“S., à rebours d'Oran, je vais à pas pesants questionner le mirage hivernal de Ghardaïa. Ai-je rêvé ? Existes-tu ? Manifestement, j'ai érigé ton image d'eau impalpable sur ma soif d'aimer.” (Page 9). Extrait du premier poème portant le titre 31, du dernier recueil de poésie de Youcef Merahi, qui parle d'Oran, El Bahia, la ville du saint patron Sidi El Houari. Une ville tant de fois chantée et louée par ses artistes, à l'image d'Ahmed Wahbi avec sa mémorable Wahran. Dans ce recueil, l'auteur pète, comme dirait Djamel Amrani, c'est “un peu le mal de vivre, des vers qui s'estompent à la lecture, mais lesquels la réalité refait toujours surface”. Tout le long des pages, ce sont des questionnements, des remises en question, des aveux — tristes, douloureux —, des allers et retours infinis. Le poète s'adresse à S. Qui ? Une femme ? Un homme ? Son amour manqué ? L'amour de sa vie ? L'amour caché ? Autant de questions, peut-être sans réponse, mais qui donne du grain au moulin de notre imagination, de notre sensibilité. Ce recueil contient deux particularités. La première est relative aux poèmes qui “vont à reculons”. Chacun d'eux porte un numéro. Ils sont au nombre de 31. Toutefois, l'auteur a préféré commencer par la fin, c'est-à-dire par le dernier chiffre : 31. D'où le titre à rebours… En fait, la lecture de ces textes comme si on procédait au lancement d'une fusée. À chaque page, à chaque poème, à chaque mot, la curiosité est attisée. On se laisse aller, guidés par notre sensibilité et celle de l'auteur. La seconde particularité réside, quant à elle, dans le fait que tous les poèmes sont illustrés par l'artiste peintre Halima Lamine. Elle a donné libre cours à son pinceau. Il n'a fait que reproduire la l'émotion de sa maîtresse et du “maître des mots”, à savoir Youcef Merahi. Des traits, des formes, quasi symboliques, qui nous rappellent ou, plutôt, qui nous renvoient aux dessins africains. Oui, l'Afrique, ce continent, très chaud, gorgé de couleurs et surtout d'âme et sentiments… Très fluides, les textes coulent de source. Avec sont habituel style, l'auteur, disons plutôt le poète, retrace un chemin, une vie, une histoire, celle d'une ville, Oran. Celle des “gens” qui l'ont connue, aimée, décrite… À rebours d'Oran de Youcef Merahi, illustrations de Halima Lamine, recueil de poésie, 69 pages, éditions Apic, Algérie, octobre 2009, 350 DA