L'Algérie a-t-elle vraiment lâché le Polisario ? C'est la question que se posent actuellement bon nombre de citoyens algériens ? Cette question s'appuie en fait sur des rumeurs, jamais démenties, faisant état de la volonté du président Abdelaziz Bouteflika à encourager la “troisième voie”, c'est-à-dire, une solution qui ne peut être ni l'indépendance du Sahara occidental ni l'intégration de ce territoire non autonome au royaume du Maroc. Pourtant, le chef de l'Etat, dans sa lettre du 26 février dernier, adressée au secrétaire général des Nations unies, s'est exprimé sur la dernière proposition du diplomate américain, James Baker, dénommée “Plan de paix pour l'autodétermination du peuple du Sahara occidental”, qui fait obligation aux Sahraouis d'accepter l'autonomie à travers une Autorité du Sahara occidental (ASO), avant d'accéder, cinq ans plus tard, à un référendum qui tranchera définitivement sur le statut final du territoire. M. Bouteflika n'a pas rejeté le plan Baker, il a plutôt insisté sur “la nécessité de consacrer l'exercice du droit légitime du peuple sahraoui à l'autodétermination”, en se référant particulièrement aux responsabilités de l'ONU, vis-à-vis des “pays et peuples coloniaux”. Dans un mémorandum transmis à la même date à Kofi Annan, l'Algérie a exigé des garanties concernant la dernière proposition du diplomate américain, en émettant des “observations”, qui devraient tenir compte “des progrès antérieurement accomplis dans les négociations précédemment engagées entre les parties (…) et, notamment, les dispositions contenues dans les accords de Houston”. Comme pour l'accord-cadre, les décideurs algériens ont opté pour le compromis, jouant la carte de “la légalité internationale” et du “pragmatisme”, pour ne pas perdre la face. Cette position a d'ailleurs été bien exprimée par le ministre délégué aux Affaires africaines, dans l'entretien qu'il a accordé à El Watan, au début du mois en cours. “À travers un mémorandum qui explique sa position, l'Algérie considère que la nouvelle proposition de M. James Baker (…) constitue une approche constructive qui comporte des éléments intéressants et qui crée une dynamique nouvelle dans la recherche d'une solution juste, équitable et définitive”, a déclaré M. Messahel, en appuyant le “droit inaliénable à l'autodétermination”, “la légalité internationale” et “la responsabilité” de l'ONU dans le règlement du conflit de décolonisation. Alors, l'Algérie a-t-elle abandonné les Sahraouis ? La réponse est affirmative, d'une certaine façon, car la voie vers l'inconnu est désormais ouverte dans la région du Maghreb. On retiendra dans ce cadre que la direction du Polisario n'est pas en position confortable, puisque, comme l'a soutenu le président sahraoui, elle continue à subir des “pressions”. Résultat, le Polisario n'a pas rejeté les propositions de Baker et s'est déclaré disposer à apporter sa contribution pour “l'exploration du nouveau plan de M. James Baker, sans toutefois abandonner le plan de règlement initial en vigueur au Sahara occidental depuis 1991”. Son représentant auprès de l'ONU, Ahmed Boukhari, a affirmé récemment à New York, que le Front Polisario continuera à travailler “pour arriver à l'objectif d'autodétermination du peuple sahraoui”, en notant que cette position répond aux “désirs instamment manifestés par plusieurs pays, au sein et en dehors du Conseil de sécurité, parmi lesquels figurent l'Algérie et l'Espagne”. Le dernier mot revient au Conseil de sécurité, présidé actuellement par l'ancien colonisateur du Sahara. Que décidera-t-il à la fin du mois courant ? H. A.