Les choses sérieuses vont pouvoir commencer en Mauritanie. Un gouvernement de transition doit en effet être formé au plus tard aujourd'hui, selon l'accord de Dakar. La route des urnes pour le patron de la junte militaire qui pensait gagner sans coup férir le scrutin présidentiel sera plus ardue. L'ex-chef de la junte militaire et l'opposition ont signé l'accord de sortie de crise en Mauritanie à Dakar. Les présidentielles du 6 juin sont reportées au 18 juillet et une administration provisoire d'union nationale sera mis en place durant cette étape pour organiser des élections transparentes et sortir ainsi le pays de l'impasse politique. L'opposition s'est félicitée de cet accord même si elle n'a pas obtenu toutes ses revendications. Chaque protagoniste de la crise a sacrifié un peu de ses exigences et, apparemment, c'est la junte militaire qui a donné le plus en acceptant le report mais aussi en ouvrant davantage le jeu des élections. En réalité, les militaires ne pouvaient pas faire autrement face aux multiples pressions des partenaires étrangers de la Mauritanie et à l'isolement dans lequel se trouve le pays depuis le renversement, en août dernier, du premier chef d'Etat librement élu par le général Mohamed Ould Abdel Aziz. Les partis d'opposition crédibles ne voulaient pas participer aux élections programmées par les militaires et l'ONU, l'UA, l'UE et les Etats-Unis avaient estimé ensemble qu'un scrutin boycotté par l'opposition ne représenterait pas un retour à l'ordre constitutionnel réclamé par eux. L'accord conclu à Dakar prévoit un gouvernement de transition dont les 26 postes seront réparties “à parts égales” entre des personnalités désignées par la junte et des hommes politiques d'opposition. La communauté internationale s'est déclarée prête à apporter son aide pour le scrutin du 18 juillet qui sera suivi, si nécessaire, d'un second tour le 1er août. Le délai est court mais les dirigeants de l'opposition sont prêts à se lancer dans le bain. Ahmed Ould Daddah, président du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), principale force contre le putsch militaire devrait normalement se porter candidat. Le Front national pour la défense de la démocratie, une coalition opposée à la junte représentée, a lui aussi laissé entendre qu'il était prêt à participer à l'élection. Le FNDD est à la recherche de son candidat. La nouveauté dans ces élections déclarées désormais ouvertes, est l'entrée dans la course de l'ex-colonel Ely Ould Mohamed Vall, ancien chef de la junte au pouvoir de 2005 à 2007, qui a conduit une transition présentée comme exemplaire, avant de quitter la présidence avec les honneurs de la communauté internationale. Quand son cousin, le général Ould Abdelaziz qui a organisé le dernier putsch, a pris le pouvoir au mois d'août dernier, Vall était à l'étranger en train d'apprendre l'anglais et il ne s'est jamais exprimé publiquement sur le coup de force de l'armée, qu'il aurait condamné en privé. Son entrée dans la course, si elle se confirme, change évidemment la donne. Même s'il est difficile d'évaluer sa popularité ou son poids dans les milieux traditionnels qui sont porteurs de voix et au sein de l'armée, l'ex-colonel donnera du fil à retordre à son cousin. Vall, selon ses amis, est depuis 2007 dans la position de guetteur de bonnes opportunités pour un retour par les urnes, à l'image de Amadou Toumani Touré au Mali. Parmi les nouveaux candidats potentiels sinon, il y a également Ahmedou Ould Abdallah, l'envoyé spécial de l'ONU pour la Somalie. Avec les candidats du FNDD, qui a mené la fronde anti-putsch et celui du RFD, le principal parti d'opposition et le général et le cousin d'ex-chef de junte, le jeu risque d'être beaucoup plus ouvert en juillet prochain qu'il ne l'était. Les observateurs s'attendaient à ce qu'en cas de scrutin le 6 juin, le général Abdel Aziz remporte la victoire en l'absence d'opposition sérieuse, ses partisans espèrent que sa décision de reporter l'élection jouera en sa faveur.