Depuis maintenant cinq ans, le Forum des chefs d'entreprise et le Medef se rencontrent une fois par an, une fois à Paris et une fois à Alger, pour faire le point sur la coopération. Dépassionner les relations entre l'Algérie et la France. C'est ce que recherche le Forum des chefs d'entreprise en recevant, aujourd'hui, une délégation du Medef, forte de 70 chefs d'entreprise, présidée par Mme Laurence Parisot, présidente de cette organisation patronale, accompagnée de François Périgot, très apprécié en Algérie pour avoir renoué le contact avec notre pays en 1998, et d'Yves-Thibault de Silguy, président du Comité Algérie au sein du Medef et du conseil d'administration du groupe Vinci. Depuis maintenant cinq ans, le Forum des chefs d'entreprise et le Medef se rencontrent une fois par an, une fois à Paris et une fois à Alger, pour faire le point sur la coopération entre les deux organisations et les opportunités de partenariat et d'affaires entre les entreprises des deux pays. Cette visite intervient dans un climat tendu après l'instauration par le gouvernement de nouvelles mesures de régulation de l'investissement et du commerce extérieur dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009. Des mesures qui, au mois d'août dernier, avaient soulevé un tollé, notamment à Marseille. Mais il semblerait que les entreprises françaises ont compris les motivations du gouvernement algérien. Le président du Forum des chefs d'entreprise, M. Hamiani, joint par téléphone, nous a affirmé qu'il a déjà évoqué la question des nouvelles règles avec le Medef. “Nous avons dit à nos amis français qu'ils doivent porter un nouveau regard sur l'économie algérienne”. Ce regard doit prendre en considération l'objectif recherché par le gouvernement, celui d'une plus grande implication d'entreprises locales à travers une prise de participation à hauteur de 51% dans chaque projet. M. Réda Hamiani a affirmé qu'il a eu l'occasion de confirmer aux chefs d'entreprise français que la révision de la politique économique est une réponse à la crise économique qui a secoué tous les pays du monde, y compris l'Algérie. Avec la chute des prix du pétrole, les explorations de l'Algérie ont diminué de moitié, alors que les importations des biens et services couplées aux opérations de transfert de dividende croissent, au contraire. Les importations des biens sont évaluées à 40 milliards de dollars. Les services représentent 11 milliards de dollars. Et le transfert de dividendes a atteint 7 milliards de dollars. En tout, ce sont 58 milliards de dollars qui quittent l'Algérie, alors que les exportations se chiffrent seulement à 40 milliards de dollars, après avoir dépassé les 79 milliards de dollars en 2008. “C'était impossible de continuer sur cette lancée. Il était indispensable de faire en sorte que les importations des biens et services et les transferts de dividendes diminuent. Le gouvernement a été dans son rôle, contraint et forcé, de prendre des mesures pour rééquilibrer les finances publiques”, a indiqué le président du FCE, indiquant que son organisation a souhaité “la réaction des autorités”, précisant, par ailleurs, que le staff des deux associations patronales “vont se rencontrer à plusieurs reprises pour analyser et évaluer la situation économique sur le plan international”. Par ailleurs, le président du Forum des chefs d'entreprise n'est pas satisfait des 15 années d'application du programme libéral en matière d'investissement étranger. “Cela n'a pas correspondu à nos attentes”, a-t-il regretté. À l'époque, beaucoup pensaient que les IDE allaient générer croissance qualitative, portée par l'innovation, par la technologie, exerçant des effets structurants. Tout le monde espère que les IDE permettront à l'économie algérienne d'entrevoir une petite ouverture à l'international, en favorisant les exportations. L'Algérie attendait beaucoup d'investissements. Force est de constater que le bilan est mitigé. M. Hamiani parle de déception. Jusqu'à 2008, l'Algérie a reçu un milliard de dollars par an d'investissement. Il n'y a pas eu de partenaires exceptionnels par rapport au Maroc et à la Tunisie. Le nombre d'entreprises étrangères présentes en Algérie est dix fois plus faible. L'Algérie n'a pas bénéficié de transfert de technologie. Les investissements se sont orientés vers les services, l'immobilier, la téléphonie, mais très peu dans la production. Des investissements qui n'ont pas permis de tirer vers le haut le mode de fonctionnement de notre économie. Le président du FCE reconnaît que les Français restent les premiers investisseurs hors hydrocarbures. “On se félicite, mais c'est nettement insuffisant”, a-t-il souligné. Le FCE craint plutôt que les PME privées, en raison de leurs faibles moyens financiers, compte tenu de la frilosité des banques, ne profitent pas de cette opportunité que leur offre la loi de finances complémentaire 2009 en imposant 51% des parts aux entreprises locales dans tout projet d'investissement. M. Hamiani rassure que le partenaire étranger, même minoritaire, peut assurer la gestion de l'entreprise. C'est ce qui est recherché par le gouvernement même. Par ailleurs, le président du FCE explique que sur le plan de la rentabilité, compte tenu du potentiel du marché algérien, détenir 49% des parts dans une affaire en Algérie est peut-être plus intéressant que de détenir 100% ailleurs. “Le retour sur investissement en Algérie est extrêmement intéressant.” Le Forum des chefs d'entreprise dit attendre des propositions concrètes pour un rapprochement entre les entreprises des deux pays pour réaliser des projets et avancer ensemble. “Nous avons exprimé le souhait de bénéficier des délocalisations. Participer ensemble aux appels d'offres”, a indiqué M. Hamiani, souhaitant que les entreprises françaises prennent des risques dans le secteur industriel. En outre, le président du FCE a estimé que les autorités algériennes et françaises peuvent envisager la création d'une banque de l'investissement mixte, qui pourrait financer des projets en partenariat. De la même façon, à côté de cette banque d'investissement, prévoir la création d'un fonds de garantie des investissements à même de sécuriser, vis-à-vis des banques, la prise de risque des partenaires français sur le marché algérien. “On voudrait aussi que nos amis du Medef nous aident à mettre sur pied une université orientée vers la technologie et un institut supérieur de logistique, qui faciliterait les exportations”, a ajouté M. Hamiani, évoquant l'élaboration d'une feuille de route destinée à structurer les relations entre les deux organisations et définir les priorités de leur coopération, pour les trois années à venir.