La construction de la première voiture made in Algeria est “possible”, mais “assujettie à une mobilisation politique et économique et du gouvernement et d'un tissu industriel plus large qu'on ne le croit”. C'est le président du FCE, en l'occurrence Réda Hamiani, qui le dit. En plus clair, l'Algérie devra faire face à une dichotomie plus complexe pour enfin avoir une industrie automobile au sens propre du terme. M. Hamiani, qui s'est exprimé, mercredi après-midi, en marge d'un déjeuner de presse organisé par l'Association algérienne des concessionnaires automobiles, que dirige M. Baïri, s'est montré sceptique : “De deux choses l'une : ou notre pays développe d'abord une vaste chaîne de sous-traitance avant d'engager la construction automobile, ou notre pays s'engage et, en cours de route, on fera avec pour développer la sous-traitance. Mais la manière avec laquelle les firmes automobiles montent les véhicules, notamment la fabrication de composants (faisceaux électriques, pare-chocs, phares…), on doit avouer notre faiblesse”, a commenté M. Hamiani, dans une discussion à bâtons rompus avec les médias présents. Autrement dit, le véhicule made in Algeria coûtera très cher et pour le constructeur et pour le consommateur qui aura, donc, à payer un produit local de moindre qualité et à un prix élevé par rapport à un produit fini. Argumentant sa position à ce sujet, M. Hamiani dira que les conditions du gouvernement algérien sont légitimes, notamment concernant l'intégration des métaux et autres plastiques fabriqués localement, pour toute firme qui voudrait s'installer en Algérie. Mais, faudra-t-il aller aussi vers l'allégement des contraintes douanières et des taxes appliquées sur le produit fini sur notre territoire. Le patron du FCE, qui a exprimé sa crainte quant à une nouvelle gabegie algérienne, ira loin pour citer des exemples vivants. “Chez nous, il y a comme un télescopage entre le produit national et celui importé, en termes d'intérêt. Mieux, nous n'avons pas également la qualité exigée mondialement en matière de sous-traitance alors que les constructeurs homologuent leurs produits même dans d'autres pays émergents. Et au moment même où l'Algérie émerge, justement, nous assistons à une montée en puissance de l'économie asiatique qui propose des produits moins chers et envahit les marchés du monde. Je pense que notre tissu industriel est actuellement insuffisant pour prétendre réussir un véhicule 100 % algérien, d'une part, et qui sera à la portée du consommateur”, a développé encore le président du FCE. Celui-ci reviendra sur la triste expérience de l'installation de la firme italienne Fiat en Algérie et l'échec qui s'en est suivi. “J'ai survolé en avion le site où devait s'installer Fiat à Tiaret. Nous avons érigé en dur une unité gigantesque alors qu'il suffisait, comme cela se fait partout dans le monde, de construire de simples hangars répondant aux normes de sécurité et à moindre coût. L'usine de Tiaret nous a coûté très cher bien avant son lancement. Déjà, à l'époque, Fiat était aux abois. Et nous, nous avions construit une usine en dur que nous devions amortir sur notre dos. Aujourd'hui, les choses ont changé, Fiat s'est revigoré et revient en force sur le marché de l'automobile. Un marché que les décideurs doivent prendre en considération avant d'engager une industrie aussi lourde que l'automobile”, dira encore M. Hamiani, qui conclut : “Autrefois, les constructeurs automobiles faisaient un assemblage à 60 et 80% dans leurs usines délocalisées. Aujourd'hui, ces mêmes constructeurs ne misent que sur 10 à 20% du contenu du véhicule, comme la motorisation et la technologie. Chose qu'il faut méditer avec attention. Et tant que notre pays s'appuie sur le pétrole, comme d'ailleurs plusieurs pays émergents, nous ne pouvons que craindre les retombées de ces décisions. Nous devons immédiatement nous prémunir au lieu de continuer à injecter de l'argent dans des investissements lourds à la manière des années socialistes.”