Les Algériens se sont bien défendus face à l'agression égyptienne. Avec des excès parfois, certes, mais excusables parce que sans commune mesure avec la vulgarité de la campagne injurieuse coordonnée par les autorités d'Etat d'Egypte et son réseau audiovisuel. C'est la première fois depuis deux décennies au moins que les Algériens avaient la conviction de soutenir une cause nationale. “Jetez la révolution dans la rue et le peuple s'en emparera”, avait prévenu Ben M'hidi. Cet engagement, conjugué à l'efficacité sportive de l'équipe nationale, a permis aux dirigeants algériens de jouer sur du velours face à l'agressivité irritée d'inconsolables responsables égyptiens. On ignore si la globale passivité de nos officiels envers les provocations discourtoises de leurs vis-à-vis égyptiens est un choix d'élégance diplomatique ou le résultat d'un complexe qu'ils nourrissent à l'égard d'une “puissance” tutélaire dont ils s'imposent, par principe, la condescendance dédaigneuse depuis le discours de Ben Bella du 28 septembre 1962. Hier, le ministre de l'Intérieur recevait les corporations et les corps constitués qui ont accompagné cette épique fin de campagne de qualification de l'équipe nationale pour le Mondial-2010. Deux jours avant, le ministre délégué à la Communication témoignait à la presse sa reconnaissance pour son rôle salutaire dans cette épreuve politico-sportive. Notre presse, plus appréciée par nos responsables quand elle se fait disponible que lorsqu'elle se veut libre, une presse sous surveillance, avait réagi aux circonstances, en accord avec le réflexe populaire d'autodéfense. Sans attendre, même dans son compartiment embrigadé, un ordre qui ne venait d'ailleurs pas, conformément à l'attitude figée d'un pouvoir stupéfait par l'agression du régime “frère”. Cet affrontement médiatique devait être largement favorable à l'Egypte dont l'ouverture du champ audiovisuel a fait, depuis longtemps, une puissance médiatique. Mais il a tourné à l'avantage de l'Algérie grâce à l'enthousiasme nationaliste d'une presse écrite qui ne comptait plus sur l'inspiration des “sources”, subitement taries, grâce à l'inventivité de nos internautes bientôt surveillée par une loi dite “sur la cybercriminalité” et à l'objectivité de télévisions internationales étonnées par l'emballement belliqueux et ridicule de leurs concurrentes égyptiennes. Bouteflika s'est adjugé la totalité des dividendes politiques de la victoire. Il a eu à considérer l'importance d'un développement médiatique, d'une presse audiovisuelle surtout, en ces temps de “guerres” froides qui jalonnent les relations internationales. Et ce n'est pas avec une “grosse Bertha” comme l'ENTV, élevée à la désinformation commandée, qu'on gagnerait les batailles de la réactivité et de l'information ! Sauf que les télévisions ne peuvent pas ressembler à celles, égyptiennes, tenues de relayer le discours mystificateur du raïs et de ses thuriféraires. Ces réceptions risquent donc de ressembler à de simples citations pour services rendus à des professionnels qui doivent vite retourner à la pratique du journalisme “responsable” que le pouvoir attend d'eux, et dans la seule presse écrite dans laquelle il les confine. Même si la reconnaissance est là, la confiance n'y est pas encore. M. H. [email protected]