“On m'a dit que la campagne de vaccination a commencé aujourd'hui (hier, ndlr) et que 7 personnes sont mortes suite à la vaccination”, s'informe un citoyen auprès des standardistes du centre d'écoute sur la grippe A/H1N1 installé à la Direction de la santé publique (DSP) à Alger-Centre. Le 30 30 fonctionne-t-il selon les normes voulues ? Le Dr Haddadou, une des médecins travaillant dans cette cellule d'information, essaye tant bien que mal d'expliquer et de convaincre son interlocuteur du non-fondé de ces rumeurs qui n'ont cessé depuis le début de la pandémie d'inquiéter les Algériens. “Ce n'est pas vrai, la campagne de vaccination n'a toujours pas commencé. Ajoutez à cela, plusieurs pays ont déjà utilisé ce vaccin et personne n'en est mort”, assure-t-elle. Lors de notre virée hier à la DSP, nous avons été informés que les personnes travaillant dans la cellule sont des médecins détachés de leur poste et mobilisés au 30 30 ; cependant, il y en a quelques-uns qui sont bénévoles. Le bureau est scindé en deux équipes. Une qui assure le service durant la journée, à savoir de 8h à 20h. Et une autre qui travaille la soirée, toute la nuit jusqu'au matin. En fait, la cellule fonctionne pour ainsi dire 24h/24. “Pour la première, elle est constituée de quatre personnes et la seconde de trois”, explique le Dr Bouyoucef, responsable du centre. Le bureau ne compte que 4 lignes téléphoniques. Les médecins sont chargés de répondre aux interrogations et préoccupations des citoyens qui appellent des 48 wilayas. Selon les standardistes, quatre lignes téléphoniques, ce n'est pas suffisant et c'est la raison pour laquelle elles sont saturées et sont parfois occupées. Si dans la rue, les gens ne montrent aucun signe d'inquiétude, ce n'est visiblement pas le cas au sein de la cellule. Le téléphone n'arrête pas de sonner. Un vrai standard. “Nous avons entre 800 et 1 000 appels par jour”, précise le Dr Bensalem. Elle ajoute qu'“il y a quelques jours, une panique s'est emparée des citoyens surtout après l'annonce des premiers cas de décès”. Les responsables du centre reconnaissent que durant “les premiers temps, beaucoup de personnes appelaient pour s'amuser, mais maintenant les choses ont changé”. Lors de notre virée, nous avons assisté à une conversation : une demoiselle téléphone et lorsque le médecin lui demande les raisons de son appel, elle répond qu'“elle veut juste discuter”. Durant notre présence, plus de 50% des appels étaient des canulars. Mais heureusement, il n'y a pas que les canulars. Les médecins avouent qu'“il y a des gens sérieux”. La préoccupation numéro un de la population concerne le vaccin, la période du début de la campagne de vaccination, l'obligation de se faire vacciner ou pas et la fiabilité du vaccin. À tous ces questionnements, les médecins du centre répondent en donnant toutes les informations nécessaires aux citoyens. En outre, le Dr Maouche prévoit une baisse sensible des appels dès le début de la campagne de vaccination. “Quand les gens verront le président de la République, le Premier ministre et le ministre de la Santé se faire vacciner, ils seront rassurés et appelleront moins”. Cependant, cet avis n'est pas partagé par sa collègue. “Moi je pense le contraire, les gens vont continuer à s'interroger sur la disponibilité du vaccin. Il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas assez de doses”, a-t-elle argumenté. Dans certains cas, les citoyens continuent de s'informer sur les symptômes de la maladie et les démarches à suivre pour s'assurer qu'ils n'ont pas “chopé”, la grippe porcine. Tout en les rassurant, le médecin conseille à son interlocuteur de se rapprocher de l'hôpital ou du centre médical le plus proche pour consultation. Bien qu'elles aient effectué une visite chez le médecin, certaines personnes appellent la cellule pour avoir davantage d'assurance sur leur état de santé. “Mon frère a de la fièvre et des courbatures, il est parti voir le médecin et il l'a assuré que ce n'est pas la grippe A, il ne sait pas quoi faire. Pouvez-vous nous dire quelle est la démarche à suivre ?” s'interroge une jeune fille au bout du fil. Il faut dire que le bureau qui abrite le centre d'écoute est appelé à connaître un développement. De nouvelles tables ont été installées. L'effectif va augmenter. Il passera de 4 à 12 personnes. Le personnel demande, en effet, plus d'espace. “Déjà qu'on est à l'étroit, avec un plus grand nombre de personnes ça sera un vrai souk”, avoue l'une des médecins. Une autre renchérit : “C'est du bricolage, je ne comprends pas pourquoi on a été délocalisé. Nous étions mieux à l'INSP de Ben Aknoun, on avait toutes les conditions de travail et l'endroit était plus spacieux. Le 30 30 avait bien commencé.” Les médecins du 30 30 ne quittent pas leur poste durant la journée. Ils n'ont même pas la pause déjeuner. On leur sert le repas sur place. Les opérateurs sont aussi obligés de noter le numéro des personnes qui appellent et les raisons de l'appel. Le Dr Chakou explique que cette mesure est faite pour connaître l'intérêt que portent les gens au centre pour faire éventuellement plus tard un bilan de cette opération. Sa collègue conclut que cette mesure vient aussi pour “dissuader et décourager les plaisantins”.