Les hommes forts ont-il, consensuellement, renoncé à leurs ambitions ? Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) tient, à partir d'aujourd'hui, son congrès extraordinaire aux Pins Maritimes, à Alger. Le caractère extraordinaire est, bien entendu, justifié par la situation exceptionnelle générée par le décès de Mahfoud Nahnah, le mois dernier. Les congressistes vont, d'abord et avant tout, procéder à la nomination du successeur de leur président défunt. Et, déjà, le nom du favori est livré par les responsables du parti islamiste. Abderrahmane Saïdi, député de Blida, proche de Nahnah de son vivant, semble même bénéficier du soutien indéfectible de la quasi-totalité de ses collègues du bureau exécutif national. Inconnu des médias, discret, Saïdi est-il vraiment le successeur désigné ? Même si le porte-parole du MSP, l'ancien ministre de l'Industrie Abdelamdjid Menasra, soutien que la caution du bureau exécutif ne donne aucune garantie de succès au député de Blida — il confirme du reste la confiance du bureau, ce qui, en soi, est inhabituel au sein de ce mouvement — le vote des 1 200 délégués à ce congrès extraordinaire risque, dans le cas où la candidature se confirmerait, d'être purement et simplement conditionné. Cela voudrait dire, en tout cas, que le président défunt a laissé des “ouissayate” (recommandations qui, prises dans le sens religieux, supposent des effets moralement obligatoires, du moins contraignants) que les responsables actuels s'empressent de mettre en pratique. Si Saïdi est nommé successeur, l'aura du MSP aura à en pâtir véritablement. Car il est curieux que des hommes aussi influents que Bouguerra Soltani (ancien ministre), Abderrazak Mokri (ancien chef du groupe parlementaire), Tayeb Aziez (président du conseil consultatif) ou Omar Ghoul (actuel ministre des Travaux publics) acceptent ainsi le fait accompli et, surtout, abandonner toute ambition politique somme toute légitime. Ce manque d'ambition influerait indubitablement de façon négative sur l'avenir du mouvement, au point qu'il n'est pas clair que le futur chef de l'Etat renégocie la participation islamiste aux commandes de l'Etat. Or, le poids de ces hommes serait un atout considérable dans d'éventuels bras de fer. Le mieux à ce moment-là, pour le MSP bien sûr, serait d'être assuré d'une plus forte représentation au sein de son staff dirigeant. Le staff dirigeant justement reste un élément occulté par la campagne actuelle d'information. Le nom de Abderrahmane Saïdi est ainsi balancé indépendamment de tous les autres comme s'il s'agissait d'un leader au charisme caché, capable d'une aura qu'il n'a pas, aujourd'hui, pour conduire les affaires du MSP de la même maîtrise que Nahnah. Cela étant, les congressistes devraient discuter de l'ensemble de leurs questions internes et, de façon intermédiaire, de la situation politique du pays. L. B.