Le conseiller à la sécurité du président Bouteflika n'a émis aucune réserve au sujet de cette politique. Le général major Mohamed Touati a affirmé, hier, que l'Armée nationale populaire (ANP), en tant qu'institution, soutient la loi portant concorde civile initiée par M. Abdelaziz Bouteflika. “Je suis parmi ceux qui sont à l'origine de l'idée de ce qui est devenu depuis juillet 1999 concorde civile. Personnellement, j'approuve cette loi et l'ANP l'approuve aussi”, a-t-il affirmé au cours d'une conférence de presse tenue au Palais des nations, au Club-des-Pins (Alger), à la clôture des travaux du colloque international sur le terrorisme, organisé sous le patronage du Chef du gouvernement. C'est la première fois qu'un responsable militaire, et pas des moindres d'ailleurs, rend publique de manière si claire la position de l'institution concernant cette loi. Une loi adoptée par le Parlement à l'unanimité en juillet 1999 et qui a expiré six mois plus tard (le 13 janvier 2000). Après ce délai, son concepteur l'avait complétée par une grâce amnistiante aussi controversée que le premier texte précédent. Le général major Touati n'a rien dit de ce qui pourrait s'apparenter à une critique ou bien à une réserve de l'armée concernant l'amnistie. Il a eu, en fait, cette réflexion : “Si des procureurs ont jugé utile de prolonger le délai de reddition, je n'en vois pas d'inconvénient. Et s'il y a une quelconque voie de concorde nationale, il appartient au chef de l'Etat de l'expliquer.” La concorde civile, a-t-il encore précisé, a “produit des résultats positifs puisqu'elle a permis à des Algériens de répondre à l'appel de la réinsertion dans la vie sociale, objet principal de cette loi”. Il a juste regretté que les responsables du FIS dissous à l'étranger, à l'instar de Dhina en Suisse, aient rejeté la concorde. Le conseiller à la sécurité de M. Bouteflika a répété que l'armée était une institution républicaine soumise à la Loi fondamentale de tous les Algériens : la Constitution. “L'institution militaire est, conformément à la Constitution, sous l'autorité des hauts responsables politiques du pays. Si nous avions dû intervenir au cours de ces dernières années dans la vie nationale, c'est uniquement dans le but de sauvegarder la souveraineté du pays à travers ses institutions lorsqu'il y avait menace. Si nous voulions le pouvoir comme on le prétend, qui pouvait et qui pourrait nous empêcher de le prendre ?! Nous le disons nettement et sans complexe aujourd'hui : nous sommes fiers d'être des généraux (Algériens).” Ces déclarations de M. Touati, personnalité très influente au sein de l'ANP, confortent la thèse selon laquelle l'armée algérienne voudrait améliorer son image auprès de l'opinion nationale et internationale. Une image ternie par des années d'isolement volontaire et certainement mal calculé et qui, à cause de cet autisme, se confond, aujourd'hui, avec les tristes événements sanglants engendrés par le terrorisme islamiste. Il faudra encore beaucoup d'efforts pour rectifier le tir. Les propos du général major sont aussi, ne l'occultons pas, une réponse cinglante au chef de l'Etat, lequel reproche au moins à l'armée d'avoir “commis la première des violences”, se rapportant à l'arrêt du processus électoral en janvier 1992. Le représentant de l'armée a, en effet, souligné que la démission de M. Chadli Bendjedid de son poste était “un acte libre d'un chef d'Etat” dont la finalité était d'“empêcher la tenue du second tour des élections législatives”. Et si plusieurs acteurs reprochent au Président actuel sa politique pro-islamiste, le lieutenant colonel Djamel Bouzeghaïa a mis les points sur les “i” dimanche dernier lors de son intervention en plénière en attirant l'attention sur les risques de l'islamisme en tant qu'idéologie. Mohamed Touati a, par ailleurs, rappelé que l'armée n'a rien contre la nomination d'un civil au poste de ministre de la Défense. Il a confirmé les propos du général de corps d'armée Mohamed Lamari qui, en juillet dernier, avait soutenu la même chose sous une seule condition : que la personne désignée soit algérienne. À propos de la levée de l'état d'urgence, le général major a dit que cela relevait de l'appréciation des autorités politiques. L. B.