendra un peu plus loin. Toujours dans le cadre de la stratégie e-algérie 2013, il y a l'initiative de la prise en charge du développement et de la valorisation de la compétence pour la production d'éléments liés aux technologies de l'information et de la communication. Toutes ces initiatives sont tout à fait louables et nécessitent une interaction entre tous les acteurs. Pour arriver à cela, il est impératif que la connectivité soit fiable et viable. La nécessité d'un réseau sécurisé, équipé d'infrastructures permettant à un grand nombre l'accès au haut et au très haut débit est plus qu'une nécessité pour déployer et développer la société de la connaissance et du savoir. On ne peut bien entendu parler de compétence sans en référer aux universités, aux centres de recherche, aux laboratoires et aux chercheurs algériens. Car il est utopique et irréaliste d'attendre des solutions qui viennent de l'étranger. Les nouvelles technologies au vu du potentiel humain que présente l'Algérie en matière d'enseignants universitaires, de chercheurs, de laboratoires (plus de 600 laboratoires sont en activité) et d'axes de recherche, peuvent apporter l'impulsion nécessaire à un décollage réel de la recherche scientifique pour la faire participer à la création de richesses. Le plan de stratégie insiste sur le fait d'orienter l'activité économique dans les technologies de l'information et de la communication vers des objectifs d'exportation, mais avant cela, on est en droit de se poser les questions suivantes : est-ce que la connectivité entre les universités, centres de recherche, laboratoires est suffisamment fiable et rapide ? Est-ce que la qualité de service est sans reproche ? Est-ce que le nom de domaine .dz est utilisé par la plupart des Algériens ? La réalité répond par la négation. La majeure partie des chercheurs, des universitaires et presque tous les Algériens, utilisent d'autres noms de domaines. Il y a lieu de se poser la question pourquoi ? Pourtant cela fait beaucoup plus sérieux quand on représente une institution algérienne et présenter une adresse mail avec un domaine .dz. Ainsi la mise en place d'une société de l'information commence par résoudre les problèmes essentiels avant de s'attaquer aux questions les plus complexes. On sait que la société aujourd'hui mesure sa puissance au rythme de ses compétences. La source réelle de la compétence reste sans aucune équivoque l'école, la formation et l'université. C'est du chercheur que viendra l'innovation et par là une participation à la croissance et à la création de richesses. Certes, il est très utile de penser aux mesures incitatives pour les ménages et pour les petites entreprises. Qu'en est-il pour l'étudiant, l'enseignant et l'école, source de tout processus de développement. Dans le plan de stratégie e-algérie 2013 que j'ai entre les mains, j'ai essayé de retrouver le mot école au moins une fois dans le texte. En vain, je ne l'ai pas trouvé. Peut-être j'ai mal cherché, mais les technologies de l'information et de la communication ont fait la recherche à ma place et m'ont donné un zéro pour l'école, un zéro pour l'université et un zéro pour le chercheur. Il est peut-être temps de penser à inscrire l'enracinement des TIC dans les milieux propagateurs de savoir que sont l'école, le collège, le lycée et l'université. A-t-on pensé aux facilités qu'il faut étudier et accorder à l'étudiant, à l'enseignant de tous les cycles et aux chercheurs pour acquérir l'infrastructure essentielle pour l'utilisation et la maîtrise des technologies. Le chercheur, aujourd'hui, avec l'aide des nouvelles technologies, peut accéder à toutes les revues en ligne et voir les évolutions de la recherche dans son domaine, pour promouvoir et développer sa propre recherche. Il a été prouvé que les pays à l'image de la Turquie ou de l'Iran, qui ont un accès à toutes les publications, ont pu accroître de façon très sensible leur production en matière de recherche par un volume plus important de publication et de brevets. Voilà une incidence directe des TIC. Le plan Ousratic Pour revenir au plan Ousratic, un PC par foyer, la formule de base coûte environ 4 fois le SNMG et la variante qui contient un ordinateur portable et qui peut intéresser l'enseignant, l'étudiant et le chercheur atteint la valeur de 9 fois le SNMG. Le remboursement le plus faible par mois dans le cas d'un crédit sur 36 mois, s'élève à environ 2 000 DA et le plus onéreux à 9 500 DA. La procédure Ousratic n'a pas été adoptée à grande échelle par le grand public et encore moins par les enseignants et les étudiants. Le plan reste néanmoins un élément très intéressant pour la promotion des technologies de l'information et de la communication. Il faut cependant penser à l'assouplir et à l'alléger de certaines contraintes. Offrir des tarifs préférentiels et promotionnels pour certaines franges de la société qui sont dans l'obligation d'utiliser les TIC tels que les étudiants et les enseignants. En plus de cela, les étudiants et les enseignants ne sont pas obligés d'acheter la connexion ADSL. Ils peuvent se suffire d'une connexion Wifi à l'intérieur d'espaces numériques d'universités correctement dotées ou d'écoles rattachées à Internet, voir l'exemple de la Jordanie. Un effort considérable doit être effectué dans ce domaine pour éviter que l'école perde sa vocation. Ceci va diminuer considérablement le prix de l'infrastructure informatique et permettre une plus grande dynamique dans nos écoles, universités et laboratoires. Il est temps de concentrer les énergies nécessaires, car les moyens existent sûrement, et adopter une organisation et une stratégie sans failles dans le domaine des TIC pour éviter à l'Algérie de rester à la traîne dans le domaine des technologies de l'information et de la communication : 108e dans le monde et 13e dans le monde arabe derrière Les Emirats arabes unis, le Qatar, Bahreïn, la Tunisie, l'Arabie Saoudite, la Jordanie (44e dans le classement mondial), Oman, le Koweït, l'Egypte, le Maroc, la Syrie et la Libye (selon the Global Information Technology Report 2008-2009, World Economic Forum 2009). B. H. (*) Professeur des universités, docteur d'Etat en électronique, docteur de l'Université de Rennes I en télécommunication.