Ils sont tous à l'heure du rendez-vous cairote de samedi. Même fébrilité, même effervescence qu'à Alger, dans les quartiers où notre communauté est visible. Pour un peu, on se croirait à Bab El-Oued ou à El-Harrach. Barbès, dans le XVIIIe, lundi après-midi. Le décor est planté depuis quelques jours déjà. À peine sorti du métro qu'on entend, à grands renforts de décibels, le groupe Milano avec son tube “Mâak ya Lkhadra” dédié aux camarades de Ziani. Tout au long du boulevard Rochechouard, les jeunes sans papiers qui proposent habituellement des portables et des Marlboro made in Algeria se mettent au diapason. Visages grimés en vert-blanc-rouge pour certains, ils offrent toute une palette d'objets en rapport avec l'équipe nationale. Porte-clés, briquets à l'effigie des joueurs, fanions, brassards… Véritable opération marketing de la part de ces jeunes compatriotes qui conjuguent business et passion pour les Verts. Et ça y va fort ! Parole et foi de Oussama, originaire de Bachdjarah : “Les gens achètent, ils adorent tous l'équipe algérienne, ils adorent le pays.” Dans un quartier parisien aux allures de souk, la solidarité maghrébine est plus que jamais de mise. En témoignent les deux vitrines de l'établissement El-Mekki où des portraits géants des équipes tunisienne et algérienne sont déployés à la place des beaux costumes relégués pour la circonstance dans l'arrière-boutique. Avec ce slogan comme leitmotiv Inch'Allah en Afrique du Sud”. Autre décor mais la passion est la même à l'Ecole supérieure de commerce de Paris au 79, avenue de la République, qui a abrité samedi le troisième séminaire du Reage. Entre conférences et visites des stands, nombre d'étudiants rencontrés sur place affichent les signes de la fièvre verte. Ils s'identifient d'autant plus à l'équipe actuelle qu'elle est composée en majorité d'émigrés qui ont le même vécu qu'eux. “Ils sont nés en France, mais ils ont l'Algérie au cœur même s'ils ne parlent pas arabe”, jure Abdel qui répond indirectement aux ragots des chroniqueurs cairotes qui mettent en doute la flamme patriotique des capés de Cheikh Saâdane. Mourad, originaire de Sidi Aïch, tient un restaurant au boulevard de Crimée dans le XIXe. Derrière, bien visible sur le mur, un portrait géant de l'équipe nationale. “Ce sont des professionnels, ils ont l'habitude des grands matchs, ils ont le mental qu'il faut pour faire face à la pression du match”, dit-il en promettant qu'en cas de qualification, “les consommations seront gratuites samedi soir pour tous les gars du bled”. Plaise à Dieu ! Dans les milieux algériens branchés foot, certains se font l'écho de cette anecdote, selon laquelle les officiels français ne souhaitent pas une victoire des Verts pour ne pas voir les Algériens sortir manifester leur joie. Pure galéjade sans doute. Car si victoire il y a samedi, rendez-vous sur les Champs-Elysées. Philippe, un cuistot travaillant pour un Algérien au restaurant le Biarritz, sur le boulevard Ménilmontant, ne manquera pour rien au monde la fête samedi soir sur les Champs “Surtout si l'équipe de France l'emporte sur l'Irlande avec un large score”. En attendant, à Barbès, Montreuil, Belleville, la fièvre verte continue de grimper.