Un concert de chants coréens a été proposé dimanche dernier au public de Bachtarzi. Un ténor, un baryton et une basse ont démontré avec harmonie et rigueur que la musique ne connaissait pas de frontière et que la beauté n'avait pas de définition. Grâce aux voix et aux couleurs, le public a fini par atteindre le "Mont Bleu". Après une brève allocution de l'ambassadeur de la République de Corée en Algérie, dans laquelle il a remercié le TNA d'avoir prêté son espace pour abriter le concert de chants coréens, qui tend à commémorer le 20e anniversaire des relations diplomatiques entre les deux pays, place au spectacle. En fait, la soirée a d'abord été entamée par un solo de piano, dispensé par le maestro Inkun Park, qui a revisité le Méphisto (Walzer n°1) de Franz Liszt. Avec son air habité et son jeu troublant avec la main gauche, le pianiste a fait plané l'assistance, relativement nombreuse, avec les notes graves bien ancrées et autres aigûes survolées. Un vent de sérénité a soufflé dans l'antre de Bachtarzi. Suite à ce prélude, les trois stars de la soirée : la basse Youngmin Suk, qui évolue actuellement en France et plus précisément à l'opéra national du Rhin à Strasbourg, en tant que soliste ; le ténor Hojoon Lee, qui est actuellement soliste au Kieler Opern Theatre (à Kiel en Allemagne) ; et le baryton Taehyoum Kim, qui s'illustre depuis 2005 à l'Opéra de Stuttgart en Allemagne en tant que soliste, ont rejoint la scène. Accompagnés au piano, les trois chanteurs ont repris, durant la première partie, de célèbres airs universels d'opéra. Ainsi, le public a eu droit au célèbre air “Una furtiva lacrima” (extrait de l'opéra L'Elisir d'amore) de Gaetano Donizetti, dispensé par l'incroyable ténor Hojoon Lee. Il a également été question de revisiter les célébrissimes opéras de Gioacchino Rossini, de Georges Bizet et de l'incontournable Carmen, ainsi que le fabuleux “Va Pensiero Sull'alli dorate” , de l'opéra Nabuchodonosor de Giuseppe Verdi. Ce dernier morceau a été présenté par les trois chanteurs, accompagné uniquement du piano. Le fameux morceau “Va Pensiero Sull'alli dorate” est généralement présenté par un grand nombre de musiciens et d'instruments. Toutefois, la beauté n'a pas manqué avec uniquement un piano et trois voix exceptionnellement harmonieuses. Rigoureux, puissants et grands techniciens, les trois chanteurs ont été largement complémentaires. En effet, la puissance de la voix de la basse, s'est divinement bien mêlée aux nuances proposées par le ténor et aux couleurs du timbre du baryton. Après une courte pause, place à la deuxième partie du concert : les chants coréens. Populaires, les chants coréens, repris au cours de cette soirée par les trois chanteurs et au piano par la jolie Lim Sunyoung, sont en fait des compositions modernes qui mêlent tradition et modernité. Des chants d'hier et d'aujourd'hui, bien ancrés dans la tradition et traversés par un vent de nouveauté. La basse a repris la chanson “Bimok” (l'arbre mort) d'Ilnam Chang, un chant triste qui relate la guerre, au siècle dernier, entre les deux Corées. Youngmin Suk chantera également la beauté de son pays avec “Sanchon” (Montagne et rivière), de Doonam Jo. Le ténor Hojoon Lée a revisité un chant de Sungtae Kim, intitulé “Dongshimcho” (lettre d'amour) ; il a également chanté “Bae Norae” (chant des pêcheurs), du compositeur Doonam Jo, et dans lequel il célèbre la pêche : une source de vie et de revenu pour les coréens, durant plusieurs années et pour plusieurs générations, puisque le pays est entouré d'eau. Le chouchou du public de Bachtarzi, le baryton Taehyoum Kim, a interprété la composition de Yeonjoon Kim, intitulé “Chungsan” (mont bleu). Pour la petite histoire, le Mont Bleu n'existe pas, c'est une expression coréenne qui signifie la sérénité, c'est-à-dire que lorsqu'une personne dit : “J'ai atteint le Mont Bleu”, cela veut dire : “Je suis en paix. Je suis serein. Je suis bien.” Pour clore en beauté cette soirée riche en nuances, en couleurs et en harmonie, les trois chanteurs ont interprété ensemble d'autres standards, notamment “Tonight” , de Leonard Bernstein, ou encore “O solo mio” d'Eduardo di Capua. Longuement ovationnés, les trois chanteurs et les deux pianistes ont offert au public algérois dans ce début de semaine, une soirée magique, inoubliable et très intense. Sara Kharfi