“Le corps-action ou le corps moyen d'expression personnelle est quasiment absent de l'environnement social algérien. Le corps issu du corps libidinal en est tout autant. En effet, à ce sujet, il est dit que le narcissisme est un élément fondamental de la corporéité”. Quelle fille ou même quel homme n'a jamais eu envie d'avoir un beau corps, sans graisse et musclé ? Et pour cela ces derniers déboursent de grandes sommes d'argent. Cette tendance a vu le jour depuis que la télévision transmet à travers les feuilletons (d'origine brésilienne et actuellement turque) des femmes mais aussi des hommes qui font rêver les spectateurs dont en particulier les femmes. Le feuilleton de “Mohamed et Nour” et celui de “Asmar”, jeune homme et jeune fille à la beauté sublime, ont fasciné une grande masse de la population féminine et, à moindre proportion, celle masculine. Amine, 24 ans, est technicien en électricité “Je fais de la musculation deux fois par semaine, pas pour maigrir, bien au contraire, c'est pour faire augmenter la masse musculaire et bien sur être beau et plaire aux filles. Car à mon avis, c'est ce qu'elles regardent le plus chez les jeunes actuellement” ; “je fais beaucoup d'aérobic pour avoir un ventre plat et des jambes bien musclées”, nous avouera Amel, jeune étudiante. “Cet attachement hédoniste à la beauté du corps humain semble être une caractéristique méditerranéenne, très marquée au pays du Maghreb, que l'islam n'a pu réduire. Parer le corps de bijoux, s'emplir, se tatouer, se maquiller, tout cela fait partie du processus de socialisation”. Selon le Dr Abbassi Zohra, psychologue et psychosociologue explique : “Le plaisir vient du corps regardé et cela est plutôt une caractéristique féminine. Lors des cérémonies familiales, les femmes se parent de mille paillettes pour se rendre à la fête. La fiancée ou la mariée, reine d'un soir, s'exhibe en portant une à une ses belles toilettes devant le regard admiratif de l'assemblée. La présence du corps regardé dans la vie sociale ne se limite pas aux intervalles des fêtes mais submerge la vie de tous les jours en paraissant à la télévision. C'est le corps esthétique et raffiné que proposent les personnages des feuilletons journaliers et qui ravissent le plus fréquemment les jeunes filles et les femmes”. Et d'ajouter : “En effet, quoi qu'il en soit, le plaisir qui prédomine ici n'est pas celui du corps-agi mais bien celui du corps regardé. Le corps-plaisir s'étend aussi au corps-chanté. Il prend une large place dans la vie sociale et individuelle. Il est question d'un corps érotique, sorti de la littérature arabo-musulmane et dont le livre des Mille et une nuits en est le prototype”, soulignera-t-elle. En effet, “ce corps érotique est interprété dans les chansons populaires plus particulièrement celles du chaâbi et du raï. Ces chansons fredonnées par la masse des jeunes qui rêvent d'une femme au cou fin et blanc et aux yeux langoureux. Ce corps féminin chanté est métaphore : il est tour à tour grâce de gazelle, légèreté de la colombe ou encore beauté exubérante du paon. Il est donc l'une des formes sous lesquelles le corps plaisir apparaît dans la vie quotidienne”, dira t elle. Ainsi, “le plaisir issu du corps se limite à trois situations : les moments festifs permettent une certaine expressivité du corps (chants et danses collectifs), les yeux s'octroient un plaisir venu du corps regardé et l'esprit se nourrit du corps fantasmé. Le résultat en est que le corps-action ou le corps moyen d'expression personnelle est quasiment absent de l'environnement social algérien. Le corps issu du corps libidinal en est tout autant. En effet, à ce sujet il est dit que le narcissisme est un élément fondamental de la corporéité”, notera le Dr Abbassi Zohra, psychologue et psychosociologue