Après avoir donné un nouvel essor aux relations économiques afro-américaines, grâce à l'AGOA, la loi US sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique, le locataire de la Maison-Blanche entamera demain une tournée dans cinq pays africains pour replacer les Etats-Unis politiquement sur le continent. Le but inavoué du périple est de concurrencer Paris. L'Afrique, chasse gardée de la France ces dernières années, se rapproche de plus en plus de Washington, qui semble avoir trouvé le moyen d'attirer vers elle les pays africains. Il y a trois ans, les Etats-Unis ont lancé l'AGOA (african growth and opportunity act), une opération qui a fait bondir depuis les exportations africaines vers les states. En 2002, les Américains ont importé pour neuf milliards de dollars de marchandises du continent noir. Ce chiffre a augmenté de 10% par rapport à l'année précédente. Ceci n'a pas manqué de satisfaire les dirigeants des trente-huit Etats de l'Afrique subsaharienne qui adhèrent au pacte ouvrant le droit d'exporter vers l'Amérique quelque 6 100 produits différents jusqu'en 2004. Devant la réussite de l'opération, George Bush n'aura même pas besoin de parler de l'économie lors de son séjour au Sénégal, en Afrique du sud, au Botswana, en Ouganda et au Nigeria. Il cherchera à se replacer sur le plan politique, en raison de son impopularité dans le continent à cause de sa politique étrangère, guère appréciée, notamment après la guerre en Irak. Ceci étant, les Etats-Unis ambitionnent de supplanter la France en Afrique. Paris, dont les relations économiques avec les pays africains sont loin d'être à la hauteur des espérances de ces derniers, risque, en effet, de se faire distancer par Washington qui, du même coup, diversifie ses sources d'approvisionnement, particulièrement en ce qui concerne le pétrole. L'instabilité caractérisant le moyen-orient, pousse les Américains à se tourner vers l'Afrique dans ce domaine en élargissant leurs prospections et exploitations pétrolières. L'exemple du Nigeria, cinquième fournisseur des USA en pétrole avec deux millions de barils par jour, montre on ne peut mieux l'intérêt croissant des Etats-Unis pour le domaine des hydrocarbures. Le patron de la maison-blanche aura donc la tâche plus aisée pour damer le pion aux Français, qui se contentent des sommets annuels France- Afrique et d'une assistance économique jugée insuffisante par plusieurs pays subsahariens en proie à la famine. À l'image du président sénégalais Abdoulaye Wade qui affiche désormais clairement sa préférence pour les Etats-Unis et sa volonté de rapprochement avec Washington, d'autres dirigeants africains sont sur le point de lui emboîter le pas, pour peu que les Américains ne mettent pas fin en 2004 à la loi sur échanges commerciaux avec l'Afrique. L'administration Bush ne se limite pas aux aspects politiques et économiques. Ainsi, l'armée américaine veut accroître sa présence militaire en Afrique. Tout en renforçant ses liens avec ses alliés, tels le Maroc et la Tunisie, le Pentagone à l'intention d'obtenir l'accès à des bases au Mali et en Algérie, et de conclure des accords pour l'approvisionnement de ses avions militaires avec le Sénégal et l'Ouganda selon le Times. Cela entre dans le cadre de la guerre que mènent les Etats-Unis contre le terrorisme, selon le général James Jones, chef du commandement européen qui a déclaré : “en menant la guerre contre le terrorisme, nous allons devoir aller là où sont les terroristes. Et nous avons des preuves, au moins préliminaires, que de plus en plus de ces zones non contrôlées et non gouvernées vont être des refuges potentiels pour ce type d'activité.” Une chose est sûre, le voyage de Bush en Afrique représente un enfeu stratégique pour la maison-Blanche déterminée à damer le pion à la France sur un terrain qu'elle considérait comme conquis. K. A.