Le pays reste fragile : 66% des recettes budgétaires et 97% des recettes d'exportations proviennent des ventes d'hydrocarbures. Ce qui montre le caractère rentier de l'économie nationale. LUbifrance, l'organisme français chargé de promouvoir les exportations de l'Hexagone, a organisé le 7 juillet dernier à Paris “à huis clos” une rencontre intitulée “l'Algérie à la croisée des chemins”, rapporte une source sûre. Au cours de ce forum, différents experts ont tenté d'analyser les dernières évolutions de l'économie algérienne et de commenter les récentes instructions de Ouyahia sur les importations et les investissements étrangers. Yves Zlotowski, l'économiste en chef de la compagnie d'assurances française Coface, a indiqué qu'il faut un prix du baril de pétrole à 82 dollars pour équilibrer le budget de l'Etat en 2009, et un prix d'équilibre de 54 dollars pour la balance courante. Le budget de l'Etat va donc enregistrer un important déficit en 2009. Le déficit budgétaire devrait représenter 110% du PIB de l'année en cours. En clair, si elle n'avait pas accumulé des fonds importants au sein de la caisse de régulation et accru ses réserves en devises, l'Algérie aurait connu une nette dégradation de sa situation financière en raison de la chute des prix du pétrole. Sur le risque Algérie, il a rappelé que notre pays est classé A 4 depuis 2005, soit un assez bon risque, correspondant à la même cotation du Maroc et de la Tunisie. L'économiste en chef a indiqué également que l'Algérie a connu en 2009 une nouvelle dégradation de son rating sur l'environnement des affaires. L'Algérie a été classée en B, soit un mauvais risque, contre A 4 pour le Maroc et la Tunisie. Le représentant de la Coface a avancé deux raisons justifiant ce classement : les faiblesses du secteur bancaire et la fragilité de l'environnement géopolitique et de la gouvernance. Il faut approfondir, selon lui, la politique des crédits. Les crédits au secteur privé représentent 13% du PIB, contre 7O% au Maroc et 61% en Tunisie. En résumé, trop peu de crédits sont accordés en Algérie au secteur privé. Vincent Lunel, représentant du cabinet d'avocats Lefèvre Pelletier, a analysé, lui, dans son exposé les dernières instructions sur les importations et les investissements étrangers. Il a mis en avant les difficultés de mise en œuvre de ces textes. Le représentant du cabinet d'avocats a insisté sur le flou qui entoure cette nouvelle réglementation. Il a cité en particulier les fondements juridiques de ces textes qui violent l'égalité de traitement entre opérateurs. “Ces instructions annulent la loi”, a-t-il argué. Pour Arslan Chikhaoui, le P-DG de Nord-Sud Venture, l'Algérie n'est pas à la croisée des chemins. Elle souhaite juste observer une pause après les errements dans sa politique “d'accueil” des investissements étrangers. Elle va mettre en place des systèmes de contrôle a posteriori des opérations d'investissement et de commerce extérieur. Quant à Akram Belkaïd, l'ancien journaliste du quotidien économique français La Tribune, il a intitulé sa communication : “Qui sont les décideurs économiques algériens ?” “Les décisions de politique économique en Algérie se prennent à la présidence. Elles sont relayées au niveau du gouvernement”, a-t-il répondu. Si l'on cherche à s'installer en Algérie, il faut soit un sponsor pour aller plus rapidement, soit prendre son mal en patience, a-t-il ajouté. Quant à Marc Bouteillier, le chef de la mission économique de l'ambassade de France à Alger, il a affirmé que l'Algérie est un marché complexe et difficile, mais c'est un marché très porteur. L'Algérie a multiplié par trois sa richesse nationale (PIB) en sept ans. Il a mis en avant que c'est le deuxième marché de la France hors OCDE, après la Chine. Les exportations de la France vers l'Algérie sont en progression au cours des cinq-six premiers mois de l'année 2009, contre un recul de -19% vers le Brésil et – 15% vers la Chine. Sur les 1 200 entreprises françaises qui exportent vers l'Algérie, 70% sont des PME, a t-il ajouté. Le représentant diplomatique a pointé du doigt les difficultés rencontrées en Algérie : la fragilité de l'environnement politique, la fragilité des droits des créanciers (difficultés à recouvrer les impayés). Il a relevé l'instabilité juridique qui empêche une vision à long terme. Le chef de la mission économique a cité, en outre, des chiffres intéressants sur la situation actuelle de dépendance du pays. “Le pays reste fragile : 66% des recettes budgétaires et 97% des recettes exportations proviennent des ventes d'hydrocarbures. Ce qui montre le caractère rentier de l'économie”, a-t-il conclu. K. Remouche