Après s'être arrogé les pleins pouvoirs, le président du Niger, Mamadou Tandja, a fait adopter, hier, par référendum une nouvelle Constitution, dont l'intérêt réside en la suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels. Il prend le risque de priver son pays des subsides internationaux mais le Niger est le pays de l'uranium et demain du pétrole. Après avoir dissous le Parlement et limogé la Cour constitutionnelle, Tandja va donc prolonger son mandat. “Approuvez-vous le projet de Constitution soumis à votre sanction ?”, telle est la question à laquelle devaient répondre les quelque six millions de Nigériens convoqués aux urnes hier. Grande réforme de ce projet : la suppression de la limitation du nombre de mandats. En l'état actuel des choses, la Constitution impose à l'actuel président, Mamadou Tandja, à la tête du pays depuis dix ans, de quitter le pouvoir à l'expiration de son second quinquennat le 22 décembre. Mais lui entend garder son fauteuil au moins jusqu'en 2012. Pour ce faire, il s'est donc concocté une Constitution sur mesure, qui lui attribue, outre les fonctions de chef de l'état, celle de chef du gouvernement, de l'administration, des armées et de la magistrature. Un projet décrié dans son propre pays par l'opposition, les syndicats et la société civile et à l'étranger mais sur le bout des lèvres. Face à la colère générale, la réponse a été autoritaire. Alors que le 25 mai dernier, la Cour constitutionnelle met son veto au projet, le président Tandja dissout, dès le lendemain, le Parlement et annonce la tenue du référendum. Les manifestations populaires qui s'ensuivent n'y changent rien. Pire : le 26 juin, le président nigérien estime que l'indépendance de la République est menacée et s'arroge les pleins pouvoirs. C'est l'escalade : lâché par sa coalition, il remanie le gouvernement et limoge la Cour constitutionnelle le 29 juin. Depuis, l'opposition et les voies discordantes sont quasiment interdites d'antenne. Et pour mieux s'assurer le contrôle de l'information, le pouvoir a placé un fonctionnaire du ministère de l'Information derrière chaque journaliste étranger. Les médias officiels, eux, ont invité bien sûr les Nigériens à voter oui hier. Les mises en garde de la communauté internationale n'ont pas ralenti ses ardeurs. Même la décision de la Commission européenne, le 11 juillet dernier, de bloquer le versement d'une aide au budget de l'Etat du Niger et la menace de graves conséquences n'ont pas fait bouger d'un iota sa ligne. Mieux, Tandja en a fait une question de souveraineté. Pour justifier sa détermination, Tandja s'est dit tenu de poursuivre son œuvre à la tête du pays. Comme tous ses pairs africains qui ont joué rebelote au pouvoir. La date de 2012 ne doit rien au hasard : elle correspond à la mise en œuvre effective de l'une des plus grandes mines d'uranium au monde, dont l'exploitation a été confiée à la société française Areva au début de l'année. Plusieurs associations estiment qu'en agissant ainsi, le président nigérien réussit à associer à sa manœuvre l'ancienne puissance coloniale et donc à légitimer son action. La France fait cadeau de son silence à Tandja ! Lors de sa visite à Niamey le 27 mars dernier, Nicolas Sarkozy avait salué “l'enracinement démocratique” du Niger… D. B.