Les élections sénatoriales ne devraient pas chambouler le paysage politique national, encore moins influer sur la marche du Conseil de la nation. Et pourtant, elles ont fait couler beaucoup d'encre et de salive. Pas seulement en raison du fait qu'elles constituent l'un des rares évènements politiques dans le paysage algérien, mais pour l'intérêt que constitue le poste de sénateur. Plusieurs partis politiques ont eu un semblant d'activité partisane, en raison de l'approche de cet “événement”. Le renouvellement de la moitié des membres du Conseil de la nation, prévu par la Constitution, à mi-mandat de cette institution, ne devrait pas comporter d'enjeux politiques, hormis de vérifier que les partis les plus en vue disposent toujours de leurs relais locaux. Si le RND part avec les faveurs des pronostics, en raison de sa stabilité, mais aussi de sa récente alliance électorale avec le PT, le FLN est quelque peu affaibli par les récurrents cas d'indiscipline dus essentiellement au désir des notabilités locales à imposer leur logique au détriment de celle du parti. Il est vrai que l'ancien parti unique est trop pris par la préparation de son neuvième congrès prévu pour mars prochain, mais cela ne l'empêche pas de vouloir prouver qu'il reste la première force politique du pays. La bataille des sénatoriales se déroule au niveau local, d'où les difficultés rencontrées par les directions des partis à imposer une certaine discipline à leurs troupes. Les sénatoriales, qui sont l'affaire des grands électeurs (élus des APC et des APW) dans les 48 wilayas du pays, attisent toutes les convoitises locales. Le statut de sénateur, au-delà du salaire (30 millions), et des avantages qui vont avec, permet surtout de garantir une immunité parlementaire. D'où le forcing de tous les affairistes locaux afin d'obtenir ce statut. Des voix s'achètent à coups de milliards, et à travers tout le pays, la fièvre des sénatoriales dépasse le stade partisan pour concerner les notabilités locales qui, faute d'arrangements à l'amiable, s'en remettent à la corruption, au chantage, au népotisme, parfois avec l'aide de l'administration. Il n'est pas étonnant, dans ce cas, de constater l'absence totale d'un quelconque débat des prétendants au Sénat. Il est vrai que le Conseil de la nation est handicapé par la Constitution qui fait de lui une simple chambre d'enregistrement où l'on ne peut pas débattre des projets de lois soumis par le gouvernement. À un moment donné, l'existence même de cette institution avait été remise en cause par le président Abdelaziz Bouteflika. La Chambre haute du Parlement paraît, donc, plus comme un lieu de villégiature, une couverture juridique aux affairistes de tous bords, et une façon de recycler le personnel politique et administratif, via le tiers présidentiel tant convoité. Ce qui explique, en grande partie, l'absence de débat sur le renouvellement de la moitié des sièges du Sénat, encore moins sur le bilan du Conseil de la nation.